Magazine Journal intime

Les phrases qui tuent (le retour)

Publié le 15 février 2011 par Anaïs Valente

J'ai publié un billet "les phrases qui tuent", il y a bien longtemps déjà, genre en 2007... enfin, c'était paru dans 7Dimanche.

"Les phrases qui tuent

On y passe tous un jour. Comment ça, pas vous ? Vous ne perdez rien pour attendre. Elles vous guettent au coin d’une bouche : les phrases qui tuent. L’air de rien. Ni vues ni connues. Elles s’immiscent au détour d’une conversation anodine. On ne les attend pas. On les prend en pleine poire. Au départ on dirait presque un compliment, mais la chute est lourde, très lourde. Souvent, on est tellement éberlués qu’on ne trouve rien à répondre. On reste paf (paf la célibattante, paf l’écrivaine en herbe, paf le thon, pas l’amoureuse), bouche bée, yeux tremblants, mains grandes ouverte (ou l’inverse). Et on les ressasse, des mois, des années durant. Je dis « on », mais je pense « je ». La flemme de remplacer ces « on » par des « je » et surtout d’accorder les verbes, vous me pardonnez ?

Bien sûr, y’a les phrases qui tuent les célibattantes : « alors, toujours célibataire ? Oui ! Mais tu t’envoies en l’air parfois, tout de même ? », « Quand est-ce que tu nous présentes enfin ton petit copain ? »

Y’a également les phrases qui tuent les amoureuses : « T’as un joli décolleté, mais je trouve que tu devrais faire du banc solaire », « Ouf, mini mini la jupe, dommage que tes jambes ne soient pas parfaites », « Viens dans mes bras mon cœur, aaaargh, t’as pas un peu forci ces derniers temps ? »

Ensuite y’a les phrases qui tuent les écrivaines en herbe : « J’ai lu ton dernier billet d’humeur, ben t’écris bien quand même, finalement ! », « T’as vraiment des lecteurs dans 7dimanche ? »

Enfin y’a les phrases qui tuent les thons « Meuh non t’es pas moche, mais la fille là-bas, par contre, elle, elle est super jolie tu trouves pas », « Pas mal ta nouvelle coiffure, ça change de la coupe informe que tu arbores depuis vingt ans »…

A l’avenir, avant de prononcer une phrase qui tue, tournez-la sept fois entre vos neurones.

Add. du 30/5 : nouvelle phrase qui tue "Anaïs, n'essaie pas de rentrer dans la voiture, elle est trop près du mur, même si tu étais mince tu n'y arriverais pas"... »

Ce qu'il y a de super cool atroce démentiellement abominable, avec les phrases qui tuent, c'est qu'elles sont comme les mots clés, comme les boutons, comme les tablettes de chocolat blanc au spéculoos et comme la cellulite : quant y'en a plus, y'en a encoooore... elles ne disparaissent jamais, les phrases qui tuent.  Petit florilège de phrases qui tuent bien lourdes bien récentes :

D'une (ex) amie : "Oooh, dingue, sous cet angle-là tu ressembles vraiment à Balasko". (Euh, et à Claudia Chou Fleur ? Non ? Vraiment pas ?)

D'une vendeuse, alors que je fais du shopping avec Mostek, dix ans de moins au compteur : "Vous payez déjà ou vous attendez votre fille ?" (Qui a une kalachnikov à me prêter ?)

D'une autre (ex) amie : "t'as envoyé un manuscrit à un éditeur ?  T'y crois vraiment alors ?" (Euh, et ma main dans ta gu..., tu veux y croire ?)

D’une collègue, de l’air dédaigneux du chat à qui on propose un vieux morceau de poisson pas frais « oh, il est rose, ton nouvel appareil photo… ça fait barbie » (d’abord c’est pas rose, c’est fuchsia).

D'une (future ex) voisine (mais j'aime pô les déménagements) : "Anaïs, j'ai bien pensé à toi, j'ai acheté un superbe petit érable pourpre, pour pas cher en plus, tu sais, comme celui que tu avais, qui a crevé à cause du gel.  Quel dommage hein, il était siiiii beau". (Euh, vivement les prochaines gelées, qu'elles soient fortes et loooongues)

D'une amie, toujours le mot pour rire, quand je lui dis "Dans ce magasin, je m'habille en M", "Aaaaaaah ouiiiiiii ?", d'une voix incroyablement étonnée (bon, ben la Kalachnikov, ça sera du double usage, tant qu'à faire).

De la même (future ex) voisine : "Tiens, me suis offert un joli nénuphar, c'est chouette hein, ça me rappelle quand le tien fleurissait, que c'était joli, vraiment dommage qu'il ne fleurisse plus depuis deux ans". (La mort aux rats, ça tue les fleurs de nénuphars ? Juste pour info hein…)

D'une collègue : "Oh, ton nouveau petit gilet, c'est mauve Milka" (Euh, tu me traites de vache, là ?)

D'une future ex amie : "j'ai un moment pensé à t'inviter à venir manger pour ton anniversaire, vu qu'on n'avait rien de prévu, mais finalement non".

 D’un futur ex pote : "Coucou ça va ? Quoi de neuf ?  Oui, bon, ça fait onze mois que je t’ai pas donné de news, mais tu vas pas te formaliser hein.  Moi, du neuf ?  Oh rien, je me suis juste fait larguer" (Ben voyons, alors on rappelle sa bonne vieille potesse consolatrice dont on n’a pas besoin quand on nage dans le bonheur, ben va faire ta brasse ailleurs).

D'une autre collègue (elles m'en veulent toutes ou quoi ?), "ça va pas Anaïs, t'es vraiment soufflée en ce moment", "ouiii, ça va, j'ai pris deux kilos, je sais hein, on va pas en faire un fromage, même si je suis habillée en mauve Milka".

D’une collègue (je vous le dis, y'a une coalition contre moi), quand je fantasme sur un chanteur brun ténébreux plus jeune que moi « il est plus jeune ! », « oui, ben c’est juste pour fantasmer », « oui, mais trop jeune pour toi, même pour fantasmer » (c’est quelle loi qui empêche de fantasmer sur un plus jeune, voire de passer à l’acte avec lui hein ?)

De ma mère : "Si j'avais su, j'aurais pas eu de mômes." (Euh, et ben moi, si j'avais su, j'aurais pas eu de mère...)

D'un pote : "Tu m'as l'air en forme en ce moment... pas comme y'a quelques semaines, quand tu étais blafarde et déprimée, que tu paraissais dix ans de plus...", (t'as raison, ma main droite aussi est en forme, tu veux une preuve ?)


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