Magazine Journal intime

Trust

Publié le 16 octobre 2008 par Pffftt

J’ai toujours eu une interprétation de tes silences comme l’annonce d’une catastrophe. D’abord parce que tu parles toujours comme une libération et après parce que moi si tu ne parles pas, je n’ai plus rien à répondre.
Quand ton silence tombe, tes yeux s’écarquillent.
Ils deviennent immenses comme si c’était se taire pour absorber le reste.
D’ailleurs c’est ça que tu fais en cachette, tu crois que je ne te vois pas et que je m’en fous. Enfin tu te persuades de ça…on le fait tous…c’est pour ça que ce n’est pas grave, ou le contraire.
En plus du silence et de tes grands yeux, y a comme un vide.
C’est pas l’horreur tu vas me dire le vide. Putain si, j’te jure ça fait mal.
Par exemple t’es là mais transparente. On te parle mais tu réponds oui à tout.
Toi d’habitude t’aimes bien dire non, c’est un principe bien à toi, dire non et après on discute. Tu appelles ça : le « dialogue par argumentation massive ».
Mon cul !
Mais c’est toujours moins pire que ton absence, c’est vrai…
Un silence de toi, je ne sais jamais combien de temps ça peut nous emmener. La dernière fois c’était tellement long que j’me suis arrêté d’y penser. C’était collé dans notre quotidien, comme le timbre sur l’enveloppe, et j’ai joué au facteur, ou à la boite aux lettres je ne sais plus.
D’accord on s’en est relevé après, d’accord j’ai patienté certains soirs dans le pieu de la voisine d’en face, d’accord c’est moi qui ne comprend rien à rien, d’accord je suis un salaud, d’accord tu ne peux pas maîtriser tes silences, d’accord elle est blonde et toi brune je suis un double salaud, d’accord tu mériterais que je passe ma main dans tes cheveux lorsque tu te vides de tout, d’accord on a besoin l’un de l’autre, d’accord j’ai couché avec elle une bonne dizaine de fois et je prétends que c’était rien je suis un triple salaud…d’accord pour tout.
D’accord pour tout parce que je suis pas courageux, parce que je ne veux pas te perdre, parce que c’est moi qu’on accuse et que je dois me faire pardonner, parce que toi tu es brune et elle est blonde, parce que merde j’te jure que si…ça fait mal…
D’accord pour tout mais arrête de te taire, secoue moi pour de vrai, engueule moi si tu peux, monte le son de ta voix, diminue l’ouverture de tes yeux…
D’accord pour tout mais arrête d’écrire, arrête de produire, arrête d’absorber le monde et de disparaître, d’accord pour tout…tout...
…tout, mais pas l’écriture.

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