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Sans tabou:épisode15: Business is business

Publié le 15 juin 2010 par Bella_ragatsa
Sans tabou:épisode15: Business is business
Dans un petit coin du salon, Nader s’était installé, la tête cachée entre les deux bras. Il regardait, avec énervement les aiguilles de l’horloge, et les quelques gouttes d’eau, glissant au dessus de la vitre extérieure de la fenêtre semi ouverte suite à une pluie légère.
Il était 19h15. Plus le temps s’écoulait, plus l’expression d’une abominable colère, se sculptait à travers les traits de son visage.
A 20h20 exactement, la porte de l’appartement s’ouvrit doucement et se renfermait tout doucement comme elle s’était ouverte. Assis dans sa place, il relevait, sa tête, dévoilant un regard hargneux, et ses yeux finissaient par croiser un regard fané, triste de sa femme, qui posait son sac à main sur le sofa juste à côté et sans s’asseoir, s’arrêta face à lui, les bras croisés, le cou tendu et murmura.
- Ah t’es de bonne heure, aujourd’hui.
Sans quitter ses yeux, il répondit entre les dents.
- Ça fait quatre heures que je t’attendais. Et en se mettant debout, où étais tu passée ?
Elle le regarda un petit moment, comme tentant de déchiffrer la cause de son immense colère, puis dit en soupirant.
- Je faisais un petit tour avec Salma.
Il fixa droit dans les yeux sa femme, et laissa un faux sourire voiler ses lèvres puis dit.
- Et où vous êtes allées ?
En secouant ses épaules et enlevant son manteau, elle murmura.
- Au lac, on a fait un café, euh, une petite marche ! avec un regard froid mais mystérieux, on a rencontré un vieil ami, il nous a invités au dîner. Puis, en traçant un sourire persifleur, je pouvais pas refuser, c’est un ami de faculté….
Il s’approcha d’elle jusqu’à ce que ses respirations se mélangent avec les siennes, puis en épousant son regard.
- Cet ami, est-ce un avocat par hasard ?
Comme par magie, son sourire disparaît et puis croisa les bras et dit d’une voix assez tendue.
- Je ne sais pas de quoi tu parles.
- Oh, que si. Dit-il en haussant la voix.
Pâle et immobile comme une statuette, elle reprit.
- Qu’est ce que tu veux Nader ?
- Que tu me dises ce que se passe derrière mon dos ! s’écria-t-il furieux. En mordant sa lèvre inférieure, j’aime pas qu’on me cache des choses.
Là, une crise de rire affolée la hanta jusqu’à verser des pleurs. Puis ce rire, s’atténuait progressivement et laissait place à une tristesse mélangée de rancune.
- Tu veux vraiment que je sois franche avec toi.
Sans clignoter des yeux, il avala de l’air et dit.
- Oui.
Elle prit un long souffle, comme pour neutraliser l’horrible colère qui commençait à se manifester à travers son regard.
- J’étais avec ma belle mère.
Nader fut pris dans un remous brusque, au point de tanguer. Ghada, sans lui laisser le temps de s’expliquer continua.
- C’est une bonne femme. Et en saisissant une cigarette du paquet de Nader posé sur la table basse, je me demande vraiment ce qui pousse un enfant d’être aussi ingrat en délaissant un parent au besoin, tout seul, comme un fugitif politique, dans un exil lointain.
Il s’effondra sur le canapé, baissa la tête et reprit en serrant les poings.
- Ma mère ne m’a jamais aimé.
- Il n’y a pas de mère qui n’aime pas ses enfants.
Il traça un sourire moqueur et dit.
- La mienne en tout cas ne m’a pas aimé.
Il ferma les yeux lentement puis en les rouvrant, fut amené de force d’une avalanche de souvenirs lointains. Il se voyait, à l’âge de 4ans. Debout près d’un berceau en bois. Il tremblait comme une feuille devant le petit corps tout rigide et froid du bébé, qui avait la bouche tachetée de yaourt. La petite cuillère encore dans sa main droite, et le pot à moitié vide dans l’autre main, il suivait, terrifié les yeux fixes de sa petite sœur, orientés vers le plafond.
En tentant de fermer ses yeux, une autre fois, d’autres flashs surgissaient. Il voyait sa mère, criant et pleurant des larmes de cœur. Il voyait aussi son père, ivre mort, qui riait, complètement bourré et inconscient de ce que se passait autour de lui. Il se rappelait les paroles de son père ce jour là, comme si elles étaient prononcées à l’heure venue.
- Tu mérites cela, salope ! et en se tenant à peine en s’agrippant au mur, alors est ce que ça fait mal de la voir morte ?
Sanglotant, en serrant le petit corps de sa fille contre elle, Dalanda hurla.
- Comment tu peux être aussi cruel, c’est ta fille, bordel de merde. Puis les yeux nageant dans les larmes, elle chercha du regard son gamin, encore traumatisé, figé sur le sol. Pourquoi t’as fait ça ?
Nader, les yeux tous rouges balbutia de sa voix d’enfant.
- Elle criait, je croyais qu’elle avait faim. Je voulais la nourrir …
Son père, s’agenouilla pour être à son niveau, lui caressa les cheveux, puis en levant un regard satanique vers son épouse.
- T’inquiète pas ma chérie, elle tiendra compagnie à son tonton !
Puis se fut sauvé de son méditation, par sa femme, qui disait sans le quitter d’un regard rancunier.
- Pourquoi tu m’as menti à son propos ? pourquoi ?
Epris d’une colère indomptable, il se mettait debout à son tour, et l’attrapa très fort de ses bras en criant.
- Parce que j’avais très honte de mon passé ! et en l’injectant d’un regard morose, et parce que si je t’avais raconté toute la vérité, on ne serait jamais mariés !
D’un geste violent, elle débarrassa ses bras, et rajouta en reculant d’un pas.
- C’est quoi cette vérité, qui t’a obsédée au point de mentir au monde entier.
Nader sentit qu’il avait perdu du terrain puis à nouveau, il se fut arraché de son présent. Et se trouvait cette fois-ci, au milieu d’une forêt. Il était assis dans une camionnette, le regard suivant son père avec une pelle , faisant un grand trou dans le sol encore trempé d’eau, sa mère debout prés de son père , développant sa petite fille dans un bout de tissu, l’embrassant sur son front, puis voyait son père, qui arrachait l’enfant des bras de sa maman, et la mettait doucement dans le trou. Par la suite, il essuya la sueur accumulée sur son visage, et traça un sourire d’un psychopathe en disant.
- Hey, frérot j’ai un cadeau pour toi. Puis en laissant un faible rire l’emporter, tu ne seras plus désormais seul. Et en reculant de deux pas, j’ai un grand cœur, malgré que tu aies trahi ton grand frère !
Puis en pointant du doigt son fils.
- Il est venu te dire bonjour ! et en criant, hey, petit, viens dire bonjour à tonton. Et en regardant sa femme avec mépris, viens qu’il regarde à quel point tu lui ressemble.
- Ça suffit, s’il te plaît ! s’écria sa femme en sanglotant.
- Ferme la, salope, ok ?
Puis suivait son père, jetant la pelle et se dirigeant vers lui en ouvrant la porte de la camionnette et en le portant dans ses bras.
- Allez viens mon petit bonhomme.
Et se faisait à nouveau secoué de son passé, par Ghada qui criait en enrageant davantage.
- Tu vas parler ou pas ?
Il avala avec difficulté sa salive et dit d’un ton amer.
- Ma mère ne m’aimait pas car j’ai tué accidentellement ma petite sœur, et sans oser lever les yeux, mais surtout parce que j’étais la cause de son malheur depuis ma venue au monde.
Ghada, surprise, ne proférait le moindre mot, alors il poursuivait.
- J’étais le fils de mon oncle paternel, le petit frère de mon père. Puis en traçant un sourire suave, ma mère avait une petite liaison avec mon oncle, et quand mon père l’a découvert, il a tué son petit frère.
Après un silence hostile, Nader continua.
- C’était suffisant pour atténuer sa souffrance, mais n’a pas cessé de se venger de moi et de ma mère. Il la tapait tout le temps, la violait, et en retenant des pleurs, il me tapait aussi et abusait de moi sexuellement. Je n’ai pas vécue une enfance mais un vrai enfer !
Il resta un long moment sans redresser la tête, puis quand il la releva, il dévisagea son épouse, incapable de parler du poids de la surprise, et continua.
- Quand ma mère ne pouvait plus supporter l’enfer dans lequel elle vivait, elle l’a balancé aux flics et il était condamné à perpétuité, pour meurtre volontaire.
Et en laissant un soupire triste sauter de ses lèvres.
- Après cela, j’ai passé une année ou deux avec ma mère puis elle m’a confié à sa sœur. Je me rappelle de ses paroles très bien, elle lui a dit qu’elle ne pouvait plus vivre à mes côtés, que je lui rappelai le monstre qui la torturait et que j’étais la chose la plus douloureuse qui lui soit venu dans sa vie !
Puis en cherchant la main de son épouse.
- Tu ne peux savoir à quel point j’étais malheureux, enfant !
Ghada, relâcha sa main violemment et dit en reculant en arrière.
- T’aurais dû me raconter cela dés le départ !
Il lui coupa la parole, en cherchant à croiser son regard.
- Maintenant tu sais tout, alors on peut tourner la page !
Elle saisissait son sac à main, puis en affrontant son regard, avec tant de colère.
- Maintenant, il est tard ! et en saisissant ses clés de voiture et son manteau de l’autre main, je ne peux plus vivre avec toi.
Il courut vers elle et dit, en la tenant agressivement par le bras.
- Où vas-tu ?
Comme si elle avait deviné ses pensées, Ghada lui fit face et dit.
- Je ne m'en vais pas pour voir l’avocat ! et en souriant, je rentre chez mes parents, et en débarrassant son bras, mais demain, j’irai voir l’avocat de famille, pour commencer la procédure de divorce !

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