Magazine Talents

Les Vanupieds (22)

Publié le 10 janvier 2010 par Plume
Les Vanupieds (1) : là   Les Vanupieds (2) : là        Les Vanupieds (3) : là  
Les Vanupieds (4) : là           Les Vanupieds (5) : là        Les Vanupieds (6) : là
Les Vanupieds (7) : là           Les vanupieds (8) : là   Les Vanupieds (9) : là
Les Vanupieds (10) : là           Les Vanupieds (11) :
   Les Vanupieds (12) :
Les Vanupieds (13) : là   Les Vanupieds (14) :    Les Vanupieds (15) :
Les Vanupieds (16) :      Les Vanupieds (17) :    Les Vanupieds (18) :
Les Vanupieds (19) :        Les Vanupieds (20) :    Les Vanupieds (21) : là

Elle plongea à nouveau ses deux mains dans l’eau fraîche et lissa ensuite sa volumineuse chevelure noire, rejetant ses boucles en arrière afin de dégager son front. C’est alors qu’elle se rendit compte du silence. Affolée, elle se retourna aussitôt à la recherche de son frère et sa sœur. Mais tous deux étaient là, assis l’un à côté de l’autre, et l’observaient intensément. Alissa détourna aussitôt les yeux. Mais Adam lui sourit :

« A quoi tu penses ? Osa-t-il enfin lui demander, constatant avec plaisir des traits plus sereins.

- A rien ! Murmura France en se laissant tomber sur une pierre au bord de la rivière.

- Je ne te crois pas ! S’exclama son cadet en riant. Nous te regardons depuis un bon moment, tu sais ! »

France haussa les épaules.

« Tu penses à Abby, pas vrai ? »

Un frémissement parcourut les paupières de l’aînée.

« Ne parlons pas d’Abby…

- Pourquoi donc ? » Jeta Alissa soudain, d’un ton aigre.

Elle la toisa avec mépris :

« Parce que tu l’as abandonnée, notre petite sœur ? Et bien parlons en au contraire d’Abby ! Quand je pense que tu as osé dire : non, nous ne séparerons jamais et surtout pas de notre propre fait. Mais qu’as-tu fait ? Sinon te séparer et nous séparer d’Abby ? Quand je pense que tu as osé menacer Andréa des pires représailles si elle ne s’occupait pas bien d’Ann ! Oseras-tu seulement la regarder en face pour lui avouer que tu as abandonné Abby ? Tu n’avais pas le droit…

- Et bien je l’ai pris ! Coupa France avec irritation, posant sur elle un regard glacial.

- Et de quel droit ? Eclata Alissa, hors d’elle. Quel droit avais-tu de décider pour Abby ?

- Nous lui avons donné ce droit, Alissa ! Dit Adam avec douceur en tentant de l’apaiser.

- Nous lui avons donné le droit de commander mais pas de décider de la vie de chacun d’entre nous ! Répliqua Alissa. Elle est d’autant moins pardonnable qu’elle nous avait promis que rien ni personne ne nous sépareraient !

- Sauf si les évènements…

- Quels évènements l’ont forcée à se séparer d’Abby ? »

Adam ne sut que répondre. D’un regard brouillé, il supplia France de s’expliquer. Mais l’aînée ne le remarqua pas. Elle avait levé les yeux vers le feuillage scintillant au dessus d’eux trois et laissait la légère brise caresser son visage.

« C’est son égoïsme ! Reprit Alissa qui ne contenait plus son désir de lui faire mal. Elle ne pense qu’à voir la mer et pour la voir, elle n’a pas hésité à se séparer d’Abby comme elle n’hésitera pas à se séparer de nous. Tout cela pour voir une étendue d’eau ! Elle se fiche de nous et profite tant qu’elle peut de son droit d’aînesse. Elle s’est fichue d’Abby et l’a abandonnée. Un jour, elle nous abandonnera aussi parce que nous la gênerons dans la poursuite de son rêve ! »

Elle lorgnait avec dédain les traits de sa sœur, cherchant la preuve qu’elle avait réussie à la blesser. France frémit. Peut-être la colère aurait-elle été une preuve ? Mais France ne se fâcha pas. Elle la considéra juste avec une immense indignation. Alissa, incapable de soutenir son regard, s’énerva :

« Prouve que j’ai tort ! Lui lança-t-elle, hargneuse. Prouve que je n’ai pas raison ! »

Un sourire surprenant apparut sur les lèvres de France.

« Je n’ai rien à prouver ! Dit-elle enfin. Prouve, toi, que tu as raison. »

La réponse déconcerta la fillette blonde puis elle se reprit très vite :

« La preuve ? Mais elle est bien visible ! Abby aurait dû être là avec nous ! 

- C’est bien. Alors tu as raison. »

France se tut et planta ses yeux brillants dans les siens. Alissa s’agita, déstabilisée :

« Alors… Alors j’ai vraiment raison ? Bredouilla-t-elle d’une voix qui tremblait, au bord des larmes.

- Tu viens de donner une preuve irréfutable…

- Arrête ! Cria Alissa. Pourquoi tu dis ça ? Pourquoi tu répètes ce que je dis ? Pourquoi tu ne te défends pas ? Tu es stupide ou quoi ?

- Je commande le groupe que nous formons ! Déclara France tranquillement. Je ne commande pas vos sentiments. Chacun d’entre nous est libre de penser ce qu’il veut.

- Mais… Mais tu ne comprends pas que j’ai besoin de savoir ? » Hurla Alissa en frappant du pied.

Tout son corps était secoué de pleurs convulsifs.

« Savoir quoi ? Murmura France, imperturbable. J’ai dit aussi que mes décisions seraient parfois dures mais que ce serait toujours pour notre bien à tous. Tu ne t’es pas demandé si peut-être j’avais agis ainsi parce que c’était la meilleure chose à faire pour Abby ? Que veux-tu que je te dise si tu doutes de moi ? Si au lieu de me demander simplement une explication, tu ne cesses de m’accabler de reproches ? Si tu penses que je suis comme tu dis, c’est ton droit et je ne chercherai pas à te démentir. Adam a compris que c’était une décision prise pour le bien d’Abby, si toi tu ne le comprends pas, que veux-tu que j’y fasse ? Pour ma part, je ne me pense pas aussi égoïste et méchante que tu me décris, mais cela c’est mon droit, n’est ce pas ? »

Alissa la fixa un instant avec détresse… puis elle éclata en sanglots et se mit en boule dans l’herbe en cachant son visage dans le creux de ses bras, agitée de spasmes violents et désordonnés. Adam se mordit les lèvres et lança un regard désespéré à sa sœur aînée.

Mais France se détourna en haussant les épaules, se leva et s’éloigna. Scrutant les alentours, elle aperçut un talus non loin de la crique et s’avança résolument vers lui. Elle grimpa agilement au sommet et para sa vue d’une main afin d’examiner attentivement la campagne environnante.

 Désolé, Adam posa une main affectueuse sur l’épaule de sa petite sœur.

« Laisse-moi ! » Cria Alissa en se dégageant brutalement.

Adam soupira tristement et la laissant avec sa hargne rejoignit l’aînée. Elle était immobile au sommet du talus. Dans les rafales du vent qui se levait sur la plaine, sa robe déchirée claquait et ses longs cheveux noirs traçaient de curieuses volutes autour de ses joues creusées par les privations et la fatigue.

« Nous dormirons ici ! Dit-elle à son frère.

- Oui ! C’est une bonne idée ! La nuit va tomber, nous n’aurions pas atteint de villes de toute manière ! »

France approuva. Elle paraissait soucieuse.

« Reste-t-il des pierres à feu ? » Demanda-t-elle tout à coup.

Adam glissa sa main dans sa ceinture et en ressortit deux minuscules. Il les tendit à sa sœur, l’air inquiet. France fronça les sourcils :

« Il faudra en acheter ! »

Adam hocha la tête :

« Nous allons pêcher ?

- Oui. Murmura France. J’espère que nous attraperons quelque chose. La rivière est jolie. Il doit y avoir des poissons ! »

Adam resta un long moment silencieux, les yeux baissés. France allait descendre du talus lorsque brusquement il lui saisit le bras :

« Dis… »

Elle le dévisagea avec surprise :

« Pourquoi Lewis nous a donné cette bourse ? »

France haussa les épaules en signe d’ignorance.

« Tu ne penses pas que c’est pour Abby, n’est ce pas ?

- Si cela avait été pour Abby, répliqua France d’un ton sec, je ne l’aurais jamais prise ! »

Adam s’illumina comme par enchantement :

« Je le savais ! S’écria-t-il. Je le savais ! Mais alors… Pour quelles raisons il nous a donné cette bourse ? Nous n’avons même pas travaillé pour lui ! Tu crois qu’il existe des gens assez fous pour donner ainsi de l’argent sans rien en retour ? »

Troublée, France serra le petit sac dans sa main.

« C’est curieux tout de même ! Poursuivit Adam, songeur. La duchesse, j’aurais compris, puisqu’elle est riche et qu’une bourse en moins ou en plus… Mais Lewis ? Tout aussi bien, c’est son salaire !

- Il a dit qu’il existe des gens généreux ! Répondit France. Peut-être est ce vrai… ou alors il est fou ! »

Adam se mit à rire.

« Il est fou ! Lança-t-il joyeusement en sautant du talus à son tour. Mais nous, ça nous arrange, pas vrai ? »

France le contempla avec amusement mais ne commenta pas la remarque. Ils s’apprêtaient à rebrousser chemin en direction de la crique quand soudain un cri d’effroi retentit, les clouant sur place :

« Alissa ! » S’affola Adam.



Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Plume 225 partages Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog

Magazine