Magazine Poésie

Histoire d'une guitare romantique

Publié le 23 janvier 2008 par Elisabeth Leroy

Jean Nicolas GROBERT, luthier formé à Mirecourt (petite ville des Vosges), avait fait son apprentissage en réparant et en construisant des instruments : violons, altos, violoncelles. Mais il s'était vite intéressé à la construction des guitares, un instrument qui, en ce début du 19 ème siècle, connaissait une vogue inédite.

GROBERT était devenu un expert dans la construction de ces instruments à l'équilibre fragile.

La guitare que le luthier construisait ce jour là dans son atelier parisien au début des années 1830 retenait la courbe sensuelle des belles romantiques chères à Lupot.

GROBERT finit sa guitare en apposant sur le bloc du talon et sur un des barrages une parque au fer indiquant "Grobert à Paris".

Parmi les compositeurs qui s'intéressaient à la guitare à cette époque, on comptait PAGANINI, qui avait composé un fameux : "Cantabile pour violon et guitare", ainsi qu'Hector BERLIOZ qui avait débuté sur l'instrument dès 1819 lorsque son père lui avait offert sa première guitare. Il étudia avec DORANTET et composa vite ses premières oeuvres.

Peu de temps après que GROBERT eut achevé la construction de cette guitare, le 09.12.1832, PAGANINI fit la connaissance de BERLIOZ.

Les deux hommes se virent à plusieurs reprises au fil des années, évoquant des collaborations possibles sur diverses oeuvres et partageant par de multiples anecdotes leur passion commune pour la guitare dont ils jouaient tous les deux avec talent.

En 1838, PAGANINI était à nouveau à Paris mais n'avait pas emporté de guitare. Celle de GROBERT se trouvait dans l'échoppe d'un luthier, J. B. VILLAUME, négociant en violons et divers autres instruments qui ne se fit pas prier longtemps pour lui laisser la guitare. PAGANINI alla écouter BERLIOZ qui dirigeait sa "Symphonie fantastique" et il fut bouleversé au point qu'il s'agenouilla devant le jeune maître et lui baisa les mains.

Les deux hommes se retrouvèrent lors d'une soirée musicale chez un médecin parisien. BERLIOZ raconte ce concert privé comme il s'en produisait souvent à cette époque dans les résidences cossues des capitales européennes : "Avec pour partenaire Monsieur SINA, PAGANINI joua de la guitare ... et tira de cet instrument des effets inouis".

PAGANINI était pourtant au plus mal, souffrant d'un cancer du larynx. PAGANINI fit don de 20 000 francs à BERLIOZ qui permit au compositeur de consacrer l'essentiel de son temps à la composition de "Roméo et Juliette" qui fut achevée peu de temps après. L'oeuvre fut dédiée à PAGANINI qui mourut l'année suivante sans avoir entendu la symphonie.

VUILLAUME offrit la guitare à BERLIOZ qui, à son tour, en fit don au Musée Instrumental du Conservatoire de PARIS en 1866.

Trois ans plus tard, BERLIOZ s'éteignait à son domicile parisien. Quelques semaines plus tard, GROBERT mourrait à son tour.

Quant à la guitare, elle figure désormais dans les collections de la Cité de la Musique. Elle y fut jouée à plusieurs reprises en concert, notamment par Alberto PONCE et elle y sera à nouveau présentée au public au printemps 2008.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Elisabeth Leroy 1160 partages Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines