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L’Afrique Enchantée fait son bal

Publié le 08 avril 2010 par Icipalabre

vue-sur-le-bal-de-lafrique-enchantee.1270748040.jpg“Notre Afrique Enchantée” a célébré les Indépendances aux rythmes de la rumba

L’événement a eu lieu samedi 3 avril au Cabaret Sauvage, à Paris.
Et on l’attendait avec impatience, cette «mise en spectacle» d’une émission culte de la bande FM, «L’Afrique Enchantée». 
L’Afrique Enchantée -pour ceux qui ne connaissent pas encore - , c’est une plage ensoleillée dans la grille de programmation de France Inter qui, chaque dimanche à 17h, invite à s’extraire de la brumaille ambiante, quintessençant sans parcimonie le merveilleux corpus des musiques modernes et traditionnelles d’Afrique. 
L’émission a ses fans, et doit d’ailleurs sa «success story» à la fidélité d’auditeurs toujours plus nombreux, autant qu’aux talents et au dynamisme engagé de ses deux animateurs (dits les «Tontons») , Vladimir Cagnolari et  Souleymane Coulibaly dit Soro Solo. «Vraiment formidable», incontournable, L’Afrique Enchantée  comble le vide béant dont le PAF hexagonal s’est doté à force de supputations identitaires et d’indifférences béotiennes face à l’étrange (c’est-à-dire, l’autre, l’étranger),  en proposant de découvrir ou redécouvrir la richesse et la diversité des musiques africaines et caribéennes du XXème siècle, à travers des sujets de société. Une mine d’or pour les amateurs comme pour les spécialistes, car l’émission est «postcastable» , et car elle est devenue un des derniers îlots de résistance face au rouleau-compresseur mondialiste, lieu unique d’une pédagogie raisonnée des ressources culturelles africaines.
A ceux qui l’écoutent, elle fait l’effet d’un déjeuner sur l’herbe en une belle après-midi de printemps, un pique-nique artistique dont les paniers regorgent de chansons mythiques -dont certaines quasi-introuvables - qui viennent illustrer des débats sérieux, les récits et les contes, les interviews, les reportages in situ et les franches rigolades qui s’exposent à l’antenne.



Passant du studio à la scène, l’Afrique Enchantée et ses créateurs ne perdent rien de leur capacité de séduction, et se sont mobilisés avec un professionnalisme et une bonne humeur dont beaucoup d’organisateurs de spectacle plus obsédés par l’atour que par le geste feraient bien de s’inspirer.
Pour cette première donc, toute l’équipe était sur le pont, y compris Laurence Aloir et la «nièce» Hortense affectée au guichet détaxe en début de soirée (!) mais qui, comme beaucoup, n’a pu résister bien longtemps aux rythmes «enjaillés» des célèbres rumbas congolaises que l’orchestre a égrenées pendant plus de deux heures. Car, Vlad et Soro, en effet, ont fait les choses en grand, convoquant un band éclectique, les «Mercenaires de l’Ambiance», composé d’une dizaine de musiciens rompus aux nombreux standards d’une musique africaine ressuscitée par le tumulte des indépendances.
En MC’s décontractés , singeant avec ironie les discours démago des mystagogues en Rolex et autres évangélistes bling bling qui déversent en Afrique une foi revisitée par le pragmatisme américain,  Vlad et Soro ont mis franchement les pieds dans le plat, en dénonçant justement l’une des pires tares du tissu social africain, celle qui crée de toute pièce des cultes sectaires et assassinent impunément les dieux des ancêtres.  Sans doute conscients que sous certaines latitudes, une telle provocation eût été l’objet de vengeresses censures, les deux comparses ont ainsi implicitement rappelé que l’Afrique avait été historiquement capable d’un «grand écart» aberrant, entre les paroles unificatrices des pères de l’anti-colonialisme, tels Patrice Lumumba, et celles de ces nouveaux gourous fossoyeurs de l’Afrique éternelle,  qui poussent à la division et au reniement.

Mais allez, l’usage de la libre expression, si décriée ces derniers jours par les ennemis du rire , ne pouvait être plus opportune que dans cette ambiance de bal populaire où l’on s’est «collé et serré» dans une communion des valeurs essentielles, dans une eucharistie du bon goût et de l’authenticité, dont l’Afrique Enchantée  apparaît, dans la mêlée informe des cultures industrielles contemporaines, comme l’une des dernières puissances tutélaires.

NJ
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Lien vidéo sur You Tube: http://www.youtube.com/watch?v=Q5gyC_7Njqg
Site de l’émission: http://sites.radiofrance.fr/franceinter/em/afriqueenchantee/


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