Magazine Journal intime

Mon Cinéma Paradiso

Publié le 11 août 2007 par Mirabelle
Mon cher Victor,
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Hier, pour essayer d'oublier mon échec cuisant, je suis allée au cinéma. Quel film ? "Ratatouille". Un film sur la cuisine ? Un film d'animation. Un rat qui veut devenir cuisinier et finit par le devenir dans plus grand restaurant de la capitale française, après maintes et maintes mésaventures. Ce n'est pas pour les enfants, ça, les films d'animation ? Mais non ! C'est pour toutes les générations, pourvu que celles-ci en soient conscientes ! Si tu le dis... C'était bien ? Oui, très bien. Et... ? A vrai dire, je ne voulais pas te parler de ce film, Victor. Ah. Et de quoi donc ?
Du cinéma. Tu sais à quoi ressemble un cinéma d'aujourd'hui, Victor ? Euh... C'est une sorte de supermarché. Enfin, c'est un grand mot mais m'est avis que cela ressemblera de plus en plus aux cinémas britanniques, qui m'avaient bien désarçonnée. Nous n'en sommes pas encore au point de payer nos places en même temps que de commander un burger et un coca, mais un jour... Bref. Le cinéma d'aujourd'hui, dans notre bonne vieille France, c'est beaucoup de publicités et de moins en moins de bandes annonces, comme je le déplorais ici. Et puis surtout, ça devient si cher, si cher, que ça finit par me faire rire jaune. Hein ?! Ben oui. C'est bien la peine, après, que les politiques nous servent leurs grands discours égalitaires sur la nécessité de faire de la culture une richesse accessible à tous. Bref... Oui : bref ! Laissons de côté tes opinions politiques, Mirabelle...
A chaque fois que je foule le sol d'une salle de cinéma, j'ai une pensée pour la petite fille que j'étais. Allez, embarque-nous dans tes souvenirs... Les souvenirs ont cela de charmant qu'ils peuvent être, parfois, embellis par le flou. Ou par l'idéalisation... Oui. Toujours est-il que j'ai besoin, pour apprécier totalement une séance, de retrouver mes sensations d'autrefois, celle de la petite fille que sa maman emmenait voir le dernier Walt Disney. Celle qui trouvait tout tellement grand et tellement mystérieux, celle qui attendait avec impatience de voir l'ouvreuse passer dans les rangs du cinéma, avec son panier rempli de glaces et autres délices sucrés et chocolatés. Ta maman t'en offrait ? Non. Ou alors très rarement. Je crois d'ailleurs que cette frustration, ce désir, sont pour beaucoup dans mon émerveillement de l'époque. Oui, comme les interdits qui nous font briller les yeux... Voilà, oui. Je regardais les enfants léchant leurs glaces avec une pointe de jalousie, tandis que j'entendais le doux tintement des pièces de monnaie tendues à l'ouvreuse. Il y avait les lumières feutrées qui descendaient sur son uniforme, et le claquement de ses talons sur les marches.
Les murmures dans la salle. Tous ces gamins trépignant d'impatience, comme moi. J'avais sous mes fesses mon manteau roulé en boule, réhausseur forcé pour parvenir à voir l'écran. Je scrutais les lumières : quand allaient-elles s'éteindre ? Une habitude que je n'ai pas perdue... Et puis soudain, un chuchotement dans la salle. Ca y est... Elles s'éteignent ! C'est les cartoons. Les cartoons ? Oui. C'était bien un truc de mon enfance, ça... Avant les films d'animation, passaient des dessins animés très courts, du genre de ceux que je regardais à la télévision, de bon matin, le mercredi ou le week-end. Ah, les cartoons... J'en ai un souvenir impérissable... J'entends encore la musique dans mon esprit...
Après les cartoons venait le film. J'ai un souvenir particulier de "Rox et Roucky", ainsi que d'"Oliver et Compagnie". C'est sans compter "Fievel au Far-West", qui m'a carrément foutu les boules (normal, Fievel  était tout de même en fort mauvaise posture, sur un pont en flammes, au dessus d'un immense bûcher !) et du coup, ma maman et moi avions été obligées de quitter la salle. Nous avons ensuite été prendre une crêpe, dans un établissement de ma petite ville. Toujours le même. Nous prenions la même petite table, dans un coin, à l'étage. Toujours le même rituel, après chaque séance de cinéma. Je prenais une crêpe au chocolat, ma maman une crêpe au miel. Quand ma petite soeur fut en âge d'apprécier les histoires sur grand écran, elle nous accompagna. Et puis nous avons grandi... Et perdu ce rituel.
Alors j'ai toujours une pensée pour cette petite fille quand je foule le sol d'une salle de cinéma. J'attends toujours que l'ouvreuse apparaisse avec ses merveilles sucrées par la porte battante. J'attends le dessin animé. Un dessin animé qui ne vient jamais, évidemment... Heureusement, même si je désespère qu'il y ait autant de publicités et si peu de bandes-annonces, même si je trouve que la place de cinéma est de plus en plus chère, j'ai toujours un soupir de contentement quand les lumières s'éteignent. Là, la magie peut commencer. Et ça, ça n'a pas prix.

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