Magazine Journal intime

Cap sur paradis… (épisode 4)

Publié le 22 juillet 2010 par Anaïs Valente

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Quatrième épisode du mini-roman chick lit écrit par bibi et paru dans le Summer Flair 2009 (un an déjà, que le Tampax vite hein ma bonne Dame).  Publié avec l’aimable autorisation de l’équipe de Flair, afin que vous, mes lectrices de pas la Gelbique, puissiez enfin en profiter… Keskon dit ?  Merci Flair.  A suivre durant six semaines sur ce blog…  Bonne lecture.

Dans Flair du mercredi 11/8 au mardi 17/8 : nuit d’hôtel + activité (thalasso, resto, parcours Durbuy Aventures, etc.) à 50 €

L’après-midi se déroule calmement, entre sieste, lecture et plongeons dans la piscine et les jacuzzis.  Renaud ne quitte son poste de surveillance qu’en fin de journée, pour s’asseoir nonchalamment sur le transat vide qui jouxte le mien.  Sans un mot, sans un regard.  Ce type est décidément bien étrange.  Un long silence s’installe entre nous.  Dans un élan de bêtise absolue dont j’ai le secret, je le brise en lançant :

« Je rêve, où vous m’espionnez depuis ce matin ? »

« Moi ?  Vous espionner ?  Mais pourquoi devrais-je vous espionner ?  Je me contente d’admirer le spectacle, chère… euh, je ne connais même pas votre prénom… »

« … Chloé. »

« … chère Chloé, et j’avoue qu’il est joli, le spectacle.   Il m’amuse beaucoup.  Au fait, avez-vous déjà choisi votre proie du jour … ou de la nuit ? »

Je me lance alors dans une tirade digne de celle de Cyrano, expliquant en long et en large les raisons qui m’ont fait m’inscrire à cette croisière (une véritable envie d’amour et non d’une simple partie de jambes en l’air, même si les deux ne sont pas incompatibles), les regrets que j’ai immédiatement eus (car l’amour ne se cherche pas, il se trouve et surgit toujours quand on ne s’y attend pas, même si moi je m’y attends en permanence, en grande romantique que je suis) et le fait que j’ai trouvé quelques personnes bien sympathiques dans le groupe même si pour l’amour vrai tout espoir est perdu (mais pourquoi je lui raconte tout ça, m’enfin).  Je conclus en lui criant presque au visage que je ferais mieux de me taire vu qu’il est journaliste et que, c’est bien connu, tous les journalistes sont perfides, curieux et irrespectueux des confidences qui leur sont faites.  En m’entendant parler, je me fais l’effet d’être Elliot le dragon lorsque ses naseaux n’en peuvent plus de colère.

Mes propos ont fait mouche.  Renaud ne rit plus.  Ses yeux ne rient plus.  Il n’a plus ces petites rides au coin des yeux que j’avais admirées la veille.  Son regard est triste et étonné à la fois.  Il se lève et me dit doucement :

« Je plaisantais en parlant de ‘proie’, j’ai bien compris que vous n’étiez pas de ce genre-là, et je voulais juste faire un peu mieux connaissance avec vous.  Tout bêtement.  Je pense qu’il vaut mieux en rester là, vu l’opinion que vous avez de moi. Dommage, vraiment dommage…»

D’un dernier « bonne soirée » plus sec qu’un whisky sans glace, il déguerpit, tandis que je me mords les doigts jusqu’au moignon de l’avoir fait fuir de la sorte.  Tchu, Chloé, tu n’en rates jamais une : te voilà embarquée sur une croisière pour célibataires qui t’a coûté les yeux de la caboche, et tout ce que tu trouves à faire c’est aider un couple à se former, allumer un olibrius à QI de poulet et être odieuse avec un… un… un Renaud !  Bravo ma fille, va te coucher, ça vaudra mieux.

Sans passer par la case « repas du soir en compagnie de neuf célibataires » ou « slow langoureux en discothèque », je fonce dans ma cabine et je m’endors, encore sous l’effet de ma bêtise absolue.  Dans mes rêves, Renaud m’embrasse passionnément, puis se met à rire de façon démoniaque avant de se transformer en Fredo, qui, nu comme un ver, me tend une manne de chemises à lui repasser.  Au secours, je veux rentrer chez moi…

lundi

Je suis de bonne bonne bonne bonne humeur ce matin : nous allons quitter le bateau durant plusieurs heures pour une promenade à dos d’âne sur Santorin, superbe petite île.  Le paysage est digne d’une carte postale et toutes ces petites maisons blanches et bleues me donnent une folle envie de déserter définitivement le paquebot pour finir mes jours à me nourrir de poisson et de tsatsiki, le tout arrosé de retsina ou d’ouzo.

Lauranne me rappelle immédiatement à l’ordre, en m’annonçant que j’aurai le privilège d’effectuer la balade en compagnie de Marc, qui n’a malheureusement pas quitté son air lubrique de la veille.  Ma petite robe bleu azur qui ne cache rien de mes formes n’arrange nullement les choses.  Si j’avais évité de l’allumer de façon si éhontée hier dans le jacuzzi, je n’en serais pas là.

L’arrivée des ânes détourne son attention de moi, et chacun prend possession de sa monture pour un tour de l’île somme toute bien agréable.  Marc n’est pas un bon cavalier et, comme tout homme qui se respecte, il est incapable de faire deux choses à la fois.  Se concentrer sur son âne l’empêche donc de me parler.  Je suis au paradis.  Le paysage est sublime, la mer est d’un bleu que la Belgique ne connaîtra jamais et le soleil est seul au monde : pas le moindre petit nuage moutonneux pour gâcher mon plaisir.  Je me surprends à admirer mes longues jambes, qui commencent enfin à être dorées comme un croissant dominical.  Je me sens belle, je me sens jeune, je me sens prête à aimer.  Un regard vers Marc, qui dévorerait bien, pour sûr, mes gambettes-croissants, me fait instantanément retomber sur terre : aimer oui, mais pas n’importe qui.

Vers midi, je retrouve mes compagnons pour un pique-nique sous l’ombre d’un olivier.  Tandis que nos ânes gouttent à un repos bien mérité, nous dévorons une salade fraîche à la feta et des baklavas, avant de nous adonner à une petite sieste, interrompue par Lauranne, qui nous propose une partie de … cache-cache.  J’ai d’un coup la vague impression d’être en colonie de vacances, et je déteste ça.  Je me prête cependant au jeu et, tandis que les hommes comptent jusque cent, je trouve refuge derrière une petite chapelle bleue et blanche, sur le  perron duquel quelques chats faméliques se prélassent.  Mon attente n’est pas longue, puisque Fredo me retrouve rapidement.  S’assurant que personne ne nous voit, et semblant n’avoir toujours rien compris à mon « silence qui en dit long » de la veille, il s’exclame « enfin seuls ma Chloé, j’ai pensé à ça toute la nuit, j’ai pensé à toi toute la nuit. »  En une fraction de seconde, il est près de moi et, m’enlaçant brusquement, tente de m’ôter ma robe, pressant ses lèvres sur les miennes en un geste bestial.  Je le repousse brutalement et lui réplique « écoute Fredo, je n’ai pas été suffisamment claire hier, apparemment : je ne suis pas intéressée par une partie de jambes en l’air avec toi, ni aujourd’hui ni jamais ».  Libido en extase et cervelle en berne, il prend ma réticence pour un encouragement et tente de glisser sa grosse patte velue sous mon maillot.  Réalisant que je suis seule avec lui, je prends peur et, le repoussant d’une main, je le gifle de l’autre.  Eberlué, il me regarde et balbutie quelques « mais, mais, mais ? », tandis qu’après lui avoir crié « j’espère que maintenant je suis claire, espèce de goujat », je m’enfuis en courant et je rejoins mes compagnons afin de poursuivre la balade en compagnie de Marc et de nos ânes.  Je signale néanmoins l’incident à Lauranne et, lorsque Fredo nous rejoint, la joue portant encore la trace de ma main droite, cette dernière le prend à part pour une mise au point bien nécessaire.  On n’est pas des bœufs, tout de même !

(Suite mercredi prochain)


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