Magazine Nouvelles

Le soleil pâle de février

Publié le 10 février 2009 par Unepageparjour

Début de Kira B. Wassa

Kira

Le soleil pâle de février s’amuse déjà à jouer avec les voiles des fenêtres. Les ronds de lumière jaune, posés au hasard sur les murs et le plafond, me sortent peu à peu de mes rêves. Comme un chat, je m’étire, je tends mes poings vers le ciel, je secoue mes cheveux, amassés en mèches folles devant les yeux. Je m’assoie. Seule. B. n’est plus là, semble-t-il. Je lance quelques « hello ». Seuls, les échos me répondent.

La nuit me revient. La soirée, pleine de musique. Les danses sereines. Puis le plaisir manqué. Debout, devant les miroirs de l’armoire, je regarde mon corps mince et fluide, et je prends quelques poses, celles que Wladimir préférait. Je téléphonerai bien à Oksana, pour lui raconter, ou seulement l’écouter, entendre sa voix, son ukrainien chantant.

L’eau de la douche coule sans fin, sur ma peau trop lisse. Les aspérités du sable des berges me manquent, ce matin. Habillée, fardée, souriante, je sors sur la belle avenue dans laquelle B. possède son appartement. Pas de petit mot sur la table. Je m’étonne. Je ne l’ai pas entendu sortir. Je l’appelle sur son portable. Pas de réponse. Occupé, sans doute ! Je ne sais même pas dans quel domaine il travaille. Les affaires, m’a-t-il confié dans l’avion.

Je m’arrête dans une brasserie tiède, aux senteurs enivrantes de croissant chaud et de lait chocolaté. La banquette est moelleuse, douce. Dans des tableaux anciens, de jolies femmes dénudées, entourées de paysages lumineux, discutent, un sourire éternel dans le coin de leur regard. Elles m’invitent à leur fête champêtre, au mépris des autres clients, qui restent pendus au téléphone, notent sans fin de fines pattes de mouche dans leur carnet, ou tournent lentement les pages de leurs journaux.

Mes pas aléatoires m’entraînent au jardin du Luxembourg, un si vieux rêve ! Des enfants jouent, déjà, près des balançoires. Les vacances, sans doute. Une petite fille tombe, devant moi. Je la relève, époussette son nez crotté de boue, en attendant que sa maman, toute essoufflée, parvienne à notre niveau. Nous parlons un peu, comme deux vieilles copines, assises côte à côte sur un banc, en se promettant de se revoir. Elle attend un deuxième enfant. Je pose ma main sur son ventre fécond.

Mon tour viendra bientôt, lui dis-je. Peut-être que nos enfants seront amis ?

Je me sens presque heureuse.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Unepageparjour Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog

Magazines