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L'incroyable destin de Clarisse Manzon(11)

Publié le 25 janvier 2011 par Mazet

Episode 11 : L'étrange comportement  de Jausion l'usurier.

Clarisse venait de refermer la porte et nous nous apprêtions à retourner dans la cuisine terminer notre bol de café, lorsque le docteur Audouy fit son entrée. Essoufflé, comme un vieillard, il avait sans doute marché d'un bon pas. Sans attendre l'invitation, il prit place autour de la table.

   - Que vous arrive-t-il cher ami?

   - Regardez par vous-même, le libelle qui circule publiquement dans tout Rodez, ce matin.

Ses mains tremblaient quand il déplia les quelques feuillets anonymes, bien entendu, et intitulés :

« Histoire de l'horrible assassinat commis sur la personnes de  M. Fualdès, par Bastide et Jausion, ses parents et amis. » Je lançais au libraire, un regard interrogateur.

   - Excusez-moi, Gilbert, j'oubliais que vous ne connaissiez pas Rodez.

Le docteur Audouy s'interposa.

   - La réputation de Jausion a, sans nulle doute, atteint Villefranche-de-Rouergue.

   - Ce nom m'évoque quelque chose, il travaillait dans la finance me semble-t-il?

   - En effet, c'est sans doute l'homme le plus riche et le moins aimé de Rodez. Ses parents n'étaient pas sans fortune puisqu'il est né au château de l'Esclauzade. Mais, c'est bien lui qui a construit une fortune immense grâce à sa profession d'agent de change.

   - Qu'a-t-il à voir avec Me Fualdès.

Ce fut Blaise qui répondit

   - Il a épousé Victoire Bastide, la sœur de Bastide-Grammont. Mais la rumeur publique leurs attribue des liens d'une autre nature. Une sorte de secret que Fualdès détiendrait à l'égard de Jausion. Mais ce n'est pas à l'honneur des deux personnages.

   - Blaise, vous m'en dites trop ou pas assez, pour comprendre une affaire criminelle, on ne garde aucune chose secrète.

   - C'est une histoire qui n'est guère à l'honneur des deux hommes. Jausion a mis enceinte Marie Fraisse, la femme d'un drapier. L'époux aurait peut-être le grand-père de la belle. Cette Marie Fraisse avait été novice, quelques années auparavant. Mais brûlant déjà d'amour pour Jausion, elle avait renoncé à ses vœux. Voyant que l'agent de change n'était guère pressé de l'épouser, elle se rabat sur le vieux marchand de draps, mais continue son coupable trafic avec Jausion. Un jour, elle découvre qu'elle est enceinte. Le drapier cacochyme était, à coup sûr, incapable d'accomplir un tel exploit. Pour cacher l'état de sa maitresse, Jausion stipendie un médecin. Il diagnostique de l'hydropisie et ordonne à Marie Fraisse de garder la chambre.

- Le drapier n'a jamais essayé d'entrer la chambre.

   - A croire que non! Il a appris que sa femme était enceinte, lorsqu'elle a accouché à cause des cris de douleurs.

Le docteur Aubuy ajouta.

   - C'est à ce moment-là que Jausion aurait dit à une servante « Emporte vite l'enfant et fais-le disparaitre ». Il paraît qu'elle l'a jeté dans une fosse d'aisance.

   - L'affaire s'est arrêtée là?

   - Que nenni mon brave, la police s'est en mêlée. Plusieurs personnes ont été arrêtées. Bizarrement Jausion n'a fait l’objet d'aucune poursuite. C'est là qu'intervient l'infâme rumeur. Ce serait Fualdès, qui aurait protégé Jausion et la servante.

 Blaisse ajouta,

   - Tout ceci serait vraisemblable si Fualdès avait été procureur à l'époque, mais il ne l'est devenu qu'en 1811, alors que le procès a eu lieu en 1809.

   - Et qu'est devenue Marie Fraisse.

   - Le juge l'a épargnée, mais elle a sombré dans la folie.

La suite des feuillets anonymes donnait une explication simple au crime. Fualdès est à court de liquidité. Il demande du crédit à Jausion, refus de ce dernier. L'ancien procureur menace de dévoiler à la justice le rôle de Jausion dans l'infanticide. Pris de panique, il organise le meurtre de son ami avec l'aide de l'équipe Bancal. 

   - Donc on se trouve face à une nouvelle rumeur totalement farfelue.

   - Oui, même si Jausion est un personnage peu ragoutant, il n'avait aucune raison de s'en prendre à Fualdès qui lui devait soixante-dix mille francs.

Dans la suite du libelle, on parlait d'un vol avec effraction qu'aurait commis Jausion dans la maison de Fualdès.

   - C'est parfaitement stupide, poursuivit Blaise. Il était deux fois plus riche que la victime.

   - Quand la terreur prend le dessus, il est impossible d'opposer le moindre raisonnement. Une chape de peur s'est abattue sur notre ville.

Je pris le parti d'aller faire un tour place de la cité. Je me rendis vite compte que mon libraire connaissait bien sa ville, lorsque j'entendis deux hommes, qui paraissaient sains d'esprit, parler de l'affaire.

   - Tu sais que Jausion est dans le coup.

   - Oui, il aurait même dit à sa servante : « Victoire, nous sommes perdus, le cadavre surnage »


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