Magazine Journal intime

La fille qui venait de mettre en scène le dernier Marc Dorcel

Publié le 04 mars 2010 par La Chose

Parce qu’un blog de fille commercialement viable comporte toujours, entre deux réclames clignotantes, une petite dose de coquinerie sexuellement correcte qui sait enchanter les lectrices et les faire délicieusement glousser derrière leur écran tandis que leur compagnon ronflote tendrement devant une émission d’AB Moteurs, une bière à la main…

La fille qui venait de mettre en scène le dernier Marc Dorcel

La tante de Loutre est une femme merveilleuse.
D’abord, elle habite en Normandie.
Oui, je sais. Ça n’a aucun rapport. C’est juste que mon précédent billet racolait un max du côté de la Bretagne, alors aujourd’hui je me dis que si je pouvais tapiner un peu chez les normandes, j’augmenterais encore mon lectorat potentiel (et donc mes futures recettes publicitaires).

Donc la tante de Loutre habite en Normandie, dans une ferme remplie d’animaux.

C’est très, très con, ce que je viens d’écrire. Le rouge me monte aux joues, figure-toi, et en même temps je prépare ma défense en faisant appel à Georges Orwell, qui a écrit exactement la même connerie que moi, sauf que c’est devenu une référence incontournable en matière de littérature.
Bon, on va arrêter  de tourner autour du pot de yaourt, je voulais te parler de la brave Tata normande parce qu’en plus d’égorger divinement bien poules et dindons, de retourner les lapins morts comme des chaussettes et de noyer les chatons surnuméraires dans le ruisseau d’à côté, elle a un cœur d’or, comme toutes les fermières qui passent huit heures par jour les deux pieds dans la bou(s)e et les narines dans le purin.
Donc l’autre jour, elle a insisté pour nous refiler une magnifique yaourtière, vu que Loutre et moi on était en train de déraper sur une grande marrade concernant les bobos qui font leur pain eux-mêmes avec des machines hors de prix dans leurs lofts du Bas-Montreuil. Loutre et moi, on était pas charitables et on ricanait comme des hyènes de droite qui auraient soudain viré « gauche caviar » (ou le contraire, je sais plus), mais c’était drôlement bon d’être méchante.

Toujours est-il que la Tata-Du-Purin-Qui-Pue (on va l’appeler la TDPQP, parce que ça va plus vite et que les acronymes ça en jette toujours) nous a entendu rigoler sur les machines à pain pour riches et les cafetières Nespresso. Après, Loutre a dit que, quand même, ça serait rigolo d’avoir une yaourtière, rien que pour voir et pour essayer de mettre tout et n’importe quoi dedans. Ce à quoi j’ai répliqué, histoire de surenchérir, qu’en plus je pourrais en faire un billet sur mon blog de fille et que ça ferait sûrement couiner les lectrices attardées. Alors là, TDPQP, elle a débarqué dans la pièce avec un sourire tellement large sur son visage un peu chevalin qu’on aurait dit Roselyne Bachelot qui venait de signer un contrat méga-juteux avec un labo pharmaceutique.

(Tata): – Une yaourtière? En voilà une idée qu’âlle est bonne! V’nez donc vôar, justement j’en â une qui m’sert pus guère depuis la naissance de ta cousine, Loutre!
(Loutre): – Mais Tata…elle a vingt-cinq ans, ma cousine…
(Tata): – Déjà? Mais crénom, oui, c’est ben vrai! Euuuuh d’là, j’espère que t’as pensé à son anniversaire, qu’arrive ma foi à grands pas!
(Moi): – Tata, ce que Loutre veut dire, c’est qu’après vingt-cinq ans, la yaourtière doit être à peu près dans le même état que le sèche-cheveux que Claude François a malencontreusement fait tomber dans son bain en 1978…
(Tata): – Sèche-cheveux, mon cul. A’m'fera point croire ces billevesées pour midinettes, non plus! Un vibromasseur, qu’c'était, parfaitement!
(Moi): – ….
(Loutre): – ….
(Tata): – Bon, c’est pô tout ça, mais j’m'en vâs vous emballer l’objet bien comme y faut, z’allez voâr, c’t'un régal de préparer ses machins bulgares avé le lait de ses bestiaux à soi!

Toujours est-il qu’on a récupéré la yaourtière de Tata.
A’gade, elle a pas pris une ride, on se croirait dans le HLM de mon enfance et on imagine bien le téléviseur Pathé Cinéma posé sur le buffet du salon qui diffuse « L’Académie des Neuf » pendant qu’une carafe remplie de Tang achève de buller sur la table du salon et que des gamins en pantalons pattes d’eph’ braillent que « l’araignée, l’araignée, est tombée dans la purée »…

La fille qui venait de mettre en scène le dernier Marc Dorcel

Ouais, c’est un objet top vintage, fashion et tout, tu peux l’assortir au grille-pain de l’époque (même couleur à vomir, même marque parce que « Seb, c’est bien ») et même aux murs de ta cuisine, pour peu que tu aies envie de remettre les immenses fleurs maronnasse-orangeasse-jaunasse  de la jeunesse de ta maman (la période où toi tu volais les vignettes Panini de tes petites copines ou de tes copains, selon que tu étais fan de Candy ou de Goldorak).

Bon, de notre côté, tu penses bien qu’on a quand même testé la bête entre deux fou-rires très cons.

Alors, comment dire?
On a bien tout fait comme ils disent dans le mode d’emploi (qu’est d’époque tout pareil), mais au bout de 72 heures dans le frigo, ben force est de constater que nos yaourts ressemblent étrangement à des dons généreux et désintéressés stockés dans les armoires réfrigérées d’un Cecos et destinés à des couples infertiles. Limite, quand je me suis dévouée pour en goûter un, j’avais l’impression d’imiter Brigitte Lahaie dans un vieux Marc Dorcel top-rétro (avec les fleurs maronnasse-orangeasse-jaunasse en guise de décor, mmmmm, collector!) et je croyais presque entendre le curé de la paroisse d’à côté hurler « Sale, sale, SALE! » dans mes oreilles pourtant bien chastes (mais en même temps, le curé de la paroisse d’à côté, vu sa tronche quand je le croise à la boulangerie de m’âme Nedelec, je suis pas persuadée qu’il soit bien net, je le vois plutôt bien faire des prêches du genre « Saint, Saint, SEINS est le nom du Seigneur! », tu vois?).

Tout ça pour dire que moi, la yaourtière, j’y touche plus, ou alors pour faire des effets spéciaux d’enfer dans un remake de Parties Fines de l’inoubliable Gérard Kikoïne.
A ce propos, d’ailleurs, on fait un casting pour le projet, si tu aimes le yaourt fait maison, les décors à chier, les dialogues consternants et les pseudonymes mémorables comme « Élise Ebel » ou « Harki Kou », fais-toi connaître sans hésitation, la fortune et la gloire sont peut-être au bout du tunnel chemin.


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