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un «réveillon des luttes»

Publié le 03 janvier 2009 par Ohlebeaujour

un «réveillon des luttes»
article "lu et approuvé" dans 20minutes.fr

CONSOMMATION - Mercredi dernier, une cinquantaine de personnes sont parties sans payer avec leurs caddies remplis du magasin de la rue du Faubourg-Saint-Antoine à Paris...

Une scène surréaliste. Mercredi après-midi, quelques heures avant les bombances du réveillon, au Monoprix de la rue du Faubourg-Saint-Antoine à Paris. Une cinquantaine de précaires, de chômeurs et d’intermittents du spectacle «réquisitionnent» une dizaine de chariots, après les avoir remplis de fois gras, de saumon, mais pas seulement: pâtes, patates, huile sont aussi raflés. Ils bloquent ensuite les caisses du supermarché et exigent que le directeur les laisse sortir sans appeler la police.
«C'est une autoréquisition qui est juste en ces temps de crise et qui permet aux précaires de fêter aussi le Nouvel An dignement», explique un membre du collectif au «Parisien». Ces militants aux faux airs de Robin des bois ont pu finalement sortir du magasin sans être interpellés. Les victuailles ont été redistribuées à la Bourse du travail, occupée par des sans-papiers, au gymnase Merry, où sont installés des mal-logés, et lors d'un «réveillon des luttes» dans le 19e arrondissement de Paris.
La troisième action de ce type depuis deux semaines
Plus précisément, on peut appeler cette pratique une «autoréduction», très répandue en Italie dans les années 70. Elle prenait parfois la forme de mouvements de masse où les abonnés à l'électricité refusaient de payer leur facture, pour obtenir des ristournes équivalentes à celle de l'industrie.
C’est la troisième action de ce type en France depuis deux semaines. Le samedi 20 décembre, une première «autoréduction» a été menée aux Galeries Lafayette de Rennes, puis le samedi suivant au Monoprix de Grenoble.
Monoprix parle de «pillage»
Cette initiative n’est évidemment pas du goût de Monoprix. «C'est un pillage inacceptable et regrettable », a expliqué le groupe, qui a réuni une cellule de crise ce vendredi matin et a décidé de donner des suites judiciaires à cette affaire.
«Le 31 décembre est une journée très importante pour une enseigne comme la nôtre, précise Monoprix. Le directeur du magasin et les salariés ont fait en sorte que cet incident soit le plus court possible et qu'il ne dégénère pas. Les discussions étaient difficiles et très tendues et ils ont été obligés de céder».
Plainte contre credo anticapitaliste
Le son de cloche est évidemment différent chez les militants. «Treize chariots pleins sont sortis du magasin après des négociations tendues avec une direction qui a logiquement choisi de ne pas prolonger le blocage des caisses (perte de chiffre d’affaires) ou prendre le risque d’une intervention policière dans les rayons», explique le collectif dans un communiqué.
«La crise montre la débilité d'un système où certains misent la vie des autres au casino, souligne ainsi un tract distribué au Monoprix. Pour fêter le Nouvel an, nous serions censés dépenser des miettes de salaire ou une maigre prime de Noël dans les supermarchés. Ce soir nous ne jouerons pas cette fable. Nous ne paierons pas».
Monoprix a porté plainte contre X pour «vol avec violences et insultes», avec constitution de partie civile. Les pertes subies par le magasin sont en train d'être estimées.
La question du vol en «état de nécessité»
Que risquent nos Robins de bois des temps modernes devant la justice civile, qui a remplacé la justice divine et le martinet du shérif de Sherwood? Est-ce du vol?
Un précédent fameux revient en mémoire. Le 21 décembre 2000, Agnès B., RMIste de 25 ans, a décidé de voler des jouets et des provisions dans une grande surface pour faire passer un «vrai Noël» à ces sept enfants. Elle dérobe pour 609,8 euros, avant d’être surprise par les agents de sécurité. Quelques mois plus tard, en avril 2001, elle comparaît, sans assistance, devant le tribunal correctionnel. Reconnue coupable, elle est néanmoins dispensée de peine, en reconnaissance d' «un état de nécessité».
Le parquet fait appel, pour éviter que «s'instaure une jurisprudence fondée sur l'état de nécessité, que cela permette à des personnes de commettre librement, avec en quelque sorte la bénédiction de la justice, des vols dans les grandes surfaces». En appel, Agnès B. a finalement écopé de six mois de prison avec sursis. Une peine symbolique. M.Gr.

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