Magazine Journal intime

Ca fait rien

Publié le 10 décembre 2008 par Lephauste

C'est que depuis belle je ne faisais plus rien. Je laissais passer les caravanes d'idoles. Je ne m'émouvais que pour des situations sans avenir, des urgences à regagner bien vite l'état initial de la peur et à repasser en solitaire des spinnakers aux couleurs jambon de Paris. Ne rien faire, c'est un bon moyen d'éviter les hors d'oeuvre du genre :

- Alors tu fais quoi de beau en ce moment ?

Du beau justement je trouvais que ça faisait une paille qu'on en avait pas fait, de bien non plus d'ailleurs. J'étais niniliste.

- Oui mais alors, tu vis de quoi je veux dire...

Ce qu'ils veulent dire on ne le sait jamais en fait. Ce qui fait que ça fait pas du bien non plus de s'entendre interpeller par quelqu'un qui ... je veux dire ... Ce que tu veux, c'est dire ou vouloir ? Et puis pour peu qu'on reste sous la flotte un bon quart d'heure, dans une bise de couilles fripées, ça fait pas beau, non plus.

- Un peu comme toi, tu vois.

Là tu vois, c'est un peu pareil à si tu vas chez le coiffeur, sans envie. Tu finis par gicler du fauteuil avant que l'autre ait fini de repasser son ruban de cuir à la semelle d'un fer épais pas plus qu'un coupe-choux. Tu vois, c'est pour la circonstance où tu as besoin que l'autre y plonge dans une faille spatio-personnelle. Du style :

- Merdre, je dois être bouché à l'émeri pour qu'il me montre à voir des trucs où je ne vois rien, en tous les cas, pas de quoi réveiller le commandant en chef de la place forte d'où que Duc les Alpes sont aussi dans les nuées que les hanches de Miette. C'est moi qu'est con ou c'est lui qu'est pas fini ? J'veux dire ...

Et puis à cette époque chez le père Pinson, merlan à la raie fine, frisé où pas tu ressortais bourré comme une huître, à cause du Petrol Han de chez Ming. Celui qui renforce si bien le cuir chevelu que ça a fait de moi une tête à gnons, tu vois ?

- Oui ça je vois mais ça dit pas comment tu croûtais, où c'est que tu perchais, qui lavait ton linge et te reprisais la baveuse, je veux dire ...

Me tartir comme ça, de questions savonneuse, alors que nul ne prenait soins de mon linge, je n'en portais pas. Que peu m'ont vu croûter avec mon frangin et mon petit grand homme des tartines de mayonnaise, avec des cornichons pour les extrémisss, cultés devant la téloche à pas d'heures. Que percher, pétain ! percher ... partout, à peu près, partout et même parfois pas longtemps mais assez pour y retourner. Si ça éxiste encore. J'aime bien. Je ne faisais rien mais ça en a chagrinné plus d'un. Mais tu devrais ... Mais pourquoi non ?

J'suis un état, je me disais. chaque matin je prenais le graphique au pied du plume et j'inscrivais : stationnaire. J'avais pas l'air de me porter plus mal. On m'approchait parfois comme on tend la main au veuf pour la lui serrer mais pas trop fort, pour pas qu'il dégringole en mil morceaux de verre sécurit (TM). Je piquais des rages à huis-clos et persiennes à l'espagnolette et des artificières sont passées et du Génie je vous prie ! A chacune d'entre elles en particulier, sa lueur à ma fenêtre.

Ça faisait belle que je ne faisais rien. J'étais bien au monde.

- Alors quoi ? Tu fais quoi de beau en ce moment ?

- L'amour.

Précision : Pour ce qui est de la baveuse, elle jâcte en vers libres, ni reprise, ni échangée.


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