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Aube de l’odyssee

Publié le 23 mars 2011 par Neoafricain

AUBE DE L’ODYSSEE

Très joli nom pour une opération militaire qui s’est avérée décisive. A ce jour, elle a déjà permis de sauver la vie de dizaines de milliers d’innocents qui sans elle se serait trouver à la merci du Tyran de Tripoli. L’évocation de l’Odyssée me replonge dans mes classiques grecs, avec toutes les tragédies qui accompagnent les épopées de cette période. Aujourd’hui encore, cette région du monde ne manque pas de drames. Il est encore long le périple qui conduira tous ces peuples méditerranéens de la tyrannie à l’état de droit.

Depuis ce samedi 16h45, heure à laquelle la France a tiré le premier coup de cette opération, je ne cesse de me réjouir. Enfin, la communauté internationale a pris ces responsabilités. La France et la Grande-Bretagne ont su mobiliser plusieurs pays et les Etats-Unis, même du bout des lèvres, ont finalement apporté un soutien militaire déterminant. La supériorité militaire de la coalition internationale est écrasante. Les avions de Kadhafi qui prenaient un plaisir pervers à bombarder les insurgés, sont soit détruits ou en passe de l’être s’ils osent décoller. L’attaque-éclair que ces sbires avaient lancée sur Benghazi a elle aussi été stoppée nette. Les carcasses en feu le long des routes étaient suffisamment éloquentes.

Tous les sceptiques doivent se rappeler que les frappes aériennes sont certes arrivées trop tard pour empêcher la mort de milliers de Libyens et la fuite en exil de centaines de milliers d’autres depuis le 17 février ; mais elles ont permis d’éviter un véritable bain de sang dans les dernières villes tenues par les insurgés. Ce qui constitue déjà « un casus belli » plus qu’honorable !

Le second motif, inavoué mais bien réel, c’est bien-sûr d’obtenir le départ de Kadhafi et de son clan. J’en reviens à l’un de mes précédents posts ; quelle économie de victimes, de moyens et de temps on ferait si l’un de ses proches prenait ses responsabilités en neutralisant le vieux Dictateur libyen. Mais les frappes, si elles continuent à détruire le potentiel militaire des pro-Kadhafi, auront certainement un impact psychologique déterminant. Celui qui a régné par la terreur pendant des décennies est de plus en plus en position de faiblesse dans son propre pays. Les conditions commencent à être réunies pour une fin heureuse à cette tragédie.

Pour cela, il faut continuer à pilonner sans relâche tout le matériel militaire libyen et tout mettre en œuvre (et même accorder les moyens) pour que les insurgés et tous les Libyens qui le désirent, se soulèvent pour leur liberté.

Il faut aussi refuser catégoriquement toute la propagande kadhafiste. Refuser les communiqués quotidiens de leur porte-parole qui un jour déclare un cessez-le feu imaginaire, un autre jour annonce des funérailles sans enterrement, et un troisième jour veut nous faire croire que les cibles visées par la coalition ne sont occupées que par des civils. Formé à l’école soviétique, le régime de Kadhafi s’y connaît en propagande. Comme le disait récemment un spécialiste du monde arabe, il faut carrément détruire la télévision d’Etat à Tripoli.

Je reconnais aussi que cette intervention ne fait pas l’unanimité. Nous avons la chance de vivre en démocratie et de jouir d’une liberté d’expression qui permet à n’importe qui de dire n’importe quoi. On entend même certains préférer le statut quo avec KADHAFI plutôt que de soutenir le Conseil National de Transition. On comprend mieux le sommet de Munich en 1938…

Cependant, certains arguments me semblent recevables ; pourquoi la Libye et pas le Bahreïn par exemple ? Si on attaque la Libye aujourd’hui ; sera-t-on tenu d’attaquer aussi la Syrie demain ? L’Iran le surlendemain ? Le Zimbabwe ensuite ? Comment s’en prendre à un pays africain et arabe alors que la Ligue arabe est pour le moins réservée et l’Union Africaine hostile sur cette intervention ?

A ceci, je réponds que le cas libyen a toutes les caractéristiques du régime à abattre : horreur de la dictature, capacité déjà démontrée du Guide à lancer des attaques terroristes et à envahir ses pays voisins et nécessité, en pleine vague de libéralisation des pays arabes, de soutenir un mouvement durement réprimé par des milices armées et par des mercenaires. La proximité géographique de la Libye avec l’Europe ajoute également un caractère d’urgence pour les Occidentaux à régler cette situation. Enfin, on ne peut exclure que le cas libyen, une fois réglé comme on le souhaite, remotive tous ceux qui sont épris de liberté.

Quant à la crédibilité de la Ligue arabe, elle est quasi nulle quand on sait qu’elle est impuissante à protéger les civils libyens et qu’elle n’est toujours pas d’accord sur l’attitude à tenir face au vent de liberté qui souffle sur les pays qui la composent. Elle est toujours tiraillée entre les potentats au pouvoir et la rue qui veut le changement. La duplicité des leaders arabes est bien connue… Le cas de l’Union Africaine est encore pire ; les Chefs d’Etat qui la composent ont quasi tous été achetés par les pétrodollars de la Libye, et n’ont qu’une seule crainte : c’est que les révoltes arabes pour plus de liberté et de dignité arrivent chez eux. Cyniques et corrompues, ce ne sont pas ces deux institutions qui peuvent nous expliquer ce qui est bon pour le peuple libyen.

Comme dans tous les pays fermés depuis des décennies par une dictature totalitaire, nous manquons d’informations pour avoir un avis tout à fait définitif sur ce qui s’y passe. Mais nous pouvons nous baser sur les exilés qui nous relatent les horreurs vécues, sur le nombre de victimes du régime qui affluent dans les hôpitaux tenus par les insurgés, et surtout sur la conviction profonde que nul sur cette terre n’a vocation à vivre comme les Libyens le font depuis trop longtemps. La liberté est à leur portée de mains, aidons-les à l’attraper !


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