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Exposé de son éminence Monseigneur Innocent à ne pas oublier même si le temps passe …

Publié le 10 novembre 2009 par Ordresaintandredecaffa

ÉGLISE ORTHODOXElogo du diocèsePATRIARCAT de MOSCOUDIOCÈSE DE CHERSONÈSE
DÉCLARATIONS
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Exposé de son éminence Monseigneur Innocent,
archevêque de Chersonèse

« Le rassemblement de la diaspora ecclésiale russe en Europe Occidentale comme étape de la création de l'Église Locale »

Le Christ est ressuscité !

   Je vous salue de tout mon coeur, chers pères, frères et sœurs qui vous êtes réunis ici, dans la Maison Russe, en ces jours lumineux de Pâques, pour étudier les questions actuelles de la réorganisation de la vie de l'Église Orthodoxe en France, et plus largement en Europe Occidentale.   Notre rencontre a lieu dans le cadre de la célébration des 75 ans de l'église cathédrale du diocèse de Chersonèse, l'église des Trois Saints Hiérarques. Nous fêterons cet anniversaire significatif en février de l'année prochaine et je pense qu'il nous donne une magnifique occasion non seulement de nous souvenir du passé, mais aussi de nous tourner vers la situation présente et d'étudier la responsabilité nouvelle qui revient maintenant aux diocèses et aux paroisses de l'Église Orthodoxe russe en Europe occidentale.

   Cette responsabilité nouvelle est liée d'abord à l'accroissement constant de notre troupeau, du fait d'un très grand nombre d'enfants spirituels du Patriarcat de Moscou, venus en Europe occidentale ces dernières années pour un séjour permanent ou temporaire. Cependant, à côté des tâches immédiates de pastorale de ces nouveaux émigrants, l'avenir de l'Église Orthodoxe dans ces pays entre aussi dans notre sphère de responsabilité. A cela est lié et se pose une question complexe, douloureuse et très importante : celle de surmonter les discordances au sein de la diaspora ecclésiale russe.

   Plus de deux ans déjàs sont passés depuis que le primat de l'Église Russe a appelé les paroisses orthodoxes de tradition russe en Europe occidentale à la réunification. Comme vous vous en souvenez, Sa Sainteté le Patriarche Alexis avait proposé de fonder une circonscription métropolitaine autogérée, qui devait englober les trois juridictions ecclésiastiques russes déjà existantes en Europe. La création d'une telle circonscription devait être une étape vers l'aménagement canonique de l'Église Orthodoxe, et c'est ainsi que nous comprenons la mise en oeuvre du principe d'Église locale.

   « Nous espérons - écrivait Sa Sainteté le Patriarche Alexis, dans sa lettre historique du 1er avril 2003 - qu'une circonscription métropolitaine autogérée réunissant tous les fidèles de tradition orthodoxe russe dans les pays d'Europe occidentale servira, lorsque Dieu le voudra, de base à l'aménagement canonique futur d'une Église Orthodoxe Locale multinationale en Europe occidentale, construite dans un esprit de conciliarité par tous les croyants orthodoxes qui résident dans ces pays. »

   Un débat non officiel sur la lettre du Patriarche se poursuit depuis sa publication jusqu'aujourd'hui. Des points de vue différents sont exprimés, mais il semble que de plus en plus d'orthodoxes, s'ils vivent vraiment des intérêts de l'Église du Christ, prennent conscience de la vérité ecclésiale et la sagesse pastorale des perspectives exposées dans la lettre du Patriarche. En tout cas, au jour présent, c'est le seul appel fait par un Primat d'une Église Orthodoxe Locale sur la question de l'aménagement futur de la vie ecclésiale dans les pays de la dispersion.C'est pourquoi nous la considérons comme exceptionnellement importante.

   Il nous est arrivé d'entendre une opinion selon laquelle la lettre de Sa Sainteté aurait porté la division parmi ceux à qui elle était adressée. Je ne pense pas qu'une telle opinion soit juste. On pourrait plutôt dire que la parution de la lettre a révélé les profondes contradictions internes qui s'étaient accumulées depuis bien longtemps au sein de l'émigration russe d'église. Et aujourd'hui, dans ce milieu, dans la vie des orthodoxes de tradition russe en Europe occidentale, sont manifestes la désunion, la discorde et l'existence de certains problèmes essentiels. Ces problèmes nécessitent leur résolution.

   I )   Je voudrais commencer mon exposé par une évaluation générale de la situation d'aujourd'hui dans les pays de la dispersion orthodoxe. Il est évident qu'elle contredit les bases de l'enseignement de l'Église et sa structure. Sur un seul et même territoire existent plusieurs diocèses, dirigés par différents évêques appartenant à différentes Églises Locales.

   Une telle situation, avant tout, contredit l'enseignement dogmatique de l'Église Orthodoxe selon lequel, en un seul lieu, doit se trouver, à l'image du Christ et de son Église, un seul évêque, présidant l'assemblée eucharistique - le diocèse, et qui « conduit droitement 1 » son troupeau uni. La coexistence de plusieurs évêques sur un même territoire s'oppose à la conscience claire de l'unité de l'Église du Christ et divise le troupeau de ce territoire - le Corps du Christ. Ainsi l'organisation actuelle de la diaspora est une distorsion dogmatique qui nous empêche de fait de confesser notre foi en l'Église Une. En outre, toute atteinte aux fondements dogmatiques a pour conséquence interne, des processus spirituels destructeurs que, peut-être, nous ne voyons pas toujours et dont nous n'avons pas toujours conscience, mais qui peuvent conduire à des suites néfastes.

   Le morcellement des orthodoxes sur un seul et même territoire est un problème pratique, mais surtout essentiel sur le plan pastoral. La division en « juridictions » est de plus en plus souvent acceptée comme norme : ” celle-ci - c'est mon Église et celle-là - c'est leur Église “. L'affirmation d'une telle vision de choses entraîne une auto-isolation certaine et une fermeture sur soi. Il en résulte que tel paroissien devient incapable de missionnariat personnel, de travail personnel de catéchisation, ou même de simple bienveillance envers les nouveaux-venus dans « son » église. La réciproque est également vraie - devant le visage de personnes refermées sur elles-mêmes, devant le caractère « distinct » des communautés ecclésiales et des diocèses, une personne extérieure n'y verra qu'une sorte de « club fermé » plutôt qu'un lieu où il pourrait s'adresser pour étancher sa soif de Dieu.

   Il convient également de reconnaître que notre désunion nous affaiblit. Le morcellement de nos forces ne nous permet pas de réaliser le potentiel considérable de l'Orthodoxie. Sauf rare exception, chaque « juridiction » prend ses propres mesures, a sa propre organisation dans les domaines pastoral, missionnaire, catéchétique, éducatif et caritatif. L'absence complète ou partielle de coordination entraîne un gaspillage de moyens humains, matériels et financiers. De plus, certains projets, comme par exemple la préparation systématique des pasteurs et des catéchètes, ne peuvent évidemment être menés que dans un effort commun de toutes les juridictions. Sans cet effort, ces projets ne se réalisent pas.

   II) De plus, il est évident que la situation actuelle n'est pas dûe au hasard et ne peut être résolue par une simple dénégation des circonstances qui maintiennent la séparation en « juridictions ». Les causes historiques de cette séparation sont bien connues : l'apparition presque simultanée sur un même territoire de plusieurs « diasporas » dont les membres se ressentaient à l'origine seulement comme des immigrés temporaires, et pour cette raison gardaient un lien immédiat avec l'Église du pays dont ils étaient issus. Aujourd'hui, chaque juridiction se compose de trois éléments : de descendants assimilés des premiers émigrés, d'habitants de souche du pays, et enfin d'un nouveau flux migratoire encore non assimilé mais qui appartient à de l'Orthodoxie locale à part entière. Il est évident que la division en juridictions « ethniques » est liée à cette réalité complexe de l'Orthodoxie en Europe Occidentale. Si l'on ne doit pas cultiver cette division ethnique, il est cependant tout aussi inadmissible, d'un point de vue pastoral, d'ignorer les nécessités actuelles des différentes strates du peuple orthodoxe en Europe Occidentale. Parmi ces nécessités pastorales, celle de conserver, dans une certaine mesure, une pratique pastorale et liturgique, un mode de vie ecclésiale proches de leurs natio ns d'origine. En reconnaissant ce fait nous saurons comprendre les véritables causes internes du maintien de la division en en « juridictions ». En les comprenant et les assumant, nous saurons les surmonter. Cependant, ces causes n'existent que pour les diverses juridictions pour ainsi dire « ethniques ». La division de l'Orthodoxie russe aujourd'hui, ne trouve même pas cette jsutification.

   Dans le temps, les causes de ces divisions ne furent que politiques : certains ne purent accepter de garder un lien avec une Église captive d'un pouvoir athée ; d'autres - faisant un effort sur eux-mêmes - purent garder ce lien. Lorsque la diaspora russe fut divisée en « juridictions », aucune autre cause ne fut évoquée. Cependant, avec quelques variantes, toutes les trois “juridictions” conservèrent une même tradition liturgique et pastorale, et aujourd'hui - apportent leur sollicitude pastorale au même troupeau ecclésial : aux descendants de l'émigration russe, à des habitants du pays attirés précisément par la tradition russe, et à la nouvelle vague d'émigration de Russie et de la C.E.I. Ainsi, si pour les autres juridictions la division trouve une justification pour ainsi dire « pastorale », à l'inverse la division des juridictions russes porte en elle une division encore plus grande de la partie russe unique du troupeau ecclésial de l'Europe occidentale, et entraîne un préjudice dramatique à l'action pastorale.

   La division des fidèles russes entraîne une dépense supplémentaire de temps et d'énergie dans la coordination du travail des juridictions russes. Cette situation devient une étape superflue dans le dialogue entre les représentants des divers diocèses existant en Europe Occidentale. Ainsi, cette division injustifiée est un obstacle susbstantiel à la coopération des hiérarques et plus généralement, des représentants des juridictions dans la construction de l'Église locale.

   III) Comme nous déjà dit plus haut, le 1er avril 2003, Sa Sainteté le Patriarche de Moscou et de toute la Russie Alexis II envoyait à tous les diocèses et paroisses de tradition russe en Europe Occidentale un message historique ouvrant la voie à la résolution des problèmes de la diaspora en Europe Occidentale. Dans ce message il était proposé de créer, à partir desdits évêchés, une circonscription métropolitaine, c'est-à-dire une structure ecclésiale ayant la même organisation qu'une Église locale : composée de plusieurs diocèses rassemblés sur une base d'autonomie par un Concile et un Primat, avec des organes de direction permanents correspondant.

   La mise en place, en réponse à l'appel de Sa Sainteté le Patriarche, d'une entité ecclésiale unique incluant toutes les paroisses de tradition russe en Europe Occidentale peut non seulement éliminer tout obstacle superflu à la création de l'Église locale, mais encore être un pas en avant sur cette voie. En effet, la création en Europe Occidentale de cette Métropole pourrait servir d'exemple pour les autres Églises locales. Les métropoles ainsi créées, possédant la structure interne d'une Église auto-administrée, pourraient par la suite fusionner naturellement en une seule Église Locale d'Europe Occidentale autocéphale.

   L'appel de Sa Sainteté le Patriarche à l'union au sein d'une telle Métropole ouvrait la voie à la guérison de la division et à la solution des problèmes pastoraux décrits plus haut. Cependant il ne décidait pas à l'avance de la forme d'organisation de la Métropole auto-administrée en projet. En effet, la hiérarchie de l'Église Russe a bien conscience de la diversité du troupeau des diocèses de tradition russe en Europe Occidentale, qui comprend aussi bien des émigrants nouveaux qu'anciens, de même que des habitants de souche locale. On a conscience des particularités du développement historique et organisationnel de ces diocèses. C'est pourquoi on s'attend à ce que soit justement la diaspora qui réponde à l'initiative, à l'appel venu de l'Église-mère, par un travail d'organisation de sa situation canonique.

   IV) Ceci reflète la vision de principe de l'Église Russe sur l'avenir de la diaspora orthodoxe dans le monde : avec le soutien nécessaire et un certain guidage de la part des Églises-mères, la diaspora est appelée à élaborer elle-même la solution du problème de son avenir, à définir elle-même les voies de son émergence en tant qu'Église locale.

   En employant le terme de « diaspora », il est nécessaire de préciser ce qui suit.Oui, le troupeau d'Europe occidentale aux strates multiples inclut sans aucun doute jusqu'à ce jour un élément significatif de diaspora (dispersion), un élément qui s'est particulièrement renforcé avec les nouveaux flux migratoires. Mais, d'un autre côté, font égalementpartie de ce troupeau ecclésial, les descendants assimilés des vagues d'émigration précédentes, et bien sûr les habitants de souche locale “greffés” précisément à la tradition russe lors de leur conversion à l'Orthodoxie. La sollicitude pastorale de Sa Sainteté le Patriarche, exprimée dans son message historique, s'adresse à eux tous, sans distinctions.

   Nous pourrions ici digresser amplement à sur la vieille tradition missionnaire propre à l'Église Russe, des fruits de cette mission au Japon, en Amérique et dans les régions éloignées de l'État russe. Sans nous arrêter sur des détails historiques bien connus dans leur ensemble, il convient de souligner les traits caractéristiques de cette mission. Sans aucun doute, les missionnaires russes portaient avec eux la tradition, tradition liturgique, iconographique et pastorale, de leur propre Église. Cela ajoutait une empreinte unique et inestimable à leur œuvre et permettait aux enfants de la mission, illuminés par la lumière de la foi orthodoxe, de naître à cette foi sans rompre avec une pratique vivante mais en se fondant dans le flot d'un tradition confirmée par les siècles. En même temps, les missionnaires russes respectaient la langue, la culture et les coutumes des peuples qu'ils évangélisaient, lorsqu'elles ne contredisaient pas l'enseignement moral de l'Église orthodoxe. C'est ainsi que naissait progressivement une tradition orthodoxe locale. Elle se nourrissait de la tradition russe mais ne s'identifiait pas à elle, et avec le temps, elle arrivait à maturité. Et cette tradition est une raison supplémentaire pour sa Sainteté le Patriarche d'inclure dans son message un appel à construire la Métropole projetée, en coopération avec l'Église Mère russe mais avec les efforts des orthodoxes vivant ici en Europe Occidentale.

   De fait, le principe indiqué, qui permet à une communauté de croître progressivement dans le cadre de l'Église Russe, s'est également exprimé dans la question de l'organisation canonique de l'Église dans les pays de mission. Et justement les communautés ecclésiales créées ici, se trouvant au départ en pleine dépendance canonique de l'Église Russe, se développent et avancent pas à pas vers l'autonomie, puis vers l'autocéphalie. Il faut souligner que ce mouvement ce produit avec la collaboration et la sympathie, et avec un guidage partiel à un niveau nécessaire de l'Église Russe qui a déjà témoigné à de multiples reprises de sa sympathie à ce mouvement et a accordé l'autonomie à ses Églises-filles. Au jour présent, diverses Églises liées au trône patriarcal de Moscou se trouvent à divers stades de ce mouvement : outre l'Église Autonome du Japon, il convient de mentionner l'Église Orthodoxe d'Ukraine qui dispose de droits d'automie élargie proches de l'autocéphalie, des Église de Moldavie, d'Estonie et de Lettonie qui ont un statut d'auto-administration, ainsi que l'Exarchat Biélorusse qui a un degré plus restreint, mais encore très large, d'indépendance dans sa direction interne.

   Ainsi, on ne doit pas dire que la sollicitude de l'Église Russe, et en particulier le message de Sa Sainteté le Patriarche, ignore la naissance d'une Orthodoxie locale et se définit, semblerait-il, par une nouvelle ecclésiologie, basée sur un principe ethnique et national. Bien au contraire, cela fait déjà longtemps que l'Église Orthodoxe Russe applique ses principes en France.

   V) Il est providentiel que ce soit justement ici, en France, que nous voyions au sein d'un groupe peu nombreux de clercs et de laïcs restés fidèles au Patriarcat de Moscou, de véritables héros ayant beaucoup oeuvré pour la création de la future Église Locale.

   Comment ne pas se souvenir des initiateurs de la fondation de la Communauté des Trois Saints Hiérarques, des membres de la fameuse confrérie saint Photius. Leur activité débuta dès les années 20 et ils furent, semble-t-il, les premiers dans toute l'émigration à parler de la nécessité de dévoiler à la France les richesses spirituelles de l'Orthodoxie. A ce groupe appartenaient Vladimir Lossky, les frères Kovalevsky, les remarquables peintres d'icônes Léonide Ouspensky et le moine Grégoire Krug. Leurs idées étaient partagées par des personnages célèbres dans toute l'orthodoxie occidentale, comme le métropolite Antoine (Bloom), l'archevêque Seraphim (Rodionov), l'archimandrite Serge (Chévitch), l'archimandrite Sophrony (Sakharov) et d'autres… Les membres de la fraternité saint Photius et leurs amis furent à l'origine des premières traductions et des premières éditions en langue française de la littérature orthodoxe, et entrèrent en dialogue avec des penseurs contemporains français tels que Jacques Maritain, le cardinal Daniélou, Louis Massignon ou Gabriel Marcel.

   Sans faire l'histoire du passé, je donnerai un exemple tiré de notre vie d'aujourd'hui. Il se peut que beaucoup ici ne le savent pas, mais à la tête du vaste doyenné italien du diocèse de Chersonèse, se trouve un italien de souche, tout comme à la tête du vicariat espagnol, se trouve un archimandrite espagnol, et ainsi de suite.  Je ne veux pas établir ici de comparaison avec les autres juridictions, mais je dirai seulement que seule une personne aux idées préconçues peut nous accuser de nationalisme ou d'incapacité à travailler à la création de l'Église Locale.

   C'est pourquoi l'accusation de phylétisme qui résonne parfois à l'adresse de notre Église, la plus multinationale de toutes les Églises Locales, suscite en nous un profond sentiment de perplexité.

   VI ) Parmi les arguments des adversaires de la réunion de la diaspora ecclésiale russe, il n'est pas rare qu'à cause d'un certain malentendu on entende dire que pas est inacceptable car il annihilerait la spécificité de l'organisation ecclésiale élaborée dans l'émigration. Nous l'avons déjà dit plus haut mais nous allons souligner à nouveau que dans le message patriarcal où était proposé la réunion des « juridictions » russes, une sollicitude bienveillante était fortement exprimée à l'égard de la tradition élaborée dans l'émigration. « Beaucoup, parmi les porteurs de la tradition spirituelle russe en Europe occidentale d'aujourd'hui, voudraient garder aussi les formes d'organisation de la vie ecclésiale qui pendant de longues décennies se sont élaborées progressivement dans des conditions distinctes de la situation de l'Église en Russie, bien que sur la base de la même tradition canonique, […] énoncée également dans les actes et décisions du Concile Local de toute la Russie des années 1917-1918 », – écrivait Sa Sainteté le Patriarche.

   Il faut cependant souligner que dans les diverses juridictions de la diaspora russe, la direction interne a pris des formes différentes. Les diocèses du Patriarcat de Moscou suivent le code diocésain général de l'Église Orthodoxe Russe. Au demeurant, l'un d'entre eux, le diocèse de Souroge, est géré par un réglement interne sensiblement modifié, proche par certains côtés de celui de l'Exarchat du Patriarche de Constantinople, et que l'on associe aux décisions du Concile de 1917-1918. Enfin les diocèses de l'Église Orthodoxe Russe Hors-frontières suivent le code diocésain général de l'EORHF, qui n'est pas entièrement axé sur les décisions du Concile de 1917-1918.

   Ainsi, sans entrer ici dans les détails de l'élaboration des statuts, on peut indiquer qu'il est indispensable que les représentants des diverses traditions canoniques et ecclésiales y travaillent ensemble. C'est ce qu'indiquait Sa Sainteté le Patriarche : « Il est envisagé d'accorder à la circonscription métropolitaine [en projet] des droits d'auto-administration […], sur la base de statuts qu'il importe d'élaborer avec le concours des représentants de tous les groupes de la dispersion orthodoxe russe ». Dans le texte de message patriarcal on peut voir que les Décisions du Concile de 1917-1918 sont présentées comme l'une des bases les plus importantes de ce travail commun. Cela apparaît aussi dans les résultats des travaux menés en leur temps par des représentants du Patriaracat de Moscou et du défunt archevêque Serge (Konovalov). Cependant, lors d'une récente Table Ronde du mouvement OLTR on a souligné la nécessité d'une mise au point attentive du projet de statut initialement préparé. On pense que, lors de cette mise au point, les décisions du Concile de Moscou pourraient être à nouveau utilisées, en tenant bien sûr compte des besoins ecclésiaux actuels.

   Ainsi, pour réaliser l'unité des « juridictions » de tradition russe en Europe Occidentale, il est nécessaire de travailler soigneusement à la définition du cadre dans lequel elle pourra se faire.

   VII) En conclusion, en liaison avec ce qui a été exposé plus haut, je voudrais dire que nous, orthodoxes de diverses juridictions, devrions resserrer nos rangs afin que « d'une seule voix et d'un seul cœur » nous prêchions et annoncions l'Évangile par notre vie-même.

   Cela est particulièrement vrai pour les orthodoxes de tradition russe. En réunissant nos efforts et en gardant le lien spirituel avec notre Église-mère nous pourrions réellement devenir le fondement d'une Église locale à venir. En restant divisés, il est évident que nous sommes un obstacle à sa création.

   Il est temps de se rendre compte du fait que les trois juridictions russes aspirent à s'occuper des mêmes fidèles, à la séparation desquels il n'y a plus aucune raison politique.

   Quant à l'Église Orthodoxe Russe, du Patriarcat de Moscou, comme a été dit lors de la session du Saint Synode du 24 décembre, elle « ne répudiera pas ses ouailles qui demeurent hors des frontières de la Patrie et ne se démettra pas de la responsabilité dont le Seigneur a chargé le Patriarcat de Moscou en ce qui concerne la sollicitude spirituelle envers cette partie du peuple de Dieu ».

Relecture de la traduction achevée le 07/07/2005. A.

  (1) selon les termes slaves (pravo praviachtchiï) employés par notre archevêque par allusion à l'expression que la liturgie reprend à saint Paul (2ième épître à Timothée, 2,15). Ils y traduisent le verbe grec “orthotomounta” (dont le complément est “ton logon” - la parole ) et qui signifie littéralement “qui (dé)coupe droit”, d'où la traduction française habituelle “qui dispense fidèlement” (la parole). La notion importante est “pravo”-”ortho”-”droit”.


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