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Une inspiration soudaine

Publié le 13 mars 2009 par Unepageparjour

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Une inspiration soudaine me vient à l’esprit. Insensée. Poussée par la pensée de tous nos morts, peut-être, par l’idée que cette vie ne porte pas de sens, qu’une fois sur la pierre plate, nos corps inertes éparpillés par les vautours et les chacals, disparaissent, et que notre existence s’efface, comme chaque rayon de soleil efface la trace de la pluie sur le sol. Qui se rappelle encore de la mère de notre mère ? Et qui s’en rappellera, une fois notre vieille mère disparue à son tour ?

Je me suis dressée sur mon séant. Tout est calme. Cette idée me taraude. Me mine. Mais je dois le faire. Les peintures, d’abord. Heureusement, j’ai conservé près de moi les os remplis de poudre d’argile. Doucement, à tâtons, j’en enduis la main droite de Klo, m’aidant de ma salive pour que la poussière d’ocre s’accroche partout, dans le creux de la paume, sur les petites bosses à la base des doigts, dans les rides de chaque phalange. Le travail est long, et demande une minutie infinie, surtout que le gris du petit jour, qui vient de succéder au noir de la nuit, n’est pas suffisant pour m’aider à contrôler exactement ma progression.

Mais le plus dur reste à venir. Porter Klo jusqu’au fond de la grotte. Vivante, elle ne pesait rien, une plume, fine, légère, svelte, évanescente. Morte, son corps me pèse. Je souffle, pour la soulever, la tenir suffisamment droite pour pouvoir me glisser sous son bras gauche, et l’emmener ainsi, jusqu’à la grotte, en maintenant fermement contre moi sa poitrine glacée, de peur qu’elle ne retombe et ne m’entraîne dans sa chute. Cahin-caha, nous cheminons, bras dessus, bras dessous.

Un homme se réveille, le regard vide, le doigt pointé vers nous. Sans voix. Il s’écroule, mal dessaoulé, sur sa compagne d’une nuit.

La grotte est vide, en ce petit matin de printemps. Nous nous traînons jusqu’au mur peint. Puis, le cœur battant, consciente que je donne à Klo la clé de l’éternité, je prend sa main gauche, enduite de couleur, et je la plaque avec force contre la paroi, en prenant garde que toute les partie de sa main soit bien en contact avec la roche.

Puis, je la recouche avec douceur.

Sa main est là, bien visible, lumineuse, magnifique, non loin des taureaux, des gazelles et des lionnes.

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