Etre mère

Parfois, il y a quelques années, le soir, à l'époque où mon coeur s'emballait pour un rien, l'angoisse se réveillait et me tenaillait : "Et si je mourrais dans mon sommeil. Il n'y aurait personne pour s'occuper de P'tite Louloute... Saurait-elle gérer la découverte et les premiers moments, seule à 4 ou 5 ans ?"
De ce jour-là, je lui ai appris à se servir du téléphone et ai enregistré les numéros de la famille et de la police et je lui ai appris son adresse... l'air de rien.
Cette nuit, ça m'est arrivé de nouveau pour la première fois depuis très longtemps...
Je me suis répété alors tout ce que je lui ai appris "pour le cas où tu aurais besoin..."
Et puis, j'ai réalisé...
Combien de mères nippones ont pu sauver leurs enfants et combien sont mortes en laissant leurs enfants sans avoir eu le temps de leur apprendre toutes ces petites choses ?
Combien de mères égyptiennes, tunisiennes, libyennes, ivoiriennes ou algériennes ont pu penser, en mettant leurs enfants au monde, qu'un jour ils partiraient se faire tuer pour la liberté de leur pays ?
Combien de mères afghanes, iraniennes ou yéménites ont cru pouvoir élever leurs filles sans crainte qu'elles ne soient "que" des filles ?
J'ai de la chance, mes angoisses, pour l'instant, ne se limitent qu'à "et si je meurs dans mon sommeil"...
Comment font toutes ces mères pour accepter tant de douleurs et tant d'angoisses ?
Ce billet ne sert à rien. Il n'appelle même pas de réponse aux questions car je crois qu'il n'y en a pas.
Juste une angoisse du fond de la nuit et le regard qui se porte sur d'autres mères...
Une façon aussi d'effleurer l'actualité...
Un billet écrit à l'heure où j'ai juste à traverser le couloir pour aller écouter le sommeil paisible de ma fille qui dort et qui m'a dit ce week-end : "tu sais, Maman, tous les enfants qui n'ont pas de maman dans le monde, ils doivent rêver de toi"
Etre mère quand je peux la serrer contre moi.
Etre mère quand je peux essayer de lui expliquer ce qui se passe de l'autre côté de la Méditerrannée ou à l'autre bout du monde.
Etre mère quand elle se retourne vers moi les yeux pleins de larmes car le dessin-animé est triste et que j'ai déjà du mal à contenir mes propres larmes.
A bientôt !

La Papote

PS : Ah oui, je sais parfaitement que très arbitrairement, je n'ai parlé que des mères. Je sais...