Magazine Journal intime

Récits professionnels.

Publié le 02 avril 2007 par Atlas

Encore sur le goût de mes premières rencontres dans le goulag de mes employeurs, je ne retiens rien de ce savoir aux nouveaux stagiaires, j’en fais une manière de faire connaissance. Comme eux, je couvrais mes intérêts par cette complicité anticipée avec ceux qui me l’avaient passé pour en faire mon pain. Ils m’enseignèrent avant les techniques qu’ « ils font semblant de nous payer, et nous faisons semblant de travailler ». J’en avais si bien ri. La ruine se promettait à mes fragiles principes.
En réalité, il a fallu attendre voir passer toute la période d’essai pour objectiver, quoi que maladroitement, ce moule qui me faisait chaque jour. En me prenant brutalement dans sa ponctualité, il s’aliéna aussi mes espoirs, ma naïveté et mon honnêteté. Je venais, de ma part, le fourrer de mes malheurs moi aussi.

Quand, enthousiaste, j’avais rapidement fermé une vanne dans l’une de nos unités industrielles, quelqu’un m’avait emmené dans une salle où il me fis lire dans un cahier de consignes la remarque suivante : « Vanne 00… en cours d’ouverture ». Il s’agissait du même dispositif bien sûr, et la consigne était en passation à l’ouvrier de relève. Mon rire avait éclaté quand je su que le monsieur s’en était chargé quatre heures auparavant. Asséné de plusieurs réalités de la sorte, j’ai gagné le rythme. Mon post se perçait de plus en plus d’histoires aussi drôles qu’incroyables, et traversant ma hiérarchie complice. La danse prêtait goût. Il était connu de sa spontanéité ce Hadj qui me légua ses manières pour répondre aux supérieurs en cas de surprise, lui que l’un de ces patrons l’avait brusqué allongé pendant les heures du travail. Il lui avait demandé gentiment qui était-il pour ironiser son grade de Chef Matériel à la manière de: « ai-je l’air d’une brouette ? ». Sa carrière avait fini bourrée de courage et de sanctions. Quel honneur ! Les sanctions sont, pour l’information, cette tache ineffaçable qu’un dossier ne doit en être atteint, quitte à calomnier son confrère afin de l’éviter. Cela s’inscrivait dans une tactique polyvalente ; l’un des agents les plus réguliers de ma station était très envié la dessus, tellement on n’avait trouvé de moyen pour l’entacher, on lui avait siphonné son lait caillé d’en dedans son caisson fermé à cadenas, rien que pour le voir refuser de prolonger ses heures de service, se taxant ainsi d’un sursis, ou obligé de travailler à jeûne. La scène était propre ! 
Ce microcosme d’aliénation et de décadence m’impressionne encore. Plus disposé à me faire un de ses victimes, je goûte de ses charmes lucratifs. La démocratie en désordre qui s’y est hissé dernièrement ne promet que de le bannir. Accro de ses rumeurs, de ses croyances, de ses souffrances et de ses au revoir, je ne m’en conçois pas guéris. Le travail y a  goût!  

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