Magazine Journal intime

Le mur de la prison d'en face

Publié le 10 septembre 2009 par Araucaria

En regardant le mur
De la prison d'en face,
J'entends tous les ragots
Et les bruits des autos,
Boulevard Arago,
Qui passent,
Sur les toits des maisons
Qui servent d'horizon,
Un bout de la tour Mont-
Parnasse.
L'hiver on voit les gens
Dans les maisons d'en face,
L'été les marronniers
Les cachent aux prisonniers
Et les bruits du quartier
S'effacent,
Quand l'école a fermé
Combien ont dû penser
Au jour de la rentrée
Des classes.
En regardant le mur,
J'imagine à sa place
Les grillages ouvragés
D'un parc abandonné
Explosant de rosiers,
D'espace,
Les grillages ouvragés
D'un parc abandonné
Où les arbres emmêlés
S'enlacent.
En regardant le mur
De la prison d'en face,
Le cœur un peu serré
D'être du bon côté,
Du côté des autos,
Je passe
Et du toit des maisons
Qui ferment l'horizon,
Un morceau de la Tour
Dépasse.

Yves Duteil

Pendant mon exil informatique (qui risque bien encore de se reproduire) je ne suis pas restée inactive, ou plutôt j'ai suivi mes bas instincts en achetant des pelotes de laines, des fils pour broderies et des livres!!! Ainsi, j'ai déniché à la librairie un récit que je souhaitais lire depuis longtemps : "Le bruit des trousseaux" de Philippe Claudel (dont je suis inconditionnelle) qui raconte toujours avec la même pudeur et la même réserve, mais non pas sans émotion, son expérience d'enseignant exerçant en prison. J'ai rapproché ce témoignage d'un autre livre : "Paroles de détenus", qui nous fait vivre la prison depuis les cellules. Et ceci m'a conduite à ce beau texte d'Yves Duteil. J'ai songé à un autre enfermement aussi, un double enfermement même. Physique, entre quatre-murs, avec bruit des trousseaux, barreaux aux fenêtres résolument hermétiques et hautes (je me souviens) hors d'atteinte des patients, et psychologique du fait d'une maladie psychiatrique... Je n'ai jamais été visiteuse de prison, mais je l'ai été dans un service de neurologie de l'höpital Saint-Antoine de Paris, il y a longtemps... Ce vétuste pavillon Antonin Clerc, où l'infirmier surchargé de trousseaux de clés, tenait sans doute bien malgré lui un rôle proche de celui de gardien de prison... J'avais dix-sept ans à l'époque, et j'ai alors compris la misère humaine et le profond désespoir. Je crois que j'aurais pu rencontrer la même chose dans une maison d'arrêt.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Araucaria 31 partages Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine