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Chroniques d’une ménagère assise.

Publié le 09 octobre 2009 par Sophielucide

C’est marrant comme la saleté a le don de se cacher pour mieux vous sauter au visage d’un seul coup. C’est toujours comme ça  Je passe du temps pourtant à côté de cette fenêtre,  happant la luminosité qu’elle voudra bien diffuser.  Cette ombre soudaine sur mes écrits venait bien d’un nuage…. de poussières. Il  a suffi  pour cela qu’une mouche vienne me narguer, comme tous les matins, que je me décide à l’éliminer, qu’elle se vautre contre la vitre avant de glisser derrière le radiateur et parachever le petit mausolée élégamment enveloppé d’une fine et duveteuse toile d’araignée.  Cette construction poétique restera intacte.

Il n’en est pas de même de cette micro tâche de sang, là sur la vitre. Elle s’offre en relief pour mieux mettre en valeurs ses congénères  à l’identique parcours.  Sur le coin gauche,  une patte de mouche a servi de support à une toile d’araignée atrophiée; un peu plus bas j’observe  une aile à la limite du détachement. Au bas de la fenêtre, une frise d’empreintes de chat dessine une jungle ombragée. Des milliards de gouttes d’eau ont formé d’étranges rigoles où s’est nichée une poussière grasse qui pourrait constituer un bon engrais pour mes plantations futures.

De deux choses l’une à ce stade avancé d’observation: soit feindre la plus parfaite indifférence et fixer ailleurs mon attention soit décider subitement de m’atteler à  la tâche.  S’étonner soi-même restera toujours la meilleure motivation.  Sous le choc de cette émotion, il s’agit de faire front. Un peu d’eau et du papier journal,  un quart d’heure de mon temps:  allez banco, j’m’y mets.

C’est un mystère tout de même de se retrouver les mains noires d’encre et de saleté face à une vitre étincelante. Comment la même matière salit et nettoie en même temps? C’est encore plus fort que la tache désincrustée au milieu du nœud d’un  torchon lavé avec Omo! Je reste là, éblouie par cette lumière arrivée par surprise au dernier passage de la boule de journal.  Sur la table s’alignent les petits tas de papier mâché, certains sont longilignes d’autres plus boudinés, ils forment une ronde de petits bonhommes et paraissent conserver leur volonté d’avoir le dernier mot.  Le papier est bavard, c’est là son moindre défaut. J’hésite, la sculpture approximative qui me vient à l’idée se heurtera comme toujours à ma gaucherie. Je rassemble une dernière fois tous ces mots mélangés, désarticulés, enfin,  avant de viser la poubelle que je découvre sale, comme le reste.
Maintenant, la lumière fait danser la poussière et j’éternue de joie.


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