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Max | Professionnels

Publié le 20 novembre 2011 par Aragon

affiche-l-ordre-et-la-morale-10275424cqzfg.jpgGestes. Si beaux gestes. Je revois encore le geste de Claude L. quand il taillait les lais du papier peint, gestes du vieil Edmond L. quand il cerclait une barrique, en ajustait les planches ou ceux de Georges T. incisant ses pâtons avant de les glisser dans la gueule  vivante et brûlante de son fournil. D'autres encore dans ma mémoire. Le geste du métier. Le beau geste.

Impressionnant de sûreté, de rapidité, d'efficacité. Un professionnel est comme ça : homme de l'art ! Efficacité, rapidité, geste sûr et parfait.

Le non professionnel fera, mais son geste ne pourra jamais ressembler à celui dont c'est le métier. Sans descendre d'un cran - de ceinture - dans la grivoiserie qui ne sied pas à ce post que je veux grave, idem pour le geste d'une "fille professionnelle" qui fera avec efficacité, sûreté et rapidité. Plaisir en plus pour le client. DSK, hélas pour lui, et bien d'autres moins médiatisés ne s'y trompent pas en faisant appel à leurs services. En descendant toujours d'un cran - de baudrier ou de brelage - et c'est là que je veux entrer dans le vif de mon post, ceux de la tribu  de Gossanah étaient des amateurs, de petits amateurs dépassés par le temps de folie politique qui avait recouvert "le caillou" calédonien depuis des années  et dans lequel ils étaient embarqués, dépassés par les gestes fous et irréparables qu'ils venaient de commettre mais pour lesquels - c'est vérité historique - ils voulaient répondre devant des tribunaux. En face d'eux, hélas pour eux, ils avaient des professionnels. De la politique et de la guerre.

J'ai connu un petit jeune lieutenant des paras. Très intelligent. L'aurait pu choisir d'autres filières, plus intelligentes celles-là. Ben non, c'était l'armée et les paras. Il lisait Proust, versait des larmes sur Maldoror et dans le sillage du "Bateau ivre" mais il choisissait les hommes de sa section en fonction de leurs Q.I. Pas plus de 10 me disait-il en rigolant : "Un bon G.V. (grenadier voltigeur) chez les paras doit pouvoir tout faire dans le 1/4 de seconde qui suit l'ordre qu'on lui donne. Il doit pouvoir tuer sa propre mère. Donc, pas plus de 10 de Q.I." Je vous jure que cette histoire est vraie. Elle est vraie encore aujourd'hui dans l'armée française et dans toutes les autres aussi. Enfin, dans certaines unités spécialisées.

Ceux de Gossanah ne savaient pas à qui ils avaient à faire : GIGN, EPIGN, 11ème Choc, Commando Hubert. Professionnels de l'action violente et de la mort. Car faut pas se berlurer. Faut pas voir là où il n'y en a pas des héros qui sentent bon le sable chaud, des Gary Cooper marchant dans la rue implacable de High Noon, du romantisme guerrier. Y'a rien de tout ça. Ces types là, s'ils doivent - actionnés par l'appareil d'Etat - entrer en action, au bout du compte, y'a de la violence et de la mort professionnellement assénées. C'est tout.

"L'Ordre et la Morale". Film admirable que le film de Mathieu Kassovitz. Télérama critique un peu une certaine vision manichéenne. Les militaires de l'armée de terre seraient dépeints comme des brutes. Je vais pas rentrer là dedans. Je dis, avec les éléments de connaissance que j'ai, de l'armée, que je connais bien, et de la Calédonie où j'ai débarqué l'année suivante de ces évènements, que ce film est parfait. Il est impressionnant, puissant, juste historiquement et politiquement, bouleversant.

Le gouvernement français de l'époque n'a pas voulu négocier ni tenter quoique ce soit de "pacifique". Il fallait agir et tuer. C'est aussi effroyablement simple que ça.

Dianou le trop doux ne savait pas qu'il avait ouvert les portes de l'enfer en attaquant le vendredi 22 avril 1988 la gendarmerie de Fayaoué. Les professionnels de la guerre ont agi. Ont tué. Ont tué aussi froidement, c'est vérité ! Des hommes à terre désarmés ont été exécutés, des blessés ont été achevés. Assassinats. Des politiques ont ensuite menti. Comme ils savent si bien le faire. Et le capitaine du G.I.G.N. Legorjus n'a rien pu faire. Rien, alors qu'il tenait une reddition sans violence.

Des politiques ont effroyablement menti. Crime d'Etat. Ça s'appelle crime d'Etat. Comme à Charonne, comme le 17 octobre 1961 à Paris, comme comme comme comme.... Pages entières  de l'histoire de France remplies de ça. De fureur, de sang, de mensonges. De professionnalisme quoi...


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