Magazine Journal intime

Le supplice de Tante Hall

Publié le 07 avril 2009 par Willb77

Tante Hall est une vieille dame, tout ce qu’il y a de plus détestable.

Elle ne peut s’empêcher de martyriser quiconque a le malheur de croiser sa route.

De croc-en-jambe en croquemitaine, elles déballent toutes les astuces du monde pour arracher une grimace de dégoût ou un cri de douleur. C’est son plaisir, sa raison de vivre. Une sorte de vice étrange et gratuit qui possède son corps et son âme. Ou l’inverse.

Un dimanche matin, le jeune(1) John Doe courrait à toute jambe dans les ruelles détrempées du vieux village. Ce dernier se résumant à un puits rempli d’une eau saumâtre où grouillaient des moustiques verdâtres d’une variété méconnue du reste de la terre. Les bestioles suçaient en effet le sang de leurs victimes par l’abdomen et pratiquait toute autre chose par l’extrémité opposée qui d’usage sert à se sustenter… bref, surplombant ce puits nauséabond, trouvait-on le bar du vieux village, le « castor mouillé » où Tante Hall avait établi ses quartiers pour la matinée. Que faisait-elle ainsi voûtée sur sa chaise de camping à trois pattes ? he bien, elle scrutait.

Le supplice de Tante Hall

Minutieusement, très minutieusement. Ses sens se mirent en éveil en percevant le clapotement rythmé des pas du petit bonhomme dont la mère venait d’un lointain pays.

Et là, alors que ses pupilles accommodaient, percevant les détails de la silhouette ahanante, un sourire carnassier s’invita sur la face parcheminée de la vieille cinglée. Pourquoi souriait-elle me direz-vous ? je répondrais que vous n’avez pas suivi ou que vous êtes un( e) éternel(le) optimiste par rapport à la bonté humaine. Rien que pour ce défaut, vous mériteriez mon mépris mais, je l’avoue, je préfère mille fois poursuivre mon récit. Vous prendrez alors conscience, pauvre utopiste.

Tante Hall interpella John qu’elle prononçait Jaune d’ailleurs.

« Jaune, mon enfant, voudrais-tu tenir compagnie à tante Hall pour quelques instants ? ».

L’ébouriffé que la nature n’avait malheureusement doté que d’une mémoire de scolopendre, accepta l’invitation sans rechigner. Il est vrai qu’en ces temps, John ne songeait qu’à des glaces colorées et des bonbons,heu… sucrés. Dommage, car sa môman l’avait mis en garde contre le caractère urticant et néfaste de l’antique tante Hall qui n’avait pas besoin d’un cocon pour grandir et dévorer quiconque ayant l’imprudence de s’approcher. Cet élan métaphorique emplit de fierté et d’orgueil maman Doe tant et si bien qu’elle ne remarqua pas l’air hébété de son fils qui ne comprit qu’une seule syllabe de la phrase : con. Il se vexa d’ailleurs presque.

Donc, voilà notre John aux prises avec le mal personnifié.
Tante Hall commença par commander une double liqueur de Gingembre et de la glace pour son invité qui ne pipait pas mot, intimidé par cette situation inhabituelle. Il saliva d’avance en voyant s’approcher la coupe contenant deux boules glacées au chocolat et à la banane mûre.

La vieille bique se saisit prestement de la coupe et cracha un répugnant glaviot devant la mine ahuri et dégoûtée de John.

« la gourmandise est un vilain défaut sale garnement » et elle partit d’un rire sardonique. John retenait à peine des larmes amères et s’apprêta à détaler.

Tante Hall le stoppa net dans son élan d’une injonction assassine.

« Si tu bouges, je raconte à tout le village que tu m’as dérobé de l’argent après m’avoir rué de coups ».

Chers lecteurs, la suite de l’histoire est bien trop horrible pour que je vous la raconte. Sachez simplement que la glace ainsi souillée fut consommée et que c’est un moindre mal si on considère ce qu’a vécu John durant cette terrifiante journée. A noter qu’il est aussi question des moustiques mutants.

(1) le jeune Doe bien qu’affublé de sandales avec chaussette et d’un petit baigneur avait tout de même l’âge de 18 ans et 2 jours.


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