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GAV : Nicolas Sarkozy lâche Henri Guaino & les fauves de la Droite populaire dans l’arène médiatique contre la Cour de cassation

Publié le 21 avril 2011 par Kamizole

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Chose promise, chose due : je m’attaque maintenant aux arguments – bien plutôt des «éléments de langage» fournis clef en main par l’Elysée ! – avancés tant par Henri Guaino que par les députés de l’UMP membres du groupe de la «Droite populaire» auxquels j’accorderais haut la main la palme de la mauvaise foi la plus répugnante tant ils font assaut d’outrances à l’encontre de la décision de la Cour de cassation. Un vrai festival ! En même temps qu’un tissu d’âneries sans nom (je préfère rester polie) que je vais tâcher de démonter fil à fil.

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Je commencerais par Henri GUAINO qui s’est exprimé sur Canal + lors de l’émission «Dimanche +»… Je constate de surcroît qu’il semble avoir pris le relais de Claude Guéant pour faire entendre ad nauseam «la Voix de son maître» car en cherchant un autre article je tombe sur celui-ci Pour Guaino, le chauffard de Chelles mérite la prison à vie (Le Figaro du 17 avr. 2011).

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J’y reviendrais mais cela prouve à l’évidence qu’Henri Guaino n’est pas juriste et cela se sent bien. Il ose déclarer que l’arrêt de la Cour de cassation est «limite par rapport aux exigences de la démocratie» ! Comme si la Sarkozie était le royaume de la démocratie ! Ajoutant «je pense que la Cour de cassation est un peu sortie de son rôle en prenant cette décision»…

S’il avait quelques connaissances juridiques, il saurait que la Cour de cassation ne pouvait que prendre cette décision cassant des arrêts qui refusaient d’appliquer la jurisprudence de la CEDH, laquelle a vocation à s’appliquer dans le droit interne des Etats signataires de la Convention européenne des droits de l’homme.

Si la Cour de cassation avait rendu un arrêt contraire, il me semble évident que la requérante aurait saisi la CEDH et que la France eût été condamnée – une fois de plus ! - par cette instance. Il saurait aussi que notamment depuis l’arrêt Nicolo de 1989 (Conseil d’Etat) la France a dû – bon gré mal gré - se plier aux exigences du droit supranational européen. Nous ne sommes plus à l’époque où le législateur français pouvait se croire fondé à voter des lois contraires aux conventions dont la France est signataire. Idem pour les actes administratifs du gouvernement, qu’il s’agisse de décrets, d’arrêtés, etc.

Il ose prétendre que «S’il ne faut pas parler tout à fait de “gouvernement des juges”, on n’en est pas loin (…) Nous devrions avoir une réflexion collective sur ce sujet – rien que les UMP bien entendu ! supprimer la Cour de cassation ou modifier toutes les règles de sa juripru-dence ? – c’est au législateur à faire la loi et au juge de l’appliquer et non pas au juge à faire la loi, mais c’est un point de vue tout à fait personnel»… Tu parles ! Vous n’entendriez pas derrière lui le grand souffleur du Grand Guignol de l’Elysée, par hasard ? La preuve : il s’exprime dans un français aussi approximatif que Nicolas Sarkozy

:)

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«Gouvernement des juges» ! Ça y est… le gros mot est lâché. L’injure suprême du droit constitutionnel mal compris. Utilisée le plus souvent contre le Conseil constitutionnel quand il a l’outrecuidance de retoquer des lois ou les assortir de réserves d’interprétation qui en modifient largement les intentions initiales.

Combien de fois faudra-t-il rappeler que les juges suprêmes français – Conseil constitutionnel, Cour de cassation et Conseil d’Etat – constituent des contre-pouvoirs aussi démocratiques que nécessaires à la sauvegarde des libertés fondamentales des citoyens face à la volonté hégémonique des gouvernants et du législateur - notamment quand le pouvoir législatif est sous la dépendance totale de l’exécutif - comme c’est actuellement le cas, contrairement au principe de séparation des pouvoirs énoncé notamment par Montesquieu ?

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Monsieur Guaino, comme vous semblez totalement ignare sur le plan juridique, je me chargerais volontiers d’une toute petite leçon particulière (”n’oubliez pas le guide”
:)
) : la Cour de cassation ne s’est nullement mêlée de «faire la loi» comme vous le dites stupidement. Elle s’est bornée à rappeler que les jugements et arrêts dont elle était saisie ne pouvaient méconnaître les dispositions édictées dans les traités et conventions internationales – ou la jurisprudence des cours qui sanctionnent leur mauvaise application - entrés dans l’ordre interne du fait de leur ratification par la France. Point barre.

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J’en arrive maintenant aux arguments développés par les parlementaires UMP membres de la Droite populaire, tels qu’ils sont exposés dans un article du Parisien Garde à vue : l’aile droite de l’UMP indignée par la décision de la Cour de cassation (16 avr. 2011). S’agissant d’une formation bien plus proche du Front national que d’un parti républicain et sachant qu’ils souhaitent à terme une fusion entre l’UMP et le parti de Marine Le Pen, mieux vaudrait donc qu’ils ne viennent pas nous bassiner avec la démocratie et l’Etat de droit…

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Philippe MEUNIER (député UMP du Rhône) ne craint pas de parler de «coup d’Etat judiciaire». Une fois de plus il commet cette énorme connerie – ou mensonge de première bourre, cela ne fait guère de différence et c’est le signe que leurs «éléments de langage» viennent de l’Elysée ou trône le menteur en chef - en prétendant que c’est la Cour de cassation qui aurait décidé que la mise en œuvre de la réforme ne pouvait attendre le 1er juillet 2011… Tiens ! je croyais que c’était le 1er juin… preuve qu’il raconte n’importe quoi.

Ainsi donc, la Cour de cassation aurait violé «l’article 26 de la loi votée par le Parlement le 12 avril 2011». Je suppose qu’il s’agit de la date à laquelle la loi devait entrer en vigueur. Comme il faut bien enfoncer les clous du cercueil où j’entends enterrer imbécillités et mensonges, je préciserais une fois de plus que la Cour de cassation – qui était saisie de plusieurs pourvois portant sur le non-respect des conditions de légalité des gardes à vue au regard des dispositions de l’article 6 (droit à un procès équitable) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme – n’avait aucunement à prendre en considération la loi du 12 avril 2011.

Et ce pour plusieurs raisons. Les décisions judiciaires qui faisaient l’objet de ces pouvoirs étaient bien antérieures à cette loi. On ne m’a pas encore appris que la Cour de cassation rendait des décisions sur des lois non encore votées : l’Assemblée plénière s’est réunie le 1er avril et la loi fut définitivement adoptée le 12 avril 2011. Il est par ailleurs évident pour qui connaît un peu les choses judiciaires que l’arrêt n’a pas été rédigé au matin du 15 avril 2011… Comme par hasard ? le jour même où fut publiée ua JO la loi du 12 avril 2011 – encore une belle magouille politique, oui ! - la Chancellerie ne pouvant ignorer que c’était le jour où la Cour de cassation devait rendre son arrêt. Jamais rien d’improvisé en cette matière.

Encore plus fort ! «la Cour de cassation s’arroge le droit de remettre en cause la décision du Conseil constitu-tionnel du 30 juillet 2010»… C’est grave, docteur ? Notre imbécile de service oublie de préciser qu’il ne s’agit encore une fois que de la date d’entrée en vigueur de la loi – le 1er juin 2011 – et dont la Cour de cassation n’avait pas à tenir compte comme je viens de le démonter.

Mais quant au fond du droit, il serait absolument vain de chercher la moindre solution de continuité entre le Conseil constitutionnel et l’Assemblée plénière de la Cour de cassation : ces deux hautes instances affirmant que le régime des gardes à vue doit être conforme aux dispositions de l’article 6 de la Déclaration européenne de sauvegarde des droits de l’homme et qu’en consé-quence la présence d’un avocat lors des gardes à vue et des interrogatoires est une condition nécessaire pour préserver le droit à un procès équitable. Point barre.

Un dernier morceau de bravoure : «La séparation des pouvoirs, fondement de notre République, vient ainsi de subir une attaque sans précédent de la part de l’autorité judiciaire. Le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif ne peuvent en aucun cas tolérer cette remise en cause de l’équilibre de nos institutions»…

««La séparation des pouvoirs» ! A la mode Sarko, parlons-en…

Entre l’exécutif et le législatif ? Billevesée. L’Assemblée nationale et le Sénat ne sont plus que de simples chambres d’enregistrement des mesures voulues par Nicolas Sarkozy. Les règles les plus élémentaires sont violées au grand jour. Une disposition est-elle adoptée au Sénat, à l’Assemblée nationale ou par quelque commission ? Sénateurs ou députés sont immédia-tement priés – le mot est faible : les parlementaires de la majorité réfractaires aux désirs du roitelet se font littéralement tordre les bras ! – de voter en sens contraire dès le jour même ou le lendemain : “erreur technique” est-il plaidé.

Nombreux parlementaires centristes l’ont vachement mauvaise d’avoir cru aux promesses de “Menteur 1er” pour faire passer la pilule de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 : «revaloriser le rôle du Parlement» ! Je crois me souvenir que ce fut Pierre Méhaignerie qui, lorsqu’on lui fit remarquer qu’il n’avait pas vu une disposition pourtant importante mais cachée tout au fond d’un texte et à laquelle il était opposé se plaignit du manque de temps : l’urgence décrétée à tout propos (avec donc une seule lecture), les séances de nuit à répétition, etc. Tout cela pour une œuvre législative qui ne devrait pas laisser grand souvenir dans les annales, sinon par son incurie.

Chef-d’œuvre du genre : la loi LOPSi 2, dont grand nombre de dispositions “phares” contre les étrangers et les Roms, ajoutées sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy à la suite du discours de Grenoble du 30 juillet 2010 furent proprement retoquées par le Conseil constitutionnel : nos grands “démocrates” sous l’Eternel ne se privant jamais de parler à l’encontre des Sages du Palais Royal à chaque fois qu’ils sont indisposés par une décision contraire à leurs vues de… «gouvernement des juges» !

S’agissant des commissions d’enquête parlementaire demandées par l’opposition sur les scandales du pouvoir – Karachigate et sondages de l’Elysée – les parlemen-taires de l’UMP qui en avaient admis le principe dans un premier temps ont dû très vite reculer : pressions de l’Elysée à n’en point douter… Ces petits messieurs ne se grandissent pas, écrasés sous les talonnettes du tyranneau.

Quant aux droits de l’opposition au Parlement, ils furent réduits par la suite à peau de chagrin. Par la loi ! Donc votée par la majorité UMP. J’espère que si la gauche revient au pouvoir elle laissera ces gentils démocrates mariner dans leur jus : on les entendra glapir de loin

:)

Quasi retour aux parlements croupions de la Restau-ration, de la monarchie de Juillet ou du Second Empire. L’on n’aura garde d’oublier le rôle éminemment joué par Jack Lang dans l’adoption – à une voix près : la sienne ! - de la réforme de la Constitution. C’est beau comme un gilet rayé…

:)
que certains ex-socialistes ne font-ils pas pour quelques colifichets, autres breloques et petites missions ? Je ne peux qu’acquiescer au jugement de Jean-François Deniau : beaucoup de mots – dont valeur et honneur – se dévalorisent quand on les met au pluriel

Entre l’exécutif et le pouvoir judiciaire ? La bonne blague ! J’enfoncerais une porte ouverte : il est de noto-riété communément admise que Nicolas Sarkozy éprouve – depuis bien avant 2007 - à l’encontre des magistrats et des avocats une détestation peu commune qui à mon sens tient de la névrose obsessionnelle. Il aura fait tout ce qu’il était en son pouvoir pour diminuer les pouvoirs des juges.

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Allant même en 2008 jusqu’à tenter de contourner par tous les moyens possibles et imaginables une décision du Conseil constitutionnel relative à l’impossibilité – pour les cas déjà jugés - d’appliquer en matière d’enfer-mement des détenus dangereux après qu’ils eussent purgé leur peine, en vertu du principe constitutionnel de non-rétroactivité de la loi pénale. Lors même que les décisions du Conseil constitutionnel s’imposent à l’ensemble des pouvoirs publics dont, bien évidemment, le chef de l’Etat et que de surcroît, le Président de la République est garant du respect de la Constitution…

Sans même parler du dernier scandale en date : accuser un juge d’exécution des peines et ses services d’une faute qui méritait sanction (la «diatribe d’Orléans» selon le bon mot de l’éditorialiste Jacques Camus dans la République du Centre) lors même qu’il fut démontré à la suite d’un audit interne que la responsabilité d’un simple dysfonctionnement incombait à la surcharge de travail et au manque de personnel – effets de l’inepte RGPP qui fait disparaître les fonctionnaires (autres ennemis personnels du chef de l’Etat) plus vite que leur ombre. Il aura néanmoins réussi un sacré coup d’éclat : mettre les magistrats en grève et dans la rue (avec, une fois n’est pas coutume, les policiers, également mis en cause).

Je ne pense pas que la séparation des pouvoirs entre l’exécutif et le judiciaire soit en rien respectée lorsque Nicolas Sarkozy impose des «peines planchers» - lesquelles existent bien évidemment de tout temps dans le Code pénal mais les juges conservaient leur pouvoir souverain d’appréciation quant à leur application in concreto en vertu du principe de personnalisation des peines. Lequel joue un rôle non négligeable dans l’insertion et la réinsertion. Victor Hugo, quand il fut parlementaire, ne manqua jamais de visiter des prisons comme la loi l’autorise. Ce n’est sans doute par pour rien qu’il écrivit dans «Les Misérables» : «L’homme a un tyran, l’ignorance. Ouvrez une école, vous fermerez une prison». Aujourd’hui, l’on manque de place dans les prisons et l’on ferme des classes, voire des écoles – alors que le nombre d’élèves est en augmentation - en même temps que chaque année qui passe voit le nombre d’enseignants et autres personnels drastiquement diminué… Cherchez l’erreur !

Avec la réforme les magistrats doivent motiver leur décision s’ils n’appliquent pas la peine plancher ce qui est totalement contraire à la tradition – bicentenaire ! - la plus ancrée, en vertu du principe de l’indépendance des magistrats. Pire : Nicolas Sarkozy (ou le/la ministre de la Justice : cela revient au même !) fait convoquer à la Chancellerie – pour leur tordre les bras, bien évidemment – les procureurs ou avocats généraux qui soutiennent les juges lorsqu’ils n’appliquent pas de peine plancher. J’ai beau savoir que les membres du Parquet représentent l’Etat et sont hiérarchiquement soumis au ministre de la Justice, il pousse le bouchon trop loin. Il prend magistrats du siège et du parquet pour des employés de bureau.

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Il aura fallu attendre l’avènement de Nicolas Sarkozy pour voir des nominations de magistrats du Parquet contraires au refus exprimé par le Conseil supérieur de la magistrature.

La palme de la confusion des pouvoirs entre exécutif et législatif aura été atteinte avec l’imbroglio de l’affaire «Bettencourt-Woerth».

Le pouvoir refusant avec la dernière énergie – du désespoir ? – la nomination de magistrats indépendants dans les multiples volets de cette méandreuse affaire, préférant nettement l’enquête préalable menée par le procureur de Nanterre, le célèbre Philippe Courroye (de transmission

:)
. Feuilleton de l’été 2010 qui tint – de mensonges en rebondissements parfois bi-quotidiens - le public en haleine quasi six mois. Un sacré record dans les annales politico-judiciaires !

J’eus pu suggérer comme titre : «Elle est pas belle, ma République ?»… «abîmée par le sarkozysme», dixit Martine Aubry ! ou «système Sarkozy corrompu» selon Ségolène Royal. Nous devions avoir une «République irréprochable» nous n’eûmes pour tout potage qu’une république bananière, clientéliste et népotiste, où ministres et hauts fonctionnaires se vautrent comme cochons dans leur bauge dans les avantages indus. Un régime digne du général Tapioca !

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Story board digne de «Dallas» : une multimilliardaire accusée par sa fille qui demande sa mise sous tutelle de dilapider sa fortune au profit d’un artiste écornifleur insatiable mais aussi de son conseiller en gestion (lui aussi très gourmand) qui par le plus grand des hasards, non seulement avait ses petites entrées à l’Elysée (par l’intermédiaire du conseiller juridique de Nicolas Sarkozy) mais aussi était le rabatteur du «premier cercle» des généreux donateurs de l’UMP… Elle fraudait le fisc en dissimulant une partie de ses avoirs en Suisse et autres paradis fiscaux ainsi que la propriété effective d’une île aux Seychelles. Un ministre du budget - dont de surcroît la femme était la gestionnaire de la fortune de la milliardaire ! bonjour le conflit d’intérêts – qui portait la triple casquette de trésorier de l’UMP, de collecteur des pépettes du premier cercle et fut trésorier de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy en 2007 – avec une forte odeur de souffre quand bien même les faits seraient-ils légalement prescrits – et quelques autres belles casseroles dont la vente pour une bouchée de pain de 54 hectares de la Forêt de Compiègne à un prix d’ami, au mépris de la loi. Vous y ajoutez plusieurs décorations de la Légion d’honneur attribuée aux personnages les plus sulfureux. Je crois n’avoir rien oublié d’essentiel.

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Passons maintenant à Jacques MYARD. Je ne sais s’il vous en souvient mais il osa il y a peu traiter à l’Assemblée nationale ses collègues de l’UMP de «salopards bobo» (Le Monde du 9 mars 2011) lorsqu’ils décidèrent de faire passer à la trappe une disposition introduite dans la loi LOPSI 2 visant à déchoir de la nationalité française les étrangers naturalisés depuis moins de 10 ans (ce qui est conforme à l’art. 99 du Code de la nationalité) qui seraient condamnés pour meurtre d’un policier. Il s’agissait d’ajouter un cas supplé-mentaire à la liste – très limitative – de l’article 98.

Soit. Mais il est visible que quand bien même serait-il diplômé de droit public, il ne connaît manifestement rien en matière de droit civil. Si ces collègues ont préféré retirer cette disposition c’est à l’évidence qu’elle n’aurait pas passé le cap du Conseil constitutionnel. Pour une raison bien simple : dans le projet de loi la faculté de déchéance de la nationalité française était laissée à l’appréciation du président de la Cour d’assises – et donc aux jurés en dernière instance – à titre de peine complémentaire. Or, l’article 98 est formel, la déchéance de nationalité est prononcée par «décret pris après avis conforme du Conseil d’Etat»… Application du principe de «parallélisme des formes» : les naturalisations faisant l’objet d’un décret en Conseil d’Etat, la déchéance de nationalité nécessite forcément un décret en Conseil d’Etat

C’est dire s’il a compétence pour affirmer que «les arrêts du 15 avril de la haute juridiction judiciaire ne sont rien d’autre qu’une violation de la Constitution que l’autorité judiciaire doit impérativement respecter, ou alors il n’y a plus d’Etat de droit, c’est le gouvernement des juges !». Je n’y reviendrais pas puisqu’il reprend l’antienne de la décision du Conseil constitutionnel qui ne porte en fait que sur la question du délai qu’avaient laissé les Sages aux pouvoirs publics pour mettre la loi en conformité avec la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme en matière de garde à vue.

Il jette le bouchon encore plus loin… Mais pourquoi diable se retenir quand on lâche les chiens ? En affirmant que «cette situation est extrêmement grave, c’est le retour des Parlements de l’Ancien Régime». Ben voyons ! Preuve qu’il ne connaît pas non plus grand chose à l’histoire ! A part la période mouvementée de la Fronde – troubles civils qui eurent lieu entre 1648 et 1653 lors de la régence d’Anne d’Autriche – où effectivement, le Parlement de Paris tenta d’instaurer une sorte de parlementarisme avant la lettre, il oublie tout simplement qu’une fois Louis XIV sur le trône celui-ci n’eut de cesse de limiter au maximum l’influence du Parlement de Paris tout comme ceux de province et que ces successeurs ne leur laissèrent pas plus de pouvoirs.

Puisqu’il ose parler de retour à l’Ancien Régime, je suis intimement persuadée que le roitelet qui sévit à l’Elysée n’y serait nullement opposé. Il pourrait ainsi faire enfermer dans quelques Bastilles ou forts de Pignerol – Lauzun et Fouquet y furent enfermés… il y placerait volontiers Villepin ! – tous ceux qui lui déplairaient ou le gêneraient, sur simple «lettre de cachet» ; pratiquer la «justice retenue» : retirer des mains des magistrats tous les dossiers qui lui plairaient ; nommer des «chambres ardentes» pour juger les affaires compro-mettantes comme jadis «l’affaire des poisons»… Les bûchers et autres supplices ayant disparu, je suis certaine que le «croc de boucher» les remplacerait à merveille

;)

Il ajoute dans la foulée que «la Cour de cassation se prend pour une Cour suprême, libre de toute autorité supérieure alors qu’elle est institutionnellement soumise aux décisions de Conseil constitutionnel et à la loi !». Certes, la Cour de cassation est soumise institution-nellement aux décisions du Conseil constitutionnel dont j’ai déjà souligné qu’elles s’imposent à l’ensemble des pouvoirs publics, dont bien évidemment judiciaire.

Quant à la loi, encore faudrait-il qu’elle fût conforme non seulement à la Constitution mais également aux dispositions édictées par les Conventions internationales dont la France est signataire et en l’occurrence, la Cour de cassation a jugé – uniquement sur le fond – que les décisions des magistrats dont elle était saisie ne respectaient pas en matière de garde à vue les termes de l’article 6 de la Convention européenne des Droits de l’homme. Point barre.

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Je ne m’attarderais pas sur le cas de Jean-Paul GARRAUD, député de la Gironde – et pourtant magistrat de profession ! – «cette situation est inédite. Elle est particulièrement choquante et lourde de conséquences. Tout d’abord parce que l’insécurité juridique ainsi créée va bénéficier aux délinquants. Le syndicat des avocats de France et le syndicat de la magistrature peuvent être satisfaits. Leur «kit garde à vue» comprenant plusieurs centaines de pages, prêt à l’emploi, va entraîner l’annu-lation de multiples procès verbaux et des remises en liberté inadmissibles».

Je ne saurais dire où il a appris son métier mais il oublie des principes essentiels. Dont le droit de n’importe quel délinquant - fût-ce le pire des criminels - de bénéficier intégralement du strict respect des droits de la défense. Il incrimine connement le seul Syndicat de la magis-trature (gauche) oubliant que la pourtant modérée Union des syndicats de la magistrature (USM) ne fut pas en reste pour réclamer la présence de l’avocat lors des gardes à vue…

Il ne viendrait sans doute pas à son esprit rendu tordu par la trop grande fréquentation des idées de Marine Le Pen qu’avocats et magistrats puissent être uniquement animés – en dehors des querelles partisanes - par l’ambition que fût rendue une meilleure justice.

Si le Syndicat de la Magistrature a rédigé ce qu’il nomme stupidement un «kit garde à vue», la Chancellerie et le ministère de l’Intérieur eussent été fort inspirés d’en faire autant à l’usage des OPJ… Depuis que la question de la présence de l’avocat pendant la garde à vue et lors des interrogatoires était inéluctable à terme, ils en avaient largement le temps !

A tous ces gougnafiers qui ânonnent les stupidités soufflées par leur maître – IN/juriste notoire - j’oserais rappeler que Nicolas Sarkozy est constitutionnellement le «garant de l’indépendance de la justice» et que l’ensemble de son œuvre depuis 2007 témoigne à l’envi qu’il n’a de cesse de mettre la justice à sa botte (ou dessous, ce qui revient au même).

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