Magazine Journal intime

No Hire

Publié le 12 novembre 2008 par Lephauste

Point ne point la colère ? Où donc est-elle fourrée la harpie de mes heures bouleversées, transpercées de laves ? Elle qui chaque matin me soigne le moral en me mettant en plis, au fer brûlant, les nerfs. Elle qui pousse sous mon regard morne les mauvaises nouvelles du monde :

- Quoi de veuf ce matin ? Rien que du pieux messires, du veule, du volatile, du vorace, de l'écrouelle, du mendiant rabroué, du banquier crevant d'ulcères légèrement hâlé, de la ménagère réaménagée, un général peut-être, passé par les armes ? Des trafiquants défoncés de la carrosserie, cela convient-il à vos appétits de traîneur de boulets ?

Soupirs d'haleine chargée comme le compte en banque d'un nouveau né à la carrière. Non rien, je vais casser quelques noix et des coquilles me fabriquer un casque pour mon baladeur en os de seiche. Je vais aller sous le cerisier pour compter les feuilles tombées en désuétude. Je vais de l'olympe changé les guirlandes, c'est les fêtes sur les champs élysées. Je vais peut-être bien me recoucher et reprendre ce rêve d'unité, ce rêve que j'ai laissé aller au moment où du profond de mon sommeil, une voix s'est mise à hurler :

-Marche ou crève !

Ni ne marche ni ne crève, je contemple ce qui reste de terre et d'eau et me dit qu'avec ça je pourrai bien bricoler une sorte d'empire d'où n'auraient pas à fourmiller les plaintes de la multitude dont je suis le multiple et le un et à elle, l'infiniment uni.

No hire ahora ! Je sais bien où elle est, ma colère. Elle a pris congé pour un instant, s'en est allée faire un tour en pays conquis. Ce grand pays de l'iniquité, elle fait son tour du monde où l'insane et l'immonde font la pluie et le beau temps. A-t'il fait beau ? Lui demanderai-je quand elle rentrera. Un vrai temps de chien ! Me rétorquera-t-elle, en retrouvant sa place entre les pages de mon cahier aux lignes brisées.


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