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Cookies : des lois contre l'intérêt général ?

Publié le 14 mars 2012 par Laurent Nicolas

Cookies : des lois contre l'intérêt général ?Les lois sont censées servir l'intérêt général. Mais une loi mal faite peut-elle avoir l'effet inverse du but recherché ? Tel est peut-être le cas de l'application des directives sur les cookies.

Le respect de la vie privée doit rester une priorité et il n'est pas question de revenir là-dessus. Mais comment concilier ces impératifs avec les modèles économiques des sociétés qui fournissent ces services dont les gens ont réellement besoin ?

Déjà, il faut éduquer les internautes et les législateurs sur les différents niveaux de confidentialité qui coexistent sur Internet. "J'ai l'impression d'être espionné lorsque je vois des publicités ciblées", "Je n'aime pas qu'on me reconnaisse"... Combien de remarques de ce genre entend-on tous les jours ? "Je", "me" font référence à une identité, des données personnelles.
L'amalgame est donc facilement fait entre "ciblage" et "identité".

Pourtant la différence est énorme. L'identité correspond à "qui je suis", mon nom, mon adresse postale ou électronique... Les technologies de l'Internet se moquent de connaître mon identité.
Le ciblage est anonyme.

C'est vrai, lorsqu'il est trop bien fait, on peut légitimement croire que ce n'est pas un profil qui est ciblé, mais un individu. D'où amalgame... Un ciblage modéré passe, lui, complètement inaperçu. A la télévision, je vois peu de publicités pour des sonneries de téléphones ou des jeux débiles, parce que je ne regarde pas de programmes pour adolescents. Je suis ciblé, mais je ne m'en rends pas compte, parce qu'il est plus difficile de remarquer une absence qu'une présence.

En cherchant à protéger la confidentialité de l'identité, on risque de pénaliser ceux-là mêmes que l'on cherche à aider.

Internet vit de la publicité et rend gratuitement des services coûteux à produire. Qui n'a pas retrouvé un vieil ami grâce à Facebook ? Combien coûtent les millions de serveurs de Google ?

Or la publicité a une valeur d'achat, et génère un retour sur investissement (ROI) pour l'annonceur.

La valeur créée sur Internet est relativement faible. Un pavé publicitaire dans une page par ailleurs surchargée de contenus et de liens a moins d'impact qu'une publicité sur un écran de télévision HD avec le son.

Mais Internet compense cette faible efficacité par des outils de ciblage performants, ce qui lui permet de maintenir un ROI intéressant.
De l'autre côté de l'équation, les sites vendent de la publicité. Leur chiffre d'affaires se mesure en volume x prix unitaire.

Sans ciblage, le ROI baisse mécaniquement, le prix unitaire payé par les annonceurs décroît. Les sites ont deux options :

- fournir moins de services pour réduire leurs coûts

- augmenter le volume publicitaire pour maintenir leur chiffre d'affaires.

Que croyez-vous qu'ils vont faire ? Il est impossible de réduire les coûts, même en réduisant les services.
Un internet sans ciblage provoquerait une explosion de la pression publicitaire. D'où une réaction en chaîne qui baissera encore les prix, car plus on voit de publicités en même temps, moins elles sont efficaces.

On risque donc de se retrouver submergés de publicités ! Encore plus que maintenant !
Quel sera le gain pour l'usager ? Très faible, puisque le ciblage ne met pas en jeu de données personnelles.
Quel sera le prix à payer pour l'usager ? Moins de services, ou plus de pollution publicitaire.

Personnellement, je préfère vivre dans un Internet où je vois des publicités qui me concernent pour des voyages, des conférences sur la publicité et des spectacles, plutôt que pour des jeux, des rouges à lèvres et des prothèses auditives !

La loi doit protéger encore mieux les informations personnelles. Elle doit ériger un mur entre le ciblage et l'identité. Une fois ce mur solidement construit, le ciblage pourra remplir son rôle, sans compromettre notre droit fondamental à l'anonymat.

Ce post n'engage pas Alenty. Comme tous les autres, il est signé et reflète mon point de vue.

Laurent NICOLAS


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