Magazine Journal intime

Le doux et la douleur (ex voto)

Publié le 22 novembre 2009 par Lephauste

Souvent toujours la douleur enrôle ceux qui du doux ont quitté le chemin, soit que le chemin s'arrêtait là, et qu'après longs temps passés à errer, il se soient rendus à l'évidence que de friches en essarts ils n'avançaient plus que dans l'avanie des souches retournées. Soit que par un hasard prévu de long temps ils se soient retrouvés au réveil, perdu pour l'horizon, au fond d'un fossé dont ils ne reconnaissaient rien sinon qu'ils l'étaient celui-ci, ce fossé d'herbes sèches au bord duquel on se penchait avec compassion et quelques peu d'agacements, quand crois-tu qu'il va en sortir ?

Alors à l'aide du doloire la douleur leur ôte la vêture des hôtes, alors nus ils vont, se rechaussent de boues et debout s'avancent pour naître des larmes comme on naît d'une pluie à son zénith d'ornières débordantes de vie. Ceux-là qu'on reconnaît comme nos semblables, ceux-là qui sont nôtres par le fond et la forme, ceux et celles-ci que nous ne saurions abandonner sinon qu'à nous rendre méprisables aux regards anxieux des peines qu'ils éprouvent à nous rejoindre, ceux-là n'ont pas de nom, pas encore de nom.

Lectrices, lecteurs, vous qui passez ici comme attirés par la chair vive et nue du propos outré, je vous dois de vous dire ceci : Rien de ce que vous lisez ici n'est vrai. Personne, aucun lieu ni temps dont vous puissiez croire que j'ai eu à le connaître, l'aimer, le haïr ni à en éprouver le moindre sentiment en en recevant l'égale part de ce que j'aurais eu à donner, n'existe vraiment, n'a existé un peu ni n'existera jamais. Je suis menteur de naissance, je fabule et le verbe que j'ai forgé pour qu'il use de moi comme d'une arme blanche  finit par faire le soc d'une charrue pour ouvrir un sillon tendre au ciel lourd de Décembre. "Personne", seul ici peut se reconnaître en ce que le voyage d'où l'on ne retire que la gloire stupide des racontars, s'achève un jour dans un buisson où sa nudité initiale prendra du soleil le souffle et d'une étoile la voie et du vent la maison.

A vous, merci. Et la grâce du doux sur vos propres douleurs.


Retour à La Une de Logo Paperblog