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Rien ne s'oppose à la nuit, de Delphine de Vigan

Publié le 23 février 2012 par Aniouchka
Rien ne s'oppose à la nuit, de Delphine de Vigan
Qui ne s'est pas préparé à cette lecture risque d'être fortement bouleversé. Et même chez le lecteur averti et préparé, le bouleversement ne peut être nié... J'ai achevé ce roman il y a quelques jours, après avoir longtemps hésité à me plonger dans cette autobiographie que je savais perturbante, pour en avoir lu de nombreuses critiques. 
Rien ne s'oppose à la nuit, c'est la quête, par sa fille, d'une mère insaisissable, atteinte de bipolarité, qui se dérobe à quiconque essaye de la comprendre, essaye de l'aider dans son malaise. Un roman dur, terriblement touchant, tout d'abord par la sincérité de Delphine de Vigan qui lutte pour écrire sa mère. Ecrire sa mère, elle ne peut pas y échapper et, même si la tentation d'abandonner est forte, le sujet s'est imposé de lui-même, hantant ses jours et ses nuits. Ecrire sa mère pour tenter de la comprendre, pour tenter de s'expliquer les raisons qui l'ont poussé au suicide à soixante ans passés. Ecrire sa mère pour ne plus être hantée par son fantôme et pouvoir, à nouveau, écrire autre chose.
J'ai toujours été touchée par l'écriture de Delphine de Vigan, sincère, fluide, poétique, mais d'un côté tellement brutale, tellement vraie. Ici, l'entreprise de l'écrivain est à la fois très courageuse et périlleuse : elle le dit elle-même, elle se heurte à l'éventualité de décrire quelqu'un qui ne serait pas sa mère, elle écrit sa vérité, mais certainement pas la vérité. Sa vérité qui peut lui risquer de se mettre toute sa famille à dos. 
Ce que j'aime dans ce roman absolument bouleversement, tellement les révélations qui y sont faites sont de l'ordre du domaine privé et doivent être terribles à écrire, c'est la pudeur que Delphine de Vigan parvient à conserver, tout au long du livre. J'aime également la sincérité de l'écrivain, ses réflexions et ses doutes sur un travail d'écriture qui la hante, qui entrecoupent les passages où l'auteur raconte sa mère. Le lecteur est plongé au coeur du processus d'écriture et n'ignore presque rien du travail de l'auteur : les entretiens avec ses oncles et tantes, le travail de documentation, les heurts et les différends avec la famille, les nuits d'insomnie... 
Je n'ai pas pu lâcher le livre pendant deux jours. Pendant deux jours, j'étais totalement absorbée par cette lecture. Une fois le livre refermé, il m'a fallu quelques minutes pour revenir à mes activités. Quelques minutes pendant lesquelles, hantée par la photo de sa mère en couverture du livre, je me suis dit que l'écriture a probablement permis à Delphine de Vigan de ne pas péter les plombs. J'admire cette femme pour son courage et la puissance de son écriture.

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