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(4) Le dilemme des contes de fées

Publié le 15 juillet 2010 par Luisagallerini

L'énigme, rédigée plus d'un siècle auparavant, l'avait sans doute été dans l'espoir d'être déchiffrée bien plus tôt. Rien n'assurait Marie que l'"écrit" n'avait pas été déplacé, que personne ne l'avait découvert par hasard. Peut-être aussi n'était-il tout simplement plus accessible. Mais s'il n'était pas trop tard, et que le destin, par quelque fantaisie, l'avait désignée, elle parmi tant d'autres, elle ne pouvait pas ignorer les instructions de l' amulette. Si elle choisissait aujourd'hui de ne pas donner suite à sa découverte, elle le regretterait certainement, même s'il y avait peu de chance pour cette énigme menât à un quelconque trésor. Ce fut ainsi que la curiosité l'emporta sur la raison qui, depuis son plus jeune âge, lui serinait pourtant de ne pas croire aux contes de fées.


Un second dilemme s'imposa alors à elle : devait-elle dire à Philippe qu'elle avait résolue l'énigme et qu'elle partait à Londres ? Ne souhaitant partager avec qui que ce fût ni le mystérieux "écrit", s'il existait, ni l'aventure que le hasard lui avait confiée, elle n'avait nullement envie de partir avec lui. Or il risquait d'émettre le souhait de l'accompagner. Sachant qu'elle n'aurait pas le courage de lui refuser cette faveur, elle opta pour la politique de l'autruche. Elle prendrait de ses nouvelles à son retour, puisqu'elle ne partait que deux jours, et que son déplacement se solderait sans doute par un échec. C'était, de sa part, une décision purement égoïste, même si elle pouvait se prévaloir d'un argument irréfutable, puisque Philippe lui avait recommandé de garder ses distances, tant pour elle que pour lui.

Après avoir réservé un aller-retour Paris-Londres, avec un départ le lendemain matin et un retour le soir du surlendemain, elle prépara fiévreusement son sac : une pile de livres, quelques vêtements de rechange, un appareil photo, une pièce d'identité, des affaires de toilette. Elle fit d'un ticket de carte bancaire un pense-bête pour ne pas oublier de changer de l'argent à la gare, puis réserva un hôtel dans le quartier de Bloomsbury, sur les conseils avisés d'un guide touristique, " Crapahuter pour moins que rien ".

L'angoisse, qui imprimait d'étranges reliefs dans les rideaux, la tourmentait toujours lorsqu'elle se coucha, en fin d'après-midi. Elle tendait l'oreille au moindre froissement, s'attendant à tout moment à voir surgir dans son appartement un régiment de conservateurs du Louvre, avec à sa tête l'effroyable Madame Peignot. Elle devinait sans peine l'expression à la fois démoniaque et radieuse qui embraserait son visage, et le plaisir qu'elle prendrait à la supplicier pour lui arracher son secret, par Dieu seul savait quels moyens.

Dans le prochain épisode, vous saurez si crapahuter pour pas une cacahuète est un vrai bon plan !

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