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Mal du pays

Publié le 23 décembre 2011 par Ctrltab

Mal du pays

Caroline veut apprendre l’anglais. I want to speak English. Desesperatly, dit-elle. Comme Susan. Comme Madonna. C’est ma sortie de secours pour fuir d’ici. Mes enfants auront la chance, eux, de porter des uniformes bleus marines. Comme ceux que l’on voit sur les dos des petits rosbifs en excursion au jardin publique.

Caroline est une vraie originale. Elle refuse souvent de prendre un verre au Spey River pour se plonger dans les subtilités des différents temps anglais. Ils ont une manière de voir si différente de la nôtre ! Le présent est leur principal marche pied. Ce n’est pas comme en français où les vrais beaux temps ne se conjuguent qu’au passé.

Caroline sort avec un type à la peau blanche qui rosit facilement. Ca lui rappelle l’effet de ses doigts sur son sexe. Long, fin et rose, il grossit sous sa langue râpeuse. Derrière les buissons du cimetière. Le seul endroit où l’on vous foute encore la paix. Chaleur des couilles. Granuleuses. Fluides salés. Poils perdus au fond de la bouche. Blow job.

Caroline-Salope, Caroline bitte-couille et que je t’encule, caroline tes nichons me donnent des envies de meurtres, Caroline viens là que je m’y mette…! Les mots crus, cochons, des porcs, des truies surtout… Comme de fois elle les a déjà entendus et lus sur les murs du lycée et des chiottes! Les mots de l’enfance la protégent des jalousies et des frustrations. Tu parles, c’est celui qui dit qu’il y est.

Caroline a rendez-vous tout à l’heure avec Jean. Plus envie d’y aller… Elle lit Vingt ans, apprend les 20 trucs pour faire croire qu’on couche… Paresse. Ennui.

Il paraît que Willy la trouve bonne. C’est Natacha qui lui a dit. Willy, pas très intelligent, gros fumeur de pétard, majeur…inintéressant… oui, mais il part bientôt pour l’Ecosse… Caroline rêve. Caroline mouille. Caroline prend trois culottes, les fourre dans son sac Bob Marley avec son casque, sa musique, son teddy bear, deux sweats, cinq soutifs et un jean.

Elle n’écrit pas de mots à ses parents. Elle s’arrache. Il n’est pas question de laisser de trace. De toute façon, quand elle sera passée de l’autre côté, elle rallumera son portable. Elle leur fera signe.

Elle n’oublie pas de prendre sa robe rouge et ses talons, cela pourra toujours servir.  Elle part sonner à la porte de Willy et s’offrir. Demain, elle sera en Angleterre.

Ce n’est pas une fugue, c’est une tentative de survie.


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