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Amours Balzaciens

Publié le 19 juin 2009 par Didier T.
Amours Balzaciens
Amours Balzaciens
Amours Balzaciens
 
 
 
 
 
  Cette fois, c’est à Ancenis, au lycée Joubert, que je posais mon sac.
C’était un lycée mixte, plus petit que le précédent, construit dans la ville haute du bourg qui s‘étend au bord d’une Loire alanguie. Ce grand bâtiment, qui sentait la 3ème République, accueillait des classes au rez -de-chaussée et au premier étage, au second était situé le dortoir des garçons et juste en face, de l’autre côté de la cour, dans un autre bâtiment, sur deux étages le dortoir des filles alignait ses fenêtres
diaphanes.
Les élèves internes de Première avaient quasiment tous un cursus équivalent au mien, ils avaient essayé un autre établissement avant d’atterrir à Ancenis et ceux issus de
la campagne environnante y étaient minoritaires.
Pouvais-je imaginer que je garderais de Joubert le souvenir d’une année bénie ?
Les professeurs y étaient enthousiastes, parfois même farfelus, celui d’espagnol n’avait-il pas, dans un élan tout ibérique, planté des banderilles dans le bureau d’élèves lui faisant face lors d’un cours enlevé sur la tauromachie ? Celui de littérature pour qui Montaigne et Molière étaient le centre de notre monde, le sien allant plutôt se réfugier parmi les auteurs grecs, n’arrivait-il pas le matin en cours, les sourcils couverts de savon à barbe ?
 
Ces fantaisies s’accompagnaient néanmoins d’une présence et d’une implication sacerdotales. Aucune pièce du répertoire classique ne leur échappait, ils y conduisaient les élèves à Angers ou à Nantes et acceptèrent même que pour la fin de l’année le lycée puisse monter un spectacle théâtral ouvert au public. La négociation fut laborieuse, pour on ne sait quelle raison, ils imposaient Giraudoux et son «Apollon de Bellac». En réponse à cet ultimatum, cette pièce étant courte, j’obtins de mettre en
scène et de jouer «La Cantatrice Chauve» de Ionesco.
Entre répétitions, construction des décors, choix des costumes, le dernier trimestre fut
cannibalisé , laissant quand même le loisir de participer au voyage de fin d’année dont
le thème fut « dans les pas de Balzac ».
Depuis déjà plusieurs mois, je m’étais découvert une vraie passion pour Jo , brunette délurée qui m’avait invité chez elle pendant un week-end alors que ses parents étaient hospitalisés à la suite d’un accident de voiture.
Cette première nuit fut ma première fois et j’en ai gardé un souvenir longtemps teinté
d’amertume.
Alors que je venais d’enfiler mon pantalon de pyjamas, avant de fermer la lumière et
rejoindre ma belle, je serrais si fortement le traditionnel lacet de tissus, qui à l’époque
fermait les pyjamas, qu’au moment fatidique il refusa de se dénouer. Plus je tirais sur ce satané lacet, plus je serrais le nœud …Rouge de honte, je m’escrimais longtemps contre le récalcitrant qui ne cédait pas d’un pouce………. De guerre lasse, j’en fus donc réduit à quémander, à ma partenaire impatiente, une paire de ciseaux.
Pour ma mère, j’imputerais la perte du lacet à une mauvaise blague de mes camarades de chambrée.
La suite fut délectable !!
Pour Jo, toutes les occasions étaient bonnes, surtout celles qui comportaient le risque d’être surpris en pleine manœuvre. Moi par contre, bien que rassasié par cet appétit toujours à l’affût, je me préoccupais surtout que ma mère ne découvrit dans mon dos et sur les fesses les multiples marques des griffes que Jo me laissait en cadeaux Myosotis, un « forget me not » particulièrement douloureux.
 
Le dimanche soir de retour au lycée, le surveillant de permanence avait pris l’habitude d’attendre les élèves en regroupant tout le monde dans la salle du réfectoire où trônait un poste de télévision. Le dessous des tables du fond, là où ils s’asseyaient, n’oseront jamais raconté les câlins que Jo prodiguait à son homme….
Cette frénésie de sexe atteignit son paroxysme lors du fameux voyage de fin d’année, durant la visite du manoir de Balzac à Saché. On laissa toute la troupe suivre le gros guide qui ressemblait à s’y méprendre à l’ancien maître des lieux. Gros, court sur pattes, les cheveux gras et la voix éraillée, il semblait faire lui-même partie du
monument à visiter, incarnant la Condition Humaine à lui tout seul.
Nous nous retrouvions bientôt seuls dans la chambre de l’auteur et, sans doute stimulés par le récit des amours balzaciens, nous jetons sur la grosse couette blanche qui gonflait le lit fort étroit du Maître…(censuré)…puis, reprenant notre souffle, rejoignions le reste du groupe qui n’en sut jamais rien.
De quoi recopier cent fois Splendeurs et misères des courtisanes . Publié par les diablotintines - Une Fille - Mika - Zal - uusulu

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