Magazine Humeur

Autisme et archaïsme

Publié le 23 mai 2009 par Trinity

Je souhaitais vous partager ce texte d'un père qui nous parle de son fils Nathan atteint d'autisme et plus particulièrement des dérives comportementalistes représentées par les associations de parents d'autisme.

Parents d'autistes comme ils aiment à s'identifier, ces hommes et ses femmes n'ont pas des enfants, ils ont Un Autiste ! Quels sont leurs bénéfices secondaires ?

Ces êtres dictatoriaux sont prêts à tout pour imposer leur formatage et pour refuser à leurs enfants d'exister !

Bonne lecture,

Vous trouverez cet article dans son contexte  : Le bloc-note du désordre


Vendredi 15 mai

Autisme et archaïsme


Cela faisait quelques temps que je n’avais pas râlé sur le sujet. C’était d’ailleurs une indication excellente sur le fait que les choses dans le domaine allaient mieux. Cela faisait donc longtemps que je n’avais pas râlé à propos d’autisme et plus précisément sur le défaut de prise en charge des soins d’une part ou encore à propos de la propagande des comportementalistes. Donc une chose après l’autre.

Cette année à l’école Decroly, ils nous auront rendu un fier service, non seulement en intégrant avec grâce notre petit Nathan, dans toute la turbulence que cela peut susciter, mais aussi en ne nous imposant pas de devoir recruter à nos frais une A.V.S. supplémentaire. L’année dernière nous étions contraints à cette solution dans l’école de quartier qui en faisait une condition sine qua non pour accepter Nathan en classe. Je pense que je n’aurais jamais de mots assez durs pour tous ces directeurs d’établissement et ses instituteurs qui, pour des raisons de confort, sont capables de faire d’un tel recrutement, très coûteux pour les parents, un pré requis à une scolarité pourtant dûe de par loi.  (...)

Pendant ce temps-là, dans le petit monde de l’autisme, une querelle fait rage qui oppose des associations de parents d’autistes*, et l’une d’elles en particulier toujours très bruyante et péremptoire dans ses jugements, à une pratique thérapeutique, appelée packing, opposition qui se suffirait à elle-même, mais qui prend un tour plus personnel avec des attaques ad hominem en règle, dont la cible privilégiée n’est autre que le docteur Delion à Lille

Décortiquons un peu.

Le packing est une pratique thérapeutique qui consiste à envelopper entièrement la personne autiste nue (en sous vêtement ndlr) dans des linges mouillés à l’eau froide puis à l’envelopper par dessus ces linges mouillés d’une couverture chaude. Le passage thermique du froid vers le chaud crée une détente musculaire dans tout le corps de la personne ainsi enveloppée, laquelle produit notamment un sentiment de bien-être accalmant qui permet aux soignants d’entrer dans un contact élargi avec la personne autiste. Par ailleurs cette technique permet également une meilleure prise de conscience, chez la personne autiste, des limites physiques de son corps, notion infiniment problématique chez l’autiste — à ce sujet, je me souviens parfaitement que Nathan a découvert avec lenteur qu’il avait un dos et même des fesses, parties de son corps qui étaient inconnues de lui, je me souviens comment souvent dans le bain, je lui dessinais avec le doigt des formes géométriques simples dans le dos en lui demandant de les reconnaître, exercice que je ne pouvais jamais conduire très longtemps parce que Nathan n’aimait pas cela, il n’aimait pas cette frontière inconnue de lui. Mais petit à petit...

Depuis que nous glanons des informations sur internet à propos de l’autisme, il est arrivé plus d’une fois que nous soyons pris à partie par tout un milieu associatif de parents d’enfants autistes qui crient à la torture à propos de cette pratique thérapeutique, et jusqu’à présent nous nous étions bien gardés de prendre parti, encore que je percevais tout de même dans cette méthode pratiquée avec soin, une attention justement à ne faire aucune violence aux enfants autistes et que même si la sensation de froid humide est réelle, elle ne dure pas ni n’est, à mon sens, une torture. Ce que j’ai pu lire de cette pratique au contraire me paraissait assez sensé notamment dans cette idée assez ingénieuse, me semble-t-il, de donner à l’enfant autiste de ressentir les limites exactes de son corps, ce qui autrement est très problématique. D’ailleurs il ne fait aucun doute dans mon esprit que si une telle thérapie nous avait été proposée pour Nathan nous l’aurions jugée judicieuse.

Mais voilà, il se trouve que dans le milieu de l’autisme, il y a des gens qui ont vu Dieu. Ou plus exactement des personnes, que je plains de tout cœur, à qui on a fait croire que certaines apparitions étaient divines. Je vais parler une fois de plus de mes amis les intégristes comportementalistes — je précise, à toutes fins utiles, qu’étant donné le tombereau d’insultes reçues la dernière fois que j’abordais le sujet, cette fois-ci je ne répondrai pas, à personne, c’est comme ça, je me fous globalement de ce que ces gens pensent, et que si d’aventure mon ami L.L. de Mars me fait l’amitié d’un de ses dessins caustiques sur le sujet, pareil, je le publierai — L. ce n’est pas un appel du pied, mais je sais que la psychologie pour clebs vous inspire habituellement — et je me moquerai éperdument des menaces de dépots de plaintes, je dis ce que je veux. Pour ceux qui prennent le feuilleton en cours, il existe une branche de la psychologie pour chiens, dignes héritiers de Pavlov, qui après avoir disparu du temps du cauchemar de la fin des années 70, a resurgi au début des années 2000 — ça ne devait pas sentir la rose quand c’est ressorti — parce qu’elle a trouvé un terrain d’application tout à fait étonnant, les autistes. Pour faire court, synthétique et nécessairement caricatural, on ne se refait pas, les comportementalistes appellent psychologie cognitive cette activité remarquable qui est la leur et qui consiste à s’attaquer aux symptômes de personnes souffrant de troubles du comportement en utilisant des méthodes de dressage que ne renieraient pas les dresseurs canins, ce qui a pour vertu de gommer le caractère socialement embarrassant de la souffrance du patient. Ainsi le comportementaliste parle de guérison quand une personne atteinte de troubles compulsifs (comme de se laver les mains cinquante par jour) est enfin coupée de ce comportement dans lequel elle trouvait un refuge d’angoisses très incapacitantes, la personne, certes ne se lave plus les mains cinquante fois par jour, mais son angoisse est telle qu’elle préférera désormais étrangler des petites filles à la sortie de l’école, mais elle ne se lavera plus les mains cinquante fois par jour, ce que le comportementalisme considère comme une victoire. Appliquées à des enfants autistes, cette thérapie, dite d’A.B.A., produit des résultats remarquables, l’enfant n’aura plus tous ces comportements étranges, propres à l’autisme, et qui dérangent surtout les neurotypiques, et aura désormais un comportement socialement plus acceptable, qu’importe que ce nouveau comportement soit en fait l’imitation non raisonnée et plaquée de ce qui est convenable et normatif et que, dorénavant, ce qui continue d’angoisser l’enfant autiste n’est plus le bruit de la plomberie dans l’immeuble, ou quelque suite numérique connue de lui seule, mais au contraire la recherche permanente de compliments (caresses à un bon chien obéissant) obtenues par l’obéissance ritualisée d’une certaine façon de se tenir.

Et qu’importe aussi, autre détail, que de telles corrections soient souvent obtenues dans une lutte obstinée entre l’enfant autiste et son éducateur et les psychologues pour chiens. Parce que finalement je crois que c’est cela qui motive ma colère aujourd’hui, moins finalement les attaques ad hominem contre le Docteur Delion, encore que je les réprouve absolument, mais d’appeler le packing une torture, renversement du sens qui, venant de personnes qui ne reculent devant aucune violence, contenue certes, mais j’appelle violence malgré tout de contenir physiquement un enfant en crise et apeuré et de le contraindre à un comportement acceptable pour que cette contenance cesse, venant de tels thérapeutes ces accusations sont insolites. J’ai assisté à de nombreuses séances d’éducation selon cette méthode, A.B.A., et je les ai toujours trouvées insoutenables, la crise que traverse l’enfant qui se débat est très violente, il est manifestement en état de souffrance et la crise peut s’étendre dans le temps au delà de l’heure.

On aura compris que je préfère, et de loin, que l’on inflige une sensation très passagère, quelques minutes, de froid suivie par une sensation au contraire très apaisante, à la résorption d’une crise de nerfs — je vous assure qu’une crise de nerfs d’un enfant autiste qui dure plus de dix minutes est insupportable pour les nerfs de n’importe quel maître zen ou yogi, alors imaginez une heure ou plus pour les nerfs d’un Occidental pas du tout entraîné — selon les méthodes coercitives et violentes quoi qu’on dise — je pense à Jean-Luc Godard quand il explique que l’on parle plus souvent de la violence des crues et presque jamais de celle des berges qui contiennent toute l’année les rivières et leurs crues — surtout que le plus souvent lors d’une telle séance la confrontation contrariante pour l’enfant autiste a été provoquée par l’éducateur. Mais c’est moi sans doute, pour établir de telles hiérarchies.

Ce que je sais aussi, après six ans auprès d’un enfant autiste, tous les jours, et la fréquentation d’autres enfants autistes, du milieu de l’autisme, de ses thérapeutes et de ses éducateurs, que la meilleure façon d’évaluer la compétence d’une personne qui travaille avec de tels enfants, est sans doute d’apprécier son degré de modestie devant ce qu’il affronte. Donnez-moi un spécialiste qui commencera par vous expliquer que les connaissances actuelles à propos de l’autisme sont très médiocres et balbutiantes et qu’il ou elle dans le domaine s’oriente au mieux dans un parcours si mal fléché, plutôt que tous ces prophètes auto-proclamés qui auront même le comique de vous donner des pourcentages (avec décimales, dans un pourcentage ce sont toujours les décimales qui comptent) de guérison grâce à leur sacro-sainte méthode A.B.A., ce faisant j’ai toujours le sentiment que leurs efforts de persuasion leur sont surtout auto-destinés.

Or je remarque que les quelques entretiens que j’ai pu lire ou écouter du docteur Delion m’ont toujours fait entendre un homme remarquablement modeste et très conscient de ses limites (quand bien même il jouit d’une très grande réputation dans le milieu de l’autisme), quand au contraire ses adversaires sont tellement bruyants et fatigants.

Tout à l’heure je faisais un peu le fanfaron, je parlais de la polémique déclenchée par mon dernier article sur le sujet, c’est vrai que j’en ai reçu des mails pas très amènes, aucun d’ailleurs qui ait eu la force de me blesser mais beaucoup qui m’ont attristé parce que derrière l’agression je lisais ce que je connais déjà, la terrible souffrance de devoir élever un, ou plusieurs — plusieurs, je ne peux même pas imaginer, bien que ce ne soit pas rare du tout, au contraire —, enfants autistes et la nécessité de devoir se raccrocher à quelque chose. Or c’est cela que je reproche le plus aux comportementalistes, de donner des bouées qui se dégonflent lentement à des naufragés. Et de beaucoup mentir sur la qualité de ces bouées.

Quant au docteur Delion, je voudrais lui dire de tenir bon dans cette lutte inélégante dans laquelle il a été attiré et s’il cherche des adultes consentants pour être emballés dans des linges froids et par dessus ceux-ci une couverture chaude, je suis volontaire (prévoir des linges de grande taille tout de même), en fait j’adorerais essayer une telle thérapie. Par curiosité.

* en particulier "Lea pour samy"


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Trinity 33 partages Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine