Magazine Humeur

Le Figaro Mag veut sauver les garçons

Publié le 24 août 2011 par Trinity

Par cyril barde | Elève ENS de Lyon | 22/08/2011 | 18H24

Des urinoirs (Ironchefbalara/Flickr/CC).

Dans son édition de ce week-end, Le Figaro Magazine proposait un dossier sur les différences entre garçons et filles. Cyril Barde, l'un de nos riverains qui a travaillé sur ces questions au cours de son master à l'Ecole normale supérieure de Lyon, a voulu réagir « à cet entretien qui réhabilite l'anatomie comme destin ».

Quand Le Figaro Magazine présente un dossier sur les questions de genre, ça fait plutôt mal. Le titre aurait dû me mettre la puce à l'oreille : « Garçons-filles : pourquoi sont-ils si différents ? ». Le moins que l'on puisse dire, c'est que la question est déjà biaisée.

Le dossier comprend plusieurs articles, dont un entretien avec le pédopsychiatre Stéphane Clerget, intitulé « Il faut sauver les garçons ».

Sous couvert d'une volonté de rupture avec les stéréotypes de genre et d'un renouvellement de l'approche, l'entretien enchaîne avec désinvolture les clichés et les prises de position essentialistes, comme ce délectable : « On sait depuis le Moyen Age que le verbe est féminin et l'acte, masculin. »

Comment mieux reconduire les sempiternelles dichotomies (analysées par Bourdieu dans « La Domination masculine ») entre un féminin passif, intérieur, relégué dans l'espace privé, et un masculin actif, extérieur, destiné à occuper l'espace public.

Pis, M. Clerget réactive tout l'imaginaire patriarcal sous les oripeaux pseudo-modernes d'une analyse psycho-biologique qui laisse songeur tout lecteur ayant de près ou de loin approché les gender studies :

On n'est pas loin du fameux « Tota mulier in utero ». Même si quelques concessions sont faites aux facteurs culturels et sociaux qui expliquent la construction des différences de comportements des garçons et des filles, ceux-ci sont vite éludés pour insister sur le rôle du biologique, considéré par Stéphane Clerget comme premier et prépondérant.

En effet, « l'imprégnation hormonale » du fœtus est censée rendre compte des différences de niveau en maths ou en français observées entre garçons et filles : « Cette imprégnation hormonale favorise l'agressivité des garçons, ce qui encouragerait leur esprit cartésien. »

Les travaux de la neurobiologiste Catherine Vidal, bien plus sérieux, décortiquent au contraire tous les mécanismes culturels et sociaux qui fondent ces différences.

Le lecteur de l'entretien s'amuse en notant la coexistence d'éléments donnés comme gages de scientificité (rôle des hormones dans la formation du cerveau du fœtus) avec des développements tels que celui que nous venons de citer, ancrés dans une mythologie essentialiste qui s'appuie sur le discours métaphorique.

On se demande bien quel peut être le lien entre agressivité hormonale et esprit cartésien… Tout l'argumentaire déployé dans l'entretien tend donc à figer et à naturaliser des différences quasiment innées dans l'immuabilité du destin biologique.

Ainsi, les réponses que le pédopsychiatre tente d'apporter aux nouveaux enjeux de la construction de l'identité des jeunes enfants semblent pour le moins inadaptées. Allant jusqu'à évoquer la suppression de la mixité (« ce serait mieux que la situation actuelle »), M. Clerget compte résoudre le problème – bien réel – de l'échec scolaire masculin grandissant en masculinisant le corps enseignant au primaire et au collège, trop féminisé à son goût. Tout se joue selon lui dans la capacité d'identification de l'élève garçon au détenteur du savoir et de l'autorité.

La pensée essentialisante de M. Clerget semble concevoir le genre comme un système binaire à deux pôles complémentaires dont les référents, auxquels on peut s'identifier comme individu masculin ou féminin, doivent être en équilibre.

Jamais les causes sociopolitiques de la féminisation de l'enseignement des premier et second degrés ne sont examinées. Il est vrai que le pédopsychiatre pose à juste titre la question des difficultés spécifiques rencontrées par les garçons et les jeunes hommes au cours de leur formation. Les problématiques propres à la construction de la masculinité doivent être envisagées, et un certain nombre des solutions concernent évidemment l'école.

Mais en naturalisant la supposée agressivité hormonale des garçons, en enfermant ces derniers dans des stéréotypes de genre qu'il croit pourtant combattre (hyperactivité, violence à maîtriser, esprit cartésien…), Stéphane Clerget nuit à sa propre entreprise.

On ne sauvera pas les garçons en leur tendant le miroir d'une identité masculine éternelle où virilité rime avec agressivité, puissance et domination. Oui, monsieur Clerget, il faut sauver les garçons… mais en les libérant d'abord des stéréotypes et des injonctions de plus en plus contradictoires qui pèsent sur la construction de leur masculinité (dureté vs sensibilité, force vs douceur…).

De même, il faut s'interroger sur les représentations sociales et culturelles qui poussent à déconnecter masculinité accomplie et réussite scolaire, sujet pourtant effleuré dans l'entretien :

Jamais le rôle écrasant d'une société de la performance, qui s'exerce tout particulièrement sur les jeunes hommes, n'est abordé. C'est justement peut-être parce que la performance prônée par la société néolibérale est avant tout et par-dessus tout fondée sur le succès économique et financier que réussite scolaire et épanouissement intellectuel se dévalorisent en même temps qu'ils se féminisent (dans un mouvement circulaire bien connu)…

Sauver les garçons, oui ! Mais les sauver d'abord de conceptions essentialistes et naturalisées qui, pour parler comme Bourdieu, leur tendent autant de pièges qu'elles ne leur accordent de privilèges. Voilà une clé de l'émancipation des hommes et des femmes en ce début de XXIe siècle.

Photo : des urinoirs (Ironchefbalara/Flickr/CC).

 

LE_FIGARO

Par Sophie Roquelle Mis à jour le 19/08/2011 à 16:37 | publié le 20/08/2011 à 16:36

Stéphane Clerget, pédopsychiatre. (Crédits photo: DR)

Stéphane Clerget, pédopsychiatre. (Crédits photo: DR)

LE FIGARO MAGAZINE: Le débat sur les différences entre les garçons et les filles a-t-il toujours été aussi vif?

Stéphane Clerget -On s'est toujours passionné pour les différences entre les garçons et les filles. Pendant des siècles, on a essayé de mettre en avant des différences supposées réelles pour justifier la différence de traitement entre les garçons et les filles, généralement au détriment des filles, bien sûr. Il s'agissait d'associer aux différences physiques des différences psychologiques, de caractère... Même la Révolution française, qui a voulu tout égaliser, a accordé le droit de vote aux seuls hommes, considérant que les femmes n'étaient pas assez fiables. Souvenez-vous, au XIXe, du célèbre vers d'Alfred de Musset: «Tous les hommes sont menteurs, inconstants...» (2) Beaucoup d'efforts ont été faits ces dernières années, mais c'est seulement aujourd'hui qu'on bat en brèche les stéréotypes sur les garçons et les filles.

Lesquels, par exemple?

Jusqu'au XXe siècle, on pensait que les garçons étaient meilleurs à l'école parce que, en gros, leur cerveau étaient plus volumineux. Aujourd'hui, en France, 58% des diplômés du supérieur sont des filles. Cela montre bien que l'idée selon laquelle le cerveau des femmes est moins performant était fallacieuse.

Aujourd'hui, ce sont plutôt les garçons qui échouent à l'école. Pourquoi?

Parce que l'école n'est plus adaptée aux garçons. Il y a plusieurs explications à cela, mais la principale est que le corps enseignant est majoritairement féminin, surtout dans le primaire et au collège, et les garçons ont du mal à s'identifier à des « sujets supposés savoir » (3) féminins. D'autant qu'à la maison, ce sont les mères qui s'occupent des devoirs la plupart du temps. Ce qui n'était pas le cas autrefois, lorsque les pères vérifiaient les notes et punissaient. On voit bien dans ce cas le rôle capital que joue l'environnement.

Pourtant, certains préjugés ont la vie dure. Ne dit-on pas aujourd'hui encore que les hommes réussissent mieux en maths et en sciences que les femmes?

Cette idée persiste, car ces métiers-là ont longtemps été destinés aux hommes. Il n'en reste pas moins vrai que les sciences et les maths sont un domaine où les garçons sont plus performants que les filles, sachant que ces dernières ne cessent de progresser.

Pour quelles raisons?

Il y a sans doute plusieurs explications. L'imprégnation d'hormones mâles sur le fœtus influe sur le cerveau, ce qui explique les différences - certes beaucoup moins nombreuses qu'on ne l'a longtemps cru - entre le cerveau des garçons et celui des filles. Cette imprégnation hormonale favorise l'agressivité des garçons, ce qui encouragerait leur esprit cartésien.

Quel est le rapport?

Les garçons doivent faire plus d'efforts que les filles pour maîtriser leur agressivité, ils sont dans le contrôle permanent, obligés de se raisonner. C'est aussi la raison pour laquelle ils sont souvent plus obsessionnels.

On sait depuis le Moyen Age que le verbe est féminin et l'acte, masculin. On sait aussi que les garçons ont statistiquement plus de mal que les filles à exprimer leurs émotions, ils sont moins à l'aise dans le verbe.

L'éducation ne joue-t-elle pas un rôle crucial dans le contrôle des émotions?

Bien sûr, plusieurs facteurs entrent en jeu, mais il ne faut pas négliger les conséquences de cette imprégnation hormonale pendant la grossesse.

Ensuite, c'est vrai, nous éduquons les garçons et les filles différemment. Nous n'agissons pas de façon identique avec eux, même lorsqu'ils sont bébés. On a fait des tests en mettant en présence de nourrissons des personnes qui n'étaient pas les parents. Selon qu'on leur disait que c'était un garçon ou une fille, elles ne leur parlaient pas de la même façon, n'avaient pas la même attitude.

Notre comportement influence l'enfant. On sait par exemple, aujourd'hui, que les garçons sont sevrés plus tard que les filles. Pourquoi ? Mystère. Est-ce parce que la mère se conduit différemment avec son garçon? Peut-être éprouve-t-elle plus de plaisir à allaiter un garçon?

Avez-vous aussi noté que les mères, lorsqu'elles parlent de leurs enfants, considèrent que leurs petits garçons sont plus fragiles que leurs petites filles ? A l'inverse, les pères jugent en général leurs garçons plus solides.

Il y a d'autres différences. Quand on parle à un bébé fille, on va davantage parler de soi, de ses émotions, de son intimité. Avec un bébé garçon, on va plus parler de l'environnement, de l'extérieur... Nous sommes tous porteurs d'a priori qui vont influencer la manière de penser des enfants.

Ils deviennent ce qu'on attend d'eux...

Dès 3 ans, 95% des enfants savent s'ils sont fille ou garçon. Ils ne savent pas forcément ce que cela signifie mais les rôles sont figés. Ils vont alors essayer de se conformer aux discours qu'on leur tient sur leur sexe et à ce que leurs parents et la société attendent d'eux.

Mais il y a d'autres explications. Selon moi, l'enfant pense aussi en fonction de son corps et de sa génitalité. Les filles perçoivent très vite que leur génitalité est à l'intérieur d'elles, c'est-à-dire qu'elle auront plus tard un bébé dans le ventre. Cela ne favorise-t-il pas les activités introspectives, l'imaginaire? Les garçons, eux, réalisent que leur génitalité est extérieure. Ils sont plus dans la projection: ils lancent des projectiles, tirent au pistolet; tandis que les filles, elles, tirent davantage pour ramener à elles: elles tirent les cheveux, par exemple. Pour moi, c'est la métaphore de leur corps sexué.

Et pourquoi les garçons jouent-ils à la guerre et pas les filles? Lorsqu'ils réalisent, vers 4 ans, qu'ils ne pourront jamais avoir un bébé dans leur ventre, qu'il ne pourront pas donner la vie, c'est un drame. Ils décident alors de donner la mort, qui est un pouvoir équivalent à celui de donner la vie.

Voilà des explications psychologiques qui ne sont pas liées à l'éducation mais bien à la réalité biologique. Les différences anatomiques influent sur la psychologie.

Est-on suffisamment attentifs aux stéréotypes aujourd'hui, lorsqu'on éduque les enfants?

L'école est pleine de stéréotypes ! Les garçons sont plus sévèrement notés que les filles, ils sont plus souvent punis que les filles. L'école est aujourd'hui un vrai problème pour les garçons, parce qu'ils sont un peu plus agités, plus kinesthésiques et qu'il leur est difficile de rester assis pendant huit heures à faire des travaux d'écriture. Au collège, il y a même des garçons qui jouent à être moins bons pour ne pas se faire traiter d'intello ou de fille!

Il faut absolument adapter l'école et masculiniser le corps enseignant, surtout au primaire et au collège, où quasiment tout le personnel d'encadrement est féminin. Il y a davantage de mixité dans le corps enseignant au lycée, mais, à ce moment-là, malheureusement pour les garçons, la sélection est déjà faite. Personnellement, je plaide pour une véritable parité du personnel de l'Education nationale, et pas seulement les enseignants. Si nous ne faisons pas cette révolution, si nous ne réintroduisons pas les hommes à l'école, nous courons à la catastrophe.

Faut-il remettre en cause la mixité?

Ce serait une mauvaise solution, car la mixité a d'énormes avantages : elle favorise les liens entre les hommes et les femmes. Mais ce serait mieux que la situation actuelle.

Les parents d'aujourd'hui ne sont-ils pas plus attentifs à ces stéréotypes?

Les pères commencent de nouveau à s'intéresser à la réussite scolaire de leurs enfants, mais c'est généralement à partir du collège. La maternelle et le primaire restent gérés par les mamans. Et compte tenu du nombre de divorces, beaucoup de pères voient leurs enfants seulement le week-end, et ce n'est généralement pas pour les faire travailler. Du coup, dans la tête du petit garçon, la masculinité est associée aux loisirs, tandis que la dimension contraignante de la vie est associée au féminin. Il faut à tout prix développer la garde alternée, malheureusement insuffisamment accordée aujourd'hui, pour que les pères soient associés plus étroitement, et le plus tôt possible, à la scolarité de leurs enfants. Aujourd'hui, les garçons sont en danger.

(1) Publié en 2001 chez Robert Laffont. Il est l'auteur de nombreux autres ouvrages sur les relations parents/enfants, dont Elever un garçon aujourd'hui (Albin Michel, 2005)

(2) «Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées; (...) mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux.»

(3) Expression lacanienne: désigne qui sait et qui transmet le savoir

Par Sophie Roquelle Mis à jour le 19/08/2011 à 16:47 | publié le 20/08/2011 à 16:46

Voilà une polémique que le ministre de l'Education nationale n'a pas vue venir. En publiant le 30 septembre 2010 une circulaire sur les nouveaux programmes de sciences et vie de la terre (SVT) en classe de première, Luc Chatel ne se doutait pas qu'il se retrouverait quelques mois plus tard face à un front du refus inédit: plus de 35.000 signataires d'une pétition pour «l'école de la République», ainsi que les associations catholiques, Christine Boutin et une partie de l'UMP. En cause? L'enseignement de la «théorie du genre», une discipline née aux Etats-Unis dans les milieux féministes radicaux (gender studies), selon laquelle la différence entre l'homme et la femme relève d'un «genre social» sans lien avec le sexe biologique, trop déterminant quant à l'identité masculine ou féminine. La différence des sexes et l'hétérosexualité sont conçues comme des constructions sociales. Dans ce cadre, le masculin, le féminin et la sexualité sont à redéfinir en termes d'«orientation choisie, et non plus d'identité inscrite dans le corps». «L'identité sexuelle dépend, d'une part, du genre conféré à la naissance, d'autre part, du conditionnement social», dixit le manuel Bordas. En d'autres termes, nous sommes autant homme ou femme qu'hétérosexuel, homosexuel, bi, trans, etc.

Au vrai, la circulaire du ministère ne mentionne pas spécifiquement la théorie du genre. Et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle Luc Chatel a refusé depuis le début de cette querelle d'intervenir publiquement. Jean-Paul Garraud, le député UMP de Gironde qui l'interpellait en juin à ce sujet, le ministre aurait répondu que la théorie du genre «ne fait absolument pas partie du programme des lycéens». Le hic, c'est que les éditeurs de manuels ne l'ont pas compris ainsi... (voir ci-dessous).

Officiellement, donc, les lycéens des classes de première des séries ES et L doivent aborder cette année un programme de sciences qui, entre deux cours sur la tectonique des plaques, les enjeux écologiques de l'agriculture et le cristallin, propose «l'étude de la sexualité humaine». Outre les mécanismes de la procréation, déjà enseignés dans les précédents programmes, l'Education nationale a ajouté un chapitre intitulé «Devenir femme ou homme». La circulaire précise : «On saisira l'occasion d'affirmer que si l'identité sexuelle et les rôles sexuels dans la société avec leurs stéréotypes appartiennent à la sphère publique, l'orientation sexuelle fait partie, elle, de la sphère privée.»

Sur le moment, dans son lycée des Vosges, Katia Lévy n'a pas bronché en lisant cette phrase. Mais lorsque les nouveaux manuels de SVT sont arrivés au printemps dans les établissements, la jeune enseignante (elle n'a pas 30 ans) a compris. «On assiste à un basculement, proteste-t-elle. Jusqu'ici, l'enseignement de la sexualité humaine était strictement limité à sa dimension biologique. Maintenant, on nous demande d'enseigner aussi ce qui relève de la sphère privée, c'est-à-dire sa dimension sociale.» Avec un enseignant de l'académie de Nancy-Metz, Mathias Dourdessoule, elle lance une pétition sur internet pour dénoncer «les entorses gravissimes aux valeurs de notre école», notamment les entorses à «sa neutralité» et «au respect de la personnalité de l'enfant et de l'action éducative des familles». En trois mois, sur le site : ecole-deboussolee.org, la pétition récolte plus de 35 000 signatures, bien au-delà du cercle des profs de SVT.

Ce succès a surpris les deux enseignants (qui ont pris des pseudonymes afin de ne pas avoir d'ennuis avec leur hiérarchie), le soutien d'organisations catholiques aussi. «Cela ne me gêne absolument pas, précise Katia Lévy, qui affirme être «athée» et «ancienne militante du PS». «Pour moi, ajoute-t-elle, enseigner la théorie des genres revient à remettre en cause Darwin et à enseigner le créationnisme.»

Un argument rejeté avec force par les partisans du gender, telle la philosophe Geneviève Fraisse, qui assurera un cours à Sciences-Po Paris sur le sujet à la rentrée. «Tout ce qui touche au sexe est toujours soupçonné d'être militant», note celle qui se définit comme une «chercheuse féministe». «Il ne faut pas rejeter un savoir, insiste-t-elle.Or, la théorie des genres ouvre un champ de pensée, de recherche et de savoir qu'il est légitime d'enseigner à l'école. Si tout était biologique, ce serait tellement simple...»

En attendant, plusieurs organisations catholiques - qui craignent que la théorie du genre ne soit le faux nez d'une campagne de promotion de l'homosexualité à l'école - ont écrit à Luc Chatel pour lui demander de clarifier sa circulaire et de récuser la théorie du genre. Ce que le ministre s'est refusé à faire, rappelant par la voix de son directeur général de l'enseignement scolaire, Jean-Michel Blanquer : «Il ne s'agit pas de favoriser telle ou telle théorie sociologique particulière. S'il y a une extrapolation de certains manuels, ce n'est pas de la responsabilité du ministère. » Et d'ajouter : « Cela dit, le fait qu'il y ait une dimension biologique et sociale du sexe est établie depuis longtemps.»

La direction de l'enseignement catholique a alerté ses établissements sur les passages incriminés, sans toutefois exiger d'eux qu'ils renoncent aux manuels pour «ne pas dramatiser». «Nous disons simplement qu'il y a une norme: on naît garçon ou fille, et nous réfutons qu'on ait le choix de son genre», expliquait alors à l'AFP son directeur adjoint, Claude Berruer.

Voici les extraits des manuels de SVT de première ES et L concernant la théorie du genre. Sollicité, Hachette n'a pas répondu à nos appels. Bordas a indiqué à l'AFP avoir «respecté le cahier des charges du ministère, lors d'une réunion avec les éditeurs».

Chez Bordas:

«L'identité sexuelle est le fait de se sentir totalement homme ou femme. Cette identité dépend, d'une part, du genre conféré à la naissance, d'autre part, du conditionnement social.»

«L'identité sexuelle se réfère au genre sous lequel une personne est socialement reconnue.»

«L'orientation sexuelle se révèle le plus souvent au moment de l'adolescence et elle relève totalement de l'intimité des personnes.»

«Si dans un groupe social, il existe une très forte valorisation du couple hétérosexuel et une forte homophobie, la probabilité est grande que la majorité des jeunes apprennent des scénarios hétérosexuels.»

Chez Hachette:

«L'identité sexuelle est la perception subjective que l'on a de son propre sexe et de son orientation sexuelle.»

«Seul le sexe biologique nous identifie mâle ou femelle, mais ce n'est pas pour autant que nous pouvons nous qualifier de masculin ou féminin.»

«L'orientation sexuelle doit être clairement distinguée du sexe biologique de la personne.»

«Le mineur de 15 à 18ans est libre d'entretenir des relations sexuelles à condition qu'il soit consentant et que ce ne soit pas avec une personne ayant autorité sur lui.»

«Le mineur est libre de ses orientations sexuelles, c'est-à-dire qu'il peut avoir des relations sexuelles soit avec un homme soit avec une femme.»

«Durant cette période de fragilité psychologique et affective (l'adolescence), il est souvent difficile de faire face à une orientation sexuelle différente de la norme hétérosexuelle.»

«Distinguez la part biologique de la part sociale de l'identité sexuelle » (Enoncé d'un exercice).

Chez Hatier:

«En sociologie, l'identité sexuelle se réfère au genre par lequel une personne est socialement reconnue.»

«Montrez que d'autres facteurs peuvent intervenir pour définir l'identité sexuelle d'une personne.» (Enoncé d'un exercice).

Par Sophie Roquelle Mis à jour le 19/08/2011 à 16:39 | publié le 20/08/2011 à 16:38

«Les tests de grossesse vendus dans le commerce sont excellents, mais ils ne sont pas encore capables d'annoncer le sexe du futur bébé.» (Crédits photo: Robert Laffont)

«Les tests de grossesse vendus dans le commerce sont excellents, mais ils ne sont pas encore capables d'annoncer le sexe du futur bébé.» (Crédits photo: Robert Laffont)

Garçons et filles sont différents. Cette donnée, évidente pour toutes les générations qui nous ont précédés, fait aujourd'hui l'effet d'une révélation étonnante à de nombreux parents. Nous qui avons été élevés dans l'idée de l'égalité des sexes, nous considérons ou nous espérons, à tout le moins, que les différences entre les sexes ne sont pas innées, mais fabriquées par la société. Nous nous côtoyons sans difficulté entre personnes des deux sexes, nous échangeons nos points de vue aussi bien sur le sport que sur la cuisine et nous sommes joyeusement en compétition les uns avec les autres sur nos lieux de travail en faisant constamment semblant de considérer qu'hommes et femmes sont plus ou moins identiques. Jusqu'à ce que nous ayons à notre tour des enfants et que les différences entre les sexes deviennent impossibles à ignorer! (...)

Oui, garçons et filles sont différents. Ils ont des centres d'intérêt différents, des niveaux d'activité différents, des seuils sensoriels différents, des forces physiques différentes, des styles relationnels différents, des capacités de concentration différentes et des aptitudes intellectuelles différentes ! Les différences ne sont pas quantitativement très importantes et, dans de nombreux cas, bien plus modestes que celles, parfois énormes, qui existent entre hommes et femmes adultes. Les petits garçons pleurent, les petites filles tapent et donnent des coups de pied. Mais les différences s'additionnent -et c'est cela qui provoque l'apparition de certaines statistiques alarmantes qui influencent notre façon de penser l'éducation des enfants. (...) Ces différences entre les sexes ont de réelles conséquences et posent d'énormes défis aux parents. Comment soutenir aussi bien nos fils que nos filles, les protéger et continuer de les traiter de manière équitable, alors que leurs besoins sont manifestement si différents?

Les tests de grossesse vendus dans le commerce sont excellents, mais ils ne sont pas encore capables d'annoncer le sexe du futur bébé. Cette limitation est en partie due au fait que plus on est tôt dans la grossesse, moins il est possible de différencier les fœtus. Les bébés des deux sexes sont identiques pendant les six premières semaines de leur développement intra-utérin. Le processus de différenciation sexuelle s'enclenche vers le milieu du premier trimestre, mais il n'apparaît pas clairement à l'échographie avant la fin du troisième mois (au plus tôt). Les fœtus prennent leur temps pour révéler leurs organes génitaux au monde extérieur. Et à l'intérieur de leurs toutes petites têtes, la différenciation est encore plus lente.

En librairie à partir du 8 septembre.

En librairie à partir du 8 septembre.

Cependant, il y a des différences qui s'impriment dans le cerveau, et sans doute dans l'esprit, avant la naissance. Vous ne pouvez ni les voir à l'échographie ni les entendre dans les battements de cœur du fœtus, mais elles sont bien là: garçons et filles sont influencés dans l'utérus par différents gènes et différentes hormones qui leur sont propres. (...)

Parmi toutes ces influences, celle que les chercheurs connaissent le mieux est celle de la testostérone, la célébrissime hormone stéroïde contre laquelle les mères adorent se lamenter quand elles surprennent leurs fils à se pourchasser à travers la maison ou à se bagarrer trop près de la table basse du salon.

Les parents, en général, ne savent pas à quel point la testostérone intervient tôt dans le développement de leur enfant. La première poussée de testotérone démarre six semaines après la conception, pour se terminer avant la fin du second trimestre. Ensuite, et jusqu'au moment de la naissance, le niveau de testostrérone des garçons n'est guère différent de celui des filles. Une autre poussée survient alors, plus modeste que la première, qui s'étend sur les six premiers mois de la vie. En tout état de cause, la brève période de quatre mois, avant la naissance, durant laquelle les fœtus sont exposés à la testostérone, suffit à les masculiniser entre les jambes et, dans une certaine mesure, dans leurs cerveaux embryonnaires. (...)

Les garçons se développent plus vite que les filles, et ce, dès le début de la grossesse. Les médecins spécialistes des fécondations in vitro sont souvent capables de deviner si l'embryon sera mâle ou femelle rien qu'en se basant sur le nombre de divisions cellulaires qui se sont produites en un certain nombre d'heures depuis la fécondation: les embryons mâles ont un métabolisme plus élevé, qui accélère le début de leur croissance et la multiplication des cellules. L'évolution semble avoir favorisé cette croissance plus rapide afin que les embryons mâles passent la période critique de la différenciation testiculaire avant que les œstrogènes de leur mère, dont les niveaux grimpent régulièrement au début de la grossesse, ne perturbent le développement de leur appareil uro-génital. Conséquence de leur développement plus rapide, les garçons sont plus grands, plus lourds et physiquement plus vigoureux que les filles au moment de la naissance - avec des crânes plus épais et, oui, des cerveaux plus gros.

Si les corps des garçons grandissent et grossissent plus vite, ceux des filles mûrissent plus rapidement. Et cette différence se traduit par un avantage net en faveur des fœtus féminins à la fin de la grossesse. Selon la plupart des critères de mesure, les filles sont plus capables de relever le défi de la vie en dehors de l'utérus ; les garçons sont davantage vulnérables à tout un éventail de maladies, de problèmes cognitifs et comportementaux, et même à la mort, à la fin de la grossesse et après l'accouchement. (...)

Quand une femme enceinte fait une fausse couche, il est environ 30 % plus probable que le fœtus était celui d'un garçon. Les garçons ont aussi environ 7 % de chances de plus que les filles de naître prématurément. Même les garçons nés à terme courent davantage de risques que les filles. Le taux de mortalité infantile global, aux Etats-Unis, est 22% plus élevé chez les garçons que chez les filles. (...)

Tous ces facteurs expliquent comment le surplus d'embryons mâles conçus à la fécondation diminue peu à peu, jusqu'à ce qu'il ne reste qu'un nombre de fœtus masculins presque égal à celui des fœtus de filles. Après la naissance, néanmoins, la vulnérabilité des garçons reste un thème dominant du début de leur croissance. Ils risquent davantage que les filles de succomber à un nombre impressionnant de problèmes physiques et mentaux. Cela fait d'eux, par bien des aspects, le sexe le plus difficile à élever au début de l'enfance.

Comme les chatons, les nouveau-nés se ressemblent à peu près tous. (...). N'empêche, il existe quelques différences entre les sexes, constantes et fiables, qui influencent sans doute réellement le démarrage de chaque garçon et de chaque fille dans la vie. Les bébés filles devancent les garçons par le nombre de gestes qu'elles produisent. En moyenne, elles commencent quelques semaines avant eux à pointer du doigt, à saluer de la main et à lever les bras vers les adultes pour être soulevées. Mais là encore, leur avantage est assez réduit: dans une importante étude suédoise, il est apparu que les filles de 18 mois produisaient... 5% de gestes en plus que les garçons. D'un autre côté, les gestes ne sont pas tout à fait les mêmes. Certains des gestes des bébés sont déjà marqués sexuellement: les filles de 8 à 16 mois ont davantage tendance à imiter les comportements parentaux (par exemple, elles étreignent ou bercent leurs poupées); les garçons de la même tranche d'âge font le geste de lire un journal, de conduire une voiture ou de donner des coups de marteau.

(Crédits photo: Getty images)

(Crédits photo: Getty images)

Après les gestes vient la prononciation des mots, premiers outils d'expression verbale des bébés. Les filles conservent leur modeste avancée, tout au long de la petite enfance, pour produire en moyenne trois cents mots à l'âge de 22 mois, tandis que les garçons atteignent ce seuil à 23 ou 24 mois.

Passé l'âge de 2 ans, les enfants commencent à parler pour de bon. Ils se mettent à associer les mots en petites phrases simples telles que Maman maison, Encore lait ou Aller parc. Là encore, les filles prennent la tête: huit mots consécutifs d'un souffle, à deux ans et demi, contre environ six mots pour les garçons. Et à l'émergence des phrases grammaticalement justes, celles des filles sont plus longues et plus complexes que celles des garçons - une différence qui se maintient durant toute la période préscolaire. (...)

Les écarts entre garçons et filles se creusent énormément entre 2 et 6 ans -et certains sont plus marqués à cette période qu'à aucun autre moment de la vie. Les coupables ne sont pas les hormones, puisque les gonades des enfants se sont calmées et resteront tranquilles jusqu'à la puberté. Mais il est vrai, comme nous l'avons vu, que certaines influences génétiques et hormonales pré et postnatales ont projeté les enfants sur des trajectoires légèrement différentes. Longtemps avant qu'ils n'entrent en contact avec notre culture très codifiée entre masculin et féminin, leurs cerveaux sont préparés à ne pas réagir tout à fait de la même manière à certains aspects de notre environnement. Et une fois le processus amorcé, ils s'épanouissent selon un modèle rose ou bleu qui caractérisera de bien des façons la suite de leur développement. (...)

La plupart des parents ont des récits (...) sur les activités ludiques «typiques de leur sexe» de leurs très jeunes enfants. Et les recherches confirment que cette différence est remarquablement universelle. Qu'ils grandissent aux Etats-Unis, en Europe, au Japon et probablement n'importe où dans le monde, les garçons de 2 à 5 ans choisissent à une écrasante majorité le camion, la petite voiture, le ballon ou tout autre jouet « masculin » quand on leur offre le choix entre ces objets et une poupée. Les fillettes du même âge sélectionnent la poupée, les ustensiles de cuisine ou le nécessaire à maquillage (surtout si l'un de ces jouets est rose). (...) «Il doit y avoir un gène de la bagnole sur le chromosome Y!» Voilà comment de nombreux parents expliquent le fait indéniable, universel. (...)

Bien sûr, ni les camions ni les poupées n'existaient il y a cent mille ans, quand le génome humain s'est stabilisé sur la séquence qu'il a aujourd'hui. Mais il ne paraît pas absurde de croire que certaines propriétés intrinsèques des jouets «garçons» et des jouets «filles» séduisent profondément, et différemment, les garçons et les filles.

L'argument contraire, c'est que non, non, trois fois non, il n'y a strictement rien d'inné à tout cela. C'est nous, les parents, qui imbibons les enfants de ces préférences à travers les choix que nous faisons très consciemment quand nous leur achetons des jouets et à travers les présupposés inconscients sur les garçons et les filles. Cette théorie de la prééminence de l'acquis sur l'inné, des facteurs culturels sur la nature, n'a plus autant la cote qu'il y a quelques décennies, notamment parce qu'elle est contredite par les tentatives des parents pour intéresser leurs fils aux poupées et leurs filles aux camions. Mais la vérité est quelque part entre les deux idées: les préférences des garçons et des filles pour telle ou telle sorte de jouets sont clairement biaisées par certaines tendances innées, mais elles sont amplifiées par divers facteurs sociaux au premier chef desquels la prise de conscience qui s'impose à l'enfant qu'il est un garçon ou une fille. (...)

Deux études récentes - une sur les jolis petits vervets, l'autre sur les singes rhésus -ont révélé que les mâles et les femelles se différenciaient comme les garçons et les filles en matière de choix de jouets. La première étude, menée à l'université de Californie à Los Angeles (UCLA) par Gerianne Alexander et Melissa Hines, s'est penchée sur les préférences de vervets âgés de 1 an pour divers jouets humains conventionnels. Les mâles consacrèrent davantage de temps à manipuler la balle ou la petite voiture de police qu'aux autres jouets, tandis que les femelles préférèrent une poupée de chiffon et, plus mystérieusement, une casserole rouge. Cependant, les deux sexes passèrent autant de temps à examiner deux jouets unisexes (un chien en peluche et un livre d'images). Les résultats sont similaires dans l'étude des singes rhésus menée au Centre Yerkes de recherche sur les primates de l'université Emory. Dans les deux études, les singes ignoraient sans aucun doute le sens du concept de «jouet de garçon ou de jouet de fille». Aussi, ces résultats donnent bien à penser que ces préférences ont quelque chose d'inné.

Les garçons, plus actifs, sont peut-être davantage séduits par les objets mobiles qu'ils peuvent manipuler et contrôler en utilisant leur corps. Les filles trouvent peut-être les poupées plus plaisantes parce qu'elles ont davantage propension à nouer des liens avec les personnes de leur entourage, voire, parce qu'elles ont une attitude véritablement instinctive pour les bébés. (...) L'attirance des femelles vervets pour les bébés pourrait aussi expliquer leur intérêt bien étrange pour la casserole de l'étude. Il se trouve simplement que le rouge de cette casserole était proche de celui de la peau des nourrissons vervets. (...)

S'ils insistent parfois pour porter des robes bien roses ou des jeans bien bleus pour l'école, ils ont beaucoup de choses en commun une fois en classe. Oui, les filles sont plus précoces sur le plan verbal. Mais en réalité, il s'agit là d'une des différences entre les sexes les moins importantes: elle se traduit par un simple écart de deux points de QI avant 6 ans et elle diminue beaucoup au cours des premières années du primaire (sans aucun doute parce que les enfants se mettent tous à parler énormément une fois qu'ils sont scolarisés). En d'autres termes, il y a des tas de petits garçons très loquaces. Et s'il est vrai que davantage de garçons que de filles ont des difficultés à apprendre à lire, il ne faut pas en conclure que tous les garçons peineront dans ce domaine ou, pis, qu'aucune fille n'a besoin d'aide supplémentaire pour apprendre à s'exprimer ou à lire. En outre, les filles ne sont pas en avance dans toutes les mesures de l'aptitude verbale. Pour le vocabulaire, en particulier, on n'observe pas de différence entre les sexes à partir de l'âge de 6 ans, en tout cas, et pendant toutes les années qui suivent.

(Crédits photo: Getty images)

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Les garçons ont l'avantage dans d'autres domaines. Dès le primaire, ils ont des résultats un peu supérieurs aux tests d'aptitudes visio-spatiales et ils distancent de plus en plus les filles tout au long de l'enfance et de l'adolescence. Ils sont également tout aussi bons, sinon meilleurs qu'elles en maths. (...) En maths et en sciences, à vrai dire, les filles démarrent tout à fait du bon pied. Au début du primaire, elles connaissent leurs nombres et savent compter aussi bien que les garçons. Les filles et les femmes sont même meilleures que les garçons et les hommes en calcul mental. Au bout du compte, pourtant, ce sont les garçons qui obtiennent les meilleurs résultats dans la plupart des examens de mathématiques, dont ceux de géométrie, de mesures, de probabilités et pour les très redoutés «problèmes».

Considérons les données des tests d'évaluation passés par des centaines de milliers d'élèves américains. Les filles ont des résultats inférieurs à ceux des garçons, en maths comme en sciences, dans les classes de CM1 et de quatrième quoique la différence (deux à trois points) soit considérablement moindre que la différence, au désavantage des garçons, relevée aux tests de lecture et d'écriture. Les filles sont encore un peu plus en retard en terminale. A cet âge, cependant, il est encourageant de constater que les écarts se sont réduits presque de moitié par rapport à ce qu'ils étaient il y a dix ou vingt ans.

A vrai dire (...), les garçons seraient plutôt plus émotifs que les filles: les nouveau-nés sont plus irritables, ils pleurent plus tôt s'ils ont un problème et ils sont moins faciles à consoler que les nouveau-nées. Les choses s'égalisent assez vite, mais, comme le savent tous les parents de garçons, ceux-ci manifestent beaucoup, beaucoup leurs émotions. Pour eux comme pour les filles, le début de la vie est un méli-mélo de périodes de bonne humeur et de chutes dans la déprime la plus noire, de crises de colère et de sourires exubérants, sans oublier les poignantes déclarations d'amour qu'ils adressent à leurs parents, leurs frères et sœurs et leurs animaux domestiques. Les visages des garçons, comme ceux des filles, sont très, très expressifs (voilà pourquoi les parents aiment tellement les photographier). Arrivés à l'âge de 4 ou 5 ans, les garçons pleurent peut-être un peu moins que les filles, mais ils versent encore bien assez de larmes pour vous donner envie de les prendre dans vos bras, de les bercer et de faire tout votre possible pour les réconforter.

Si les garçons éprouvent sans l'ombre d'un doute les mêmes émotions que les filles, ils apprennent cependant bien vite à ne pas les montrer. Le cliché du mâle stoïque est assez juste - en apparence, du moins. Les hommes adultes manifestent effectivement moins d'expressions faciales, ils pleurent moins et, de manière générale, ils dissimulent leurs sentiments davantage que les femmes. Mais cela ne signifie pas qu'ils ne ressentent rien, bien au contraire! Dans les études en laboratoire, les hommes réagissent d'ailleurs plus intensément que les femmes aux stimuli émotionnels frappants comme le visionnage d'un film violent ou la peur de recevoir une décharge électrique. Le truc, c'est que leurs réactions sont essentiellement internes: dans les situations émotionnellement troublantes, ils connaissent de plus fortes accélérations de leur rythme cardiaque, de plus fortes élévations de leur pression artérielle et davantage de suées que les femmes. Mais leurs émotions, même si elles sont moins visibles en surface, sont tout aussi puissantes que celles des femmes.» (...)

Les intertitres sont de la rédaction.

Cerveau rose, cerveau bleu. Les neurones ont-ils un sexe?, de Lise Eliot, Robert Laffont, 504p., 22€.

Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Pierre Reignier.

En librairie à partir du 8 septembre.


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