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Lettre de licenciement d’un chef d’établissement privé : le « retrait d’agrément » est un motif imprécis

Publié le 24 janvier 2011 par Veille-Education

Retrait d’agrément par une autorité de tutelle
L’affaire, anecdotique, concerne une salariée directrice d’un établissement d’enseignement catholique, qui avait fait l’objet d’un retrait de son agrément pour occuper un tel poste, sur décision de l’autorité de tutelle (le conseil de tutelle du diocèse de Reims). En application du « statut du chef d’établissement du second degré de l’enseignement catholique », la direction d’un tel établissement est en effet subordonnée à un agrément personnel, susceptible d’être retiré « lorsque le chef d’établissement s’est abstenu d’accomplir sa mission de manière avérée et habituelle ». Ce qui entraîne l’obligation statutaire pour l’employeur de licencier l’intéressé. Dans les faits, l’employeur (l’organisme de gestion des établissements catholiques) avait licencié la salariée par une lettre ainsi libellée : « Le motif de votre licenciement est lié au retrait d’agrément de votre poste de direction du collège, prononcé par le conseil de tutelle du diocèse de Reims ». Le simple visa, dans la lettre de licenciement, du retrait d’agrément était-il suffisant ? L’employeur estimait que tel était le cas, puisque les dispositions statutaires imposaient un licenciement dans cette hypothèse.
Respect des dispositions impératives du Code du travail
Motif imprécis, a, au contraire, estimé la Cour de cassation. La lettre de licenciement, qui se borne à évoquer « le retrait d’agrément » sans préciser les faits à l’origine de ce retrait, n’est pas motivée.
La mention du retrait d’agrément ne suffit pas en elle-même à motiver le licenciement. Elle doit absolument être accompagnée de l’énoncé des faits précis qui en sont à l’origine (mauvaise gestion de l’établissement, insuffisances, etc.). Ces faits doivent figurer noir sur blanc dans la lettre de licenciement, de façon notamment à ce que, en cas de litige, le juge puisse vérifier la réalité et la consistance des griefs et s’assurer, conformément à ce que prévoit l’article L. 1235-1 du Code du travail, de la légitimité de la rupture. Cette solution n’a rien de surprenant et s’inscrit dans une jurisprudence constante exigeant que les griefs énoncés soient précis, objectifs et vérifiables (Cass. soc., 23 mai 2000, n° 98-40.635).
Peu importe que ces griefs aient été préalablement portés à la connaissance du salarié et débattus dans le cadre d’une procédure conventionnelle ou statutaire à laquelle la lettre ferait référence. L’arrêt précise en effet que « des dispositions contractuelles, conventionnelles ou statutaires ne peuvent ni dispenser l’employeur d’énoncer les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement ni priver le juge de l’appréciation de la cause réelle et sérieuse de licenciement ».
Sur la base de ce même principe, la chambre sociale avait déjà affirmé que, même si un accord collectif autorise l’employeur à licencier un salarié en invoquant un certain motif, les juges pourront néanmoins considérer que ce motif ne constitue pas une cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 13 octobre 2004, n° 02-45.285).
Cass. soc., 12 janvier 2011, n° 09-41.904 FS-PB
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