Magazine Journal intime

Boudu (sauvé des eaux, grâce à ton blé)

Publié le 04 novembre 2008 par Corcky

Parfois, quand je te parle de mon boulot, je me demande ce que tu dois penser de moi.
Je me dis que tu me vois peut-être en ultra-catholique mal baisée un peu frustrée, cherchant dans son métier (qui, rappelons-le, est un sacerdoce) une forme de rédemption globale, un rachat de ses pêchés capiteux capitaux (Seigneur, bénissez-moi parce que je suis lesbienne, basanée, juive, portée sur la vodka russe et l'herbe hollandaise, suffisamment vulgaire pour m'attirer les foudres de ma femme mais pas assez pour pouvoir donner la réplique au Professeur Choron, pathétiquement hypocondriaque et passablement névrosée, d'une mauvaise foi frisant le ridicule et d'un anticléricalisme qui me fait souvent t'appeler le Saigneur plutôt que le Seigneur).
Eh bien, détrompe-toi.
Le milieu caritatif, c'est aussi une forme d'arnaque générale, même si ça dédouane un peu (Ah, le lâche soulagement de refiler dix euros aux Restos du Coeur à la sortie de la Fnac, juste après en avoir claqué trois-cent dans un baladeur MP3 dont tu n'avais pas besoin...)
Simplement, c'est plus discret, c'est sournois, c'est une arnaque aux bons sentiments qui ne dit pas son nom.
Si tu veux quelques exemples, souviens-toi des dix balles que tu as peut-être investis, dans les années 80, dans ce 45 tours de merde sur lequel braillaient des stars franco-françaises en mal de popularité, et dont les recettes étaient censées aller directement à Addis-Abeba sans passer par la case "Sacem" (encore aujourd'hui, quand je repense à Renaud, Didier Barbelivien ou Julien Clerc en train de bêler que l'Ethiopie meurt peu à peu, j'ai une hémorroïde qui pousse et un furoncle qui éclate).
Mais tu as peut-être préféré la version anglophone, et dans ce cas tu as dépensé quinze francs pour te payer le mythique We are the world, une soupe même pas digne de se retrouver dans le Top 50 de l'époque (Top 50, oui, une émission qui dressait chaque semaine la liste de ce qui se fait de pire dans la variété mondiale, et que des millions de connards achetaient et écoutaient avec ravissement).
La charité, mon bon ami lecteur, est à l'être humain ce que la régurgitation est au chat domestique: un acte de vidange purement physiologique et vital pour l'équilibre de l'organisme (le chat restituant le trop-plein de poils qu'il s'est avalé en faisant sa toilette dans le canapé, l'humain dégorgeant son trop-plein de culpabilité judéo-chrétienne atavique).
Tu me trouves cynique?
Tu as raison.
Et en parlant de raison, j'ai les miennes, que je ne t'exposerai pas en détails dans ces pages, mais dont je peux te donner un aperçu.
Tu sais peut-être que l'Armée du Salut se retrouve engluée dans un bête scandale dont elle se serait bien passée.
Tu as peut-être compris, un peu avant la majorité des téléspectateurs, qu'Augustin Legrand est au combat du mal-logement ce que José Bové est au développement durable: une tête de gondole façon "bling-bling" aussi creuse que le nez d'un cocaïnomane multi-récidiviste (rien que le fait de savoir qu'Augustin a joué dans Les rivières Pourpres 2 devrait le discréditer aux yeux de toute personne normalement constituée, tant ce film a marqué l'histoire de la daube cinématographique de son empreinte nauséabonde).
Tu sais peut-être aussi que les pieds nickelés de l'Arche de Zoé étaient partis faire leur marché de vrais-faux petits orphelins du Darfour histoire de les refourguer pour quelques milliers d'euros à des parents français en mal de gosses du Tiers-Monde au regard doux et au ventre creux.
Quant à ce qui se trame dans les couloirs des foyers pour SDF, je préfère ne pas aborder le sujet, parce que ce sont en partie tes dons, cher lecteur, qui payent le café du distributeur dans le hall d'accueil, et que sans café, comme tu le sais, je serais parfaitement incapable d'aller travailler pour gagner le salaire que la DDASS a prévu pour moi, sans parler des heures que je passe à discourir (dirais-je "à jacasser"?) sur ce blog, des kilomètres de fringues d'enfant que j'enfourne dans la machine à laver, des tombereaux d'insanités que ma bouche s'évertue à déverser chaque jour dans les chastes oreilles de mon entourage, des parties endiablées de Need For Speed que je partage avec ma femme et des centaines de mails d'insultes que j'ai l'énergie de rédiger chaque jour.
Tu l'auras compris, lecteur, si les ONG n'ont pas spécialement besoin de toi pour mettre du beurre dans les épinards de leurs dirigeants, pense aux salariés de ces mêmes ONG dont le pouvoir d'achat dépend, pour partie, du fric que tu voudras bien lâcher entre la dinde et le boudin au champagne du 24 décembre.
Souviens-toi toujours que Benjamin Franklin, illustre philosophe et génial inventeur du paratonnerre, a dit un jour:

Quand on a bonne conscience, c'est Noël en permanence.





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