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Ich bin eine saucisse de Francfort

Publié le 16 juillet 2009 par Vinsh
Ich bin eine saucisse de Francfort
Salut les Moldus !
Alors, t'es allé voir Harry Potter 47 ou bien ? Moi, je suis masse blase, je n'aurais sûrement pas le loisir d'y aller avant facilement deux semaines, j'ai juste une vie sociale trop overbookée de l'agenda, tu comprends ?
Bon, c'est pas tout ça, mais faut qu'on cause cinéma d'auteur, ici, ça fait un peu longtemps, et c'est pas avec un Harry Potter que j'ai même pas vu que je vais te pondre du billet au kilomètre. De toute façon j'ai pas encore lu le bouquin.
Ce qui est bien, avec l'Allemagne (entre mille autres choses), c'est qu'il y a plein de films qui sortent chez eux avant la France. J'ai déjà eu l'occasion d'y voir plusieurs films avant leur sortie chez nous. Comme quoi, sortir avec un germanique, ça ne signifie pas uniquement prendre cinq kilos en un ouikène pour cause de patates/bratwurst à tous les repas chez les beaux-parents. Cela permet aussi de se faire des cinoches avec sous-titres allemands, un bonheur que tu m'envies, j'en suis certain.
Et donc, bicoz of la formidable avance culturelle dont bénéficient nos amis teutons grâce à leurs plus rapides doubleurs, j'ai pu voir ce 14 juillet le déjà polémique Brüno, de Larry Charles avec Sacha Baron Cohen.
Polémique parce que les assos gay craignent que le second degré du film ne soit pas perçu, et donne donc des arguments aux homophobes. Polémique parce qu'il va toujours plus loin dans le mauvais goût (au moins autant que Borat) et que sa réputation le précède. Polémique parce qu'il a fallu, en catastrophe, couper au montage une scène avec LaToya Jackson, grande sœur de...
En résumé, typiquement le genre de film qu'on n'est pas sûr du tout d'aimer, mais qu'on va voir quand même parce que 1) on meurt de curiosité de voir quelles horreurs visuelles vont nous être proposées, et 2) on meurt de curiosité de savoir si, effectivement, on va détester.
Alors Brüno, ça parle de quoi ? Je vais pas tout te mâchouiller, non plus, ça fait des mois que le buzz monte, avec des scènes du films qui se retrouvent sur le ouèbe et tout (en gros, comme de nombreuses scènes sont tournées comme un documentaire et constituent au final des happenings - genre aux défilés de Milan -, des images non filmées par l'équipe du film circulent) (ce qui est toujours bon pour le buzz) (ou pas) (mais là n'est pas le débat) (mais en l'occurrence, là, oui, c'était bon pour le buzz) (bref) ! Mais quand même, je recontextualise : Brüno, c'est un journaliste autrichien spécialisé dans la facheune, animateur vedette d'une émission over influente (la plus influente de langue allemande) (en dehors de l'Allemagne). Il est homosessouel, aussi, et ce n'est pas du tout un détail.
Suite à un malheureux concours de circonstances, il se fait blacklister partout dans les soirées haïpe en Autriche (le bad) et virer de son boulot. Du coup, il part aux Etats-Unis, comme Borat avant lui, non pas pour y conquérir Pamela Anderson, mais pour y devenir "la plus grande superstar autrichienne depuis Hitler" (sic).
Bon, l'intrigue est minimaliste et ne sert en définitive pas à grand'chose, si ce n'est à donner un prétexte à Sacha Baron Cohen pour aller à la rencontre de célébrités (Paula Abdul, Ron Paul, etc.) et d'anonymes américains, et leur en mettre plein la vue, dans des situations généralement assez extrêmes, d'un mauvais goût assez affligeant à la limite du gênant (pareil que Borat, quoi) (mais différent quand même).
Et c'est bien ça qui est drôle. Regarder Brüno et le conspuer pour son mauvais goût, son intrigue minable et ses provocations inutiles, c'est ne pas comprendre le sens du film.
Ich bin eine saucisse de Francfort
Car, comme le dit Maïa, dont j'ai découvert le post sur le sujet via Matoo, c'est justement dans ses provocations et ses insanités que le film nous met face, non seulement à notre humour, mais aussi à notre tolérance. Comme elle l'écrit : "Ce n’est pas lui qui va trop loin : jouer les benêts en pantalons de vinyle ne tue personne, et dans le film, on voit des individus prêts à tuer un gay."
Et c'est vrai qu'en sortant de là, avec le GG, on était assez partagés concernant ce qu'on avait ressenti au cours du film (on n'a bizarrement pas rigolé aux mêmes moments), mais on est tombés d'accord sur un point : au final, ce n'est pas mal du tout. Même si tout n'y est pas hyper drôle, et même si rien n'y est fin ni subtil (le pénis qui parle, une merveille visuelle).
Car comme dans Borat, le personnage de Brüno réussit, par sa caricature extrême et sa naïveté affichée, à faire dire aux gens certains fonds peu reluisants de leur pensée, voire à les faire se contredire au cours d'un même entretien, et ça, je sais pas pour toi, mais moi je trouve que c'est quand même assez réjouissant à voir.
Et si les tabous sexuels sont abondamment (et très visuellement) abordés, il soulève aussi des questions sur notre jolie et proprette société post-moderne et sur ses valeurs : la célébrité comme objectif de vie, l'incursion des people (avec plus ou moins de pertinence et de bon goût) dans l'humanitaire (le passage sur le Darfour est éloquent), la foi religieuse, le mariage, l'adoption, la solitude, le racisme, le communautarisme, le libertinage et sa haute tolérance en matière de mœurs... Tout cela à travers, il est vrai, beaucoup de démonstrations d'homophobie (vu le personnage central, on comprendra que ce soit le thème principal et le fil conducteur, hein). Au-delà de sa quête de célébrité, ce que ne parvient pas à faire Brüno, c'est bien se faire accepter, ses excès en tout genre (déclarations racistes, projets bidons, tentatives d'hétérosexualisation) étant surtout stigmatisés parce que leur auteur est une grande folle aux mœurs visiblement pas très WASP.
Bref, pour moi, c'est un film à voir, parce qu'il te fera nécessairement parler et que ce sera toujours bien de pouvoir l'encenser ou cracher dessus en soirée mondaine à La Baule en août. Et aussi parce que c'est un film au final aussi politique que potache (le potache me semble politique par nature, de toute façon). Et enfin parce que, toi aussi, après l'avoir vu, tu auras du mal à imaginer quelles pourront bien être les nouvelles limites du mauvais goût au cinéma (pour Sacha Baron Cohen ou en règle générale), après ça...
Ce qui représente un questionnement philosophique assez vertigineux, en somme.

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