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Frédéric François

Publié le 06 septembre 2008 par Loïs De Murphy

Je m’étais promis de cesser l’achat coûteux du magazine Lire mais je n’arrive plus à me procurer le Matricule des Anges auquel je vais devoir m’abonner à présent. Les promesses sont faites pour culpabiliser de ne pas les tenir et c’est encore une fois le cas. « La faute à la 5ème, l’ nez dans les chrysanthèmes… » Certes, je ne vais pas détourner la chanson du poulbot Hugolien pour si peu mais je m’en veux d’être autant influençable.
Cette chienne publique de télévision qui partage désormais François Busnel avec la revue objet de mon embarras nous avait promis une émission littéraire avec un Frédéric Ferney plus jeune. Jeunisme racoleur qu’il nous faut supporter aussi en littérature visiblement. Comme dirait Claude Léveillée, je me fous du monde entier quand Frédéric me rappelle les amours de nos vingt ans…
Parmi les pertinentes originales et érudites questions posées aux écrivains présents sur le plateau (que des inconnus illisibles), Régis Jauffret eut droit à : « un écrivain a-t-il tous les droits ? » (Oui, je sais, c’est énorme…)
François nous resservit ensuite sa vieille terreur nocturne autour du mensonge et de la vérité chez un auteur, réveillée il y a quelques mois déjà par Micha Defonseca et que j’avais brocardée ici.
Bref, je ne me croyais pas une enfant de la télé abâtardie et influençable à ce point et c’est pourtant et sans aucun doute suite à cette émission que j’ai acheté cette blague onéreuse à 5.50€.
Déjà ce qui fait rire jaune dans ces revues littéraires, ce sont les pages entières de réclames consacrées à Actes Sud ou Eho. C’est comme dans les magazines de gisquettes ou de gaziers : ils vous promettent des comparatifs et critiques objectifs de produits cosmétiques ou de voitures, mais toutes les marques qu’ils citent payent des encarts de pub pour figurer dans leurs pages.
Ce qui m’a cruellement fait regretter de claquer mon billet de cinq, c’est l’édito de François dans le supplément consacré à la rentrée littéraire :
« » Plus de 600 romans à découvrir chez vos libraires entre la fin août et la mi-octobre (je vais les compter pour voir). Comment débusquer les pépites ? En suivant les préconisations de nos journalistes […] et celles des libraires du réseau Virgin Megastore […] (je suis à deux doigts de Jurançon de retourner en analyse)
Dans la totalité des cas, les choix des libraires correspondent à ceux de Lire. Cette sélection ne vante jamais les mérites d’un ouvrage que nous aurions, par ailleurs, déconseillé. Après tout, nous faisons le même métier : lire, aimer, guider, conseiller.
[…]Voici donc les trente livres que les quarante-six équipes de libraires Virgin et Furet ont retenus.[…] Les libraires ont la parole. Ils la prennent en toute indépendance
(je vous fais grâce d’un cours sur la grande distribution), avec fantaisie parfois, avec curiosité toujours.
Je vous épargne également mes remarques sur ce que je pense de ce grand défenseur des librairies indépendantes, il vous suffit de taper les mots-clés "librairies" + "indépendantes" pour voir s'il figure dans la liste.
Un de ces vendeurs de papier au kilo et à la photo d’écrivain(e) plus grosse que le titre et la quatrième de couv. confesse qu’ils n’ont pas le temps de tout lire, et qu’il leur faut donc établir des priorités, selon des critères très subjectifs : les thèmes qu’ils jugent intéressants, les auteurs chouchous qu’ils suivent année après année, les écrivains majeurs qu’il leur faut avoir à l’œil.
En effet, leur sélection se cantonne à part deux ou trois exceptions aux grosses maisons d’édition, et aux auteurs déjà publiés. Pour les premiers romans, ils ont fait comme vous et moi, ils ont consulté la presse et les notes des maisons d’édition.
Au niveau des notations c’est également édifiant : ils ont un choix limité d’ouvrages à sélectionner, donc quand ils ont épuisé toutes leurs meilleures notes, de 16/20 à 20/20 et qu’ils entament la lecture d’un bouquin qu’ils trouvent meilleur, c'est-à-dire vendable, ils n’hésitent pas à renoter pour déclasser leurs précédentes sélections.
D’ailleurs, ils ne disent pas « vendable » mais « qu’il nous est aisé de transmettre à nos clients ».
Ce sont également des prescripteurs magnifiques, qui admettent que Pynchon est un auteur culte, mais pas forcément grand public, et qu’il leur revient de prévenir si un livre est facile à lire ou non.
Petite digression, ça viendrait d’eux les tranches d’âge inscrites sur les livres de littérature pour la jeunesse, cette ignominie dégueulasse qui trompe la curiosité des jeunes lecteurs ?
J’imagine le vendeur à Vierge Mégascore : « Madame, vous avez une trentaine d’années, célibataire à poils ras, et les miettes d’un éclair au chocolat sur la commissure des lèvres. Lâchez immédiatement cet essai sur la théorie des cordes en physique quantique et lisez le journal de Bridget Jones. »
Oui je sais, il n’aurait peut-être pas dit : « commissure » et il n’y a pas d’essai de physique quantique à Vierge Mégascore, mais c’est mon imagination et je fais ce que je veux !
Pour conclure, s’il est légal d’intenter un procès en mauvaise foi je veux bien contacter un avocat pour avoir lu la pépite suivante d’une vendeuse de chez eux :
« On ne tranche pas forcément en faveur du livre le plus apte à être vendu. Au contraire ! Les livres accessibles seront plus à même de trouver preneur en librairie. »
Le premier qui me dit qu’il achète ses livres à Vierge Mégascore, à la Flaque ou à Cul tu rases je le blackliste pendant un mois !


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