Magazine Journal intime

J'aurais dû mettre des bonnes chaussettes

Publié le 06 février 2009 par Francisbf

Mes amis

Ma vie n'est que souffrances et chaque pas en avant m'est un martyre insupportable.

Ne voyez pas dans ces mots une métaphore psychologique à deux balles, mais bien l'énoncé d'un simple fait : putain, je morfle comme un chacal.

Tout avait pourtant commencé normalement : hier soir, vers vingt heures trente, ma cousine et moi nous engueulons (je ne sais pas si les torts sont partagés, mettons que les raisons le sont), du coup je fais comme à mon habitude : je me barre pour ruminer les répliques cinglantes que j'aurais dû lui sortir, ou que je lui sortirai en rentrant.

Je prends donc mes cliques, mes claques, mon manteau et mon walkman avec D12 dedans (merci Donio), et en route mauvaise troupe. En plus, que je me dis, ça me fera mon sport du trimestre.

Et putain que ça l'a fait sa mère.

Parce que bon, je pars, comme ça, la fleur au fusil et le nez au vent, je marche le long de la N20, j'arrive à Porte d'Orléans (trajet cumulé : 2,71 km), je me dis que bon, ben je peux bien continuer vers la Tour Eiffel, en remontant l'avenue du Maine jusqu'à la tour Montparnasse (trajet cumulé : 5 km), puis en prenant l'avenue Vaugirard, le boulevard Garibaldi, le boulevard de Grenelle jusqu'à la Seine, puis le quai Branly.

Bah ouais, il fait beau, pas froid, le temps est clair, je ressasse gentiment en écoutant Eminem, je marche à un bon rythme, pas de raison de m'arrêter, hein, donc je continue. Je me perds un peu vers Grenelle, je retrouve la Tour Eiffel, flambeau de la fierté nationale brillant de mille feux, blabla (trajet cumulé : 8,77 km).

Du coup, comme il est pas tard (vingt-deux heures dix-sept à mon téléphone portable), je décide d'appeler un copain qui répond pas, du coup j'en appelle un autre que je suis pas allé à son mariage mais qui est dans le bus et qui répond quand même, même si je l'avais pas appelé depuis avant son mariage ni à son mariage.

On papote on papote, pendant que je longe la Seine vers Notre Dame par des espèces de parcs un peu boueux, on ragote sur les connaissances communes qui

-sont restées dans leur branche

-donnent pas de leurs nouvelles (comme Alainpimpin dont j'avais pas d'échos depuis trois ans et qui a surgi sur mon blog le soir même, c'est fou)

-continuent leur thèse

-sont entrées au séminaire (putain de dieu !)

Puis il voit sa maman, je les laisse et je me dis que puisque je suis à Saint Michel (trajet cumulé : 13,1 km) je peux bien continuer jusqu'à Porte d'Orléans, c'est tout droit.

Puis en plus, avec un peu de chance, le bon air parisien va me racornir le gros bouton qui a décidé d'élire domicile sur mon visage. Enfin, j'espère que c'est un gros bouton, parce que là j'ai plus l'impression que c'est un deuxième nez qui essaye de pousser à côté du premier.

Bref, donc, je marche. Boulevard Saint-Michel, rue de l'Observatoire, avenue Denfert-Rochereau, avenue du Général Leclerc, hop, de retour à Porte d'Orléans (trajet cumulé : 16,86 km). Bon, ben une fois là ce serait bête de s'arrêter prendre le bus, il est que 23 heures et un gros paquet de brouettes. Hop, on traverse le périph', N20.

Jusqu'ici, tout va bien. Puis, une fois dépassée la Vache Noire, à dix minutes de chez moi, aïe. Mon pied gauche a décidé de m'emmerder, sans prévenir. Ca tire fort derrière les tendons. Je serre les dents, et j'avance, le regard fixé devant moi, émettant par moment un vaillant « Aïeuh ! » ou « Pute ! ». Mon pied gauche commence à faire coucou aussi. Vaille que vaille, j'avance.

Bon. J'arrive chez moi (trajet cumulé : 19,38 km), j'enlève mes godasses, je bouffe un peu, je me pose sur mon lit, et, retenant ma respiration (plus pour l'odeur que le suspense), j'ôte mes fines chaussettes en fil d'Ecosse, m'attendant à voir surgir une masse de chairs meurtries et noirâtres, avec quelques reflets verts gangréneux.

Que dalle.

Mes pieds sont roses, sains et odorants. Mais douloureux. Un coup sous l'eau froide, et au dodo.

Et ce matin, fier de ma résolution, je mets des bonnes chaussettes de tennis et vais à la fac, d'une démarche encore plus canardesque que d'habitude vu que j'ai mal dès que je pose un pied par terre. J Me mordant mes lèvres purpurines à chaque pas, je fixe sur mes traits une grimace de douleur crispée (ou de dépressif constipé, sans miroir je suis pas sûr), dans le but inavoué de d'attirer l'attention d'une fraîche jeune fille aux yeux pétillants et aux longs cheveux claquant dans le vent, qui viendrait avec sollicitude et de l'inquiétude dans ses yeux pétillants s'enquérir de si elle pourrait faire quelque chose pour moi.

Encore, que dalle.

Toutes des putes, les fraîches jeunes filles aux yeux pétillants (et en plus, y'avait pas de vent).

Bref. Je suis donc allé à la fac au prix d'atroces douleurs dans mes pieds mutilés, pour ne pas rencontrer de jeune et fraîche pute aux yeux pétillants et aux longs cheveux claquant dans l'absence de vent, tout ça pour apprendre qu'il y avait pas cours à cause de la grève.

On m'y reprendra pas, à faire du sport.

Au moins, j'ai la confirmation que le gangsta rap aide à marcher.



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LES COMMENTAIRES (1)

Par Tvert
posté le 24 mars à 17:03
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salut ben ça bien plu cette balade dans Paris Et franchement, le passage ou tu retires tes chaussettes, j'ai adoré, aurait aimé les sentir merci à toi