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Du témoignage sur le passé à l'attestation par le présent : la logique persistante de la crise dans l'Eglise

Publié le 07 novembre 2009 par Hermas
Il n'est pas rare que nos lecteurs, à la lecture des textes que nous publions - en particulier les témoignages de Mgr Masson - nous écrivent pour nous poser cette question : est-ce possible ? Ce que vous écrivez est-il vrai ?
Ces questions sont à double niveau.
Le premier concerne le témoin lui-même.- Un témoignage, en effet, c'est d'abord un témoin. Quelqu'un narre ce qu'il a vu, ce qu'il a entendu. L'histoire toute entière est édifiée notamment sur le témoignage humain. Des contemporains d'un événement, d'un homme, d'un fait, d'une guerre, racontent l'expérience directe qu'ils en ont eue.
L'authenticité du témoignage repose sur la crédibilité du témoin. Cette crédibilité s'accroit à proportion de la proximité du témoin à l'événement rapporté, et du sérieux qui peut lui être reconnu. En l'espèce, s'agissant des témoignages de Mgr Masson, ni ce sérieux, ni cette proximité ne peuvent être niés. II suffit de relire la présentation que nous avons jadis donnée de lui pour s'en convaincre. Ils sont ainsi dignes de foi. Il le sont d'autant plus, hélas, qu'ils s'insèrent dans un vaste champ de témoignages analogues se rapportant à la même période, à propos d'autres acteurs, ou d'autres expériences. Crédibles intrinsèquement, ces témoignages sont ainsi validés extrinsèquement. Reste alors à ceux qui nient les faits rapportés à établir qu'ils n'étaient pas possibles ou qu'ils n'ont pas eu lieu.
Le second concerne les événements rapportés.- Nul plus que nous, nul plus que Mgr Masson lui-même ne souhaiterait que ces faits n'eussent jamais eu lieu. D'aucuns, d'ailleurs, s'appliquent sur ce point au déni de l'histoire, comme d'autres (ou les mêmes parfois) s'appliquent au déni des monstruosités du communisme. La chape de plomb du non-être leur paraît préférable, qui tout à la fois déresponsabilise et justifie. Un passé, quel passé ? Des injustices, quelles injustices ?  Ne vous occupez pas de cela, occupez-vous du présent, tout est normal.
Pourtant, ce passé a existé, et il a fait ses blessures, en ses bourreaux et en ses victimes. Nous  portons ces blessures en nous, en nos psychologies, en nos histoires. Elles ont contribué à l'édification de ce que nous sommes, à notre façon de voir le monde, à la sensibilité de notre foi. Elles ont creusé en nous ce que nous sommes. Mais ce n'est pas assez dire : elles ont aussi creusé en l'Eglise ce qu'elle est aujourd'hui.
La désacralisation du sanctuaire, l'envahissement du naturalisme, l'énervement de la foi, le recul du christianisme, l'assèchement des vocations sacerdotales, tout cela s'est joué dans la cause de ces souffrances individuelles et collectives, et cette cause a des auteurs, a des acteurs, que les témoignages rapportés décrivent et rappelent à la mémoire.
Cet exercice n'aurait peut-être pas sa place ici si cette cause n'exerçait toujours sa vertu - si l'on peut dire. Mais elle l'exerce de fait, toujours. Les phénomènes qui viennent d'être évoqués ne laissent pas d'être actuels, et la cause qui les a provoqués perdure dans le temps, avec, est-on désolé de devoir l'ajouter, les mêmes malignités.
Mgr Masson a rapporté l'ignoble propos d'un évêque de France, à propos de Mgr Lefebvre : "On le poussera au schisme". Cela paraît-il invraisemblable ? Voici qu'en écho, d'autres témoins - de l'actualité ceux-là (1) - rapportent ces propos de Mgr Gueneley, évêque de Langres : "
Monseigneur Centène, on l’a fait plier. Monseigneur Aillet, on lui donne trois ans. Après, nous verrons. Dominique Rey, son diocèse finira par couler". Mgr Cattenoz, en d'autres temps qui ne sont pas si lointains, a été  lui aussi l'objet de telles appréciations "charitables". Les évêques visés ne sont pas les mêmes, les locuteurs ne sont pas les mêmes, mais l'esprit, lui, demeure. Un esprit dont il est difficile de se convaincre qu'il soit de Dieu. De la rage à attendre le faux pas provoqué de Mgr Lefebvre à l'attente de la chute d'évêques dont le catholicisme répugne, et qui est pourtant authentique et a les bénédictions du Pape, il y a filiation parfaite. La cause opérante est toujours active.
Ce constat est sans doute la meilleure réponse à apporter à qui s'interrogerait sur la crédibilité des témoignages apportés par Mgr Masson sur le passé. L'actualité toute chaude les valide.
Pour montrer à quel point cette affirmation est fondée, nous allons republier un article qui a paru sur Hermas.info, à propos des thèses d'un Père jésuite, le Père Fourez, au sujet de l'eucharistie. Un thème vital pour l'Eglise, vital pour notre foi, crucial dans la crise de l'Eglise. Imaginerait-on que des horreurs soient dites publiquement à ce sujet très saint, par des personnages ayant pignon sur rue, autorité, chaire d'enseignement ? Est-ce plus invraisemblable que ce que raconte Mgr Masson ? Non, assurément. Eh bien cela est, et il est bon de s'en souvenir, il est bon de le savoir.

Pierre Gabarra
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(1) Le Salon beige : lien

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