Magazine Journal intime

Poste sûr d'être vacant

Publié le 17 mars 2008 par Mirabelle
Mon cher Victor,fin.gifIl fallait bien que cela arrive un jour : le 1er tour du mouvement départemental sonne la fin prochaine de mon appartenance à l'école de C******. Les postes sont parus ? Oui. Bien sûr, ce n'est qu'une première ébauche car la carte scolaire n'est pas encore faite. Mais le fait est là : je vais bientôt devoir dégager ! Hier, à l'école, le téléphone a retenti toute la journée. Et à la directrice de préciser, à chaque fois : "Il s'agit d'un CE2-CM1". Un leitmotiv qui m'est bien désagréable. Car il faut bien que je te l'avoue, mon Totor : je n'ai aucune envie de quitter cette école. Aucune. Aucune. Aucune. J'avais envie de prendre le téléphone et de défendre mon statut : "Ah non, le poste n'est pas à pourvoir, non, c'est une erreur. Non, c'est ma classe. Oui, ma classe. C'est MON CE2-CM1. Oui. Ce n'est rien. Au revoir !"

Tu le savais pourtant depuis le début ! Bien sûr. Je le savais, et je l'ai toujours gardé à l'esprit. Mais que veux-tu... On s'attache... Aux gamins, aux collègues... A tout ce qu'on a construit... Et on ne peut pas s'en empêcher... Je suis comme une gamine qui refuse de voir la vérité en face. Je ne veux pas partir de cette école. Une maman a lancé l'idée de faire une pétition pour que je reste, dénonçant l'absurdité de la situation : "C'est quand même fou... Vous arrivez cette année, ça se passe bien, vous auriez pu rester... Et non ! Quelqu'un de nouveau va arriver, ne va connaître ni l'école ni la classe ! C'est d'un mal fait !". Eh oui... C'est mal fait... Et je remercie cette maman, et elle me dit qu'elle touche du bois, et j'aimerais tellement lui dire que je serai là l'année prochaine ! "Enfin, si je peux faire quoi que ce soit, hein, je suis là !". Il y a vraiment des parents extras...

Sauf que tu seras on ne sait où encore... Remarque, tu peux toujours redemander ton poste, cela ne coûte rien ! Oui, je le demanderai, sans me faire d'illusions. J'ai imprimé la liste hier soir. Je l'ai à peine regardée. Mon coeur s'est fendu en constatant, noir sur blanc, réalité implacable, que mon poste était remis en jeu. J'entends encore la voix de l'Inspectrice, au début de l'année : "Ne vous faites pas d'idées... Ce n'est pas parce que vous serez bien dans une école que vous y resterez ! N'oubliez jamais que vous êtes nommés ici à titre provisoire. A titre pro-vi-soi-re !".

Provisoire. Un mot qui n'a plus beaucoup de sens au quotidien, quand je connais tous les gamins des autres classes, quand j'aime retrouver les collègues pour le café, quand je me sens bien en arrivant au boulot, en plaisantant sur les élèves, en échangeant nos points de vue... Tu as eu une chance folle, tu le sais, ça... Débuter dans ces conditions, c'est un privilège que tous les PE sortants n'ont pas ! Je me le repète tous les jours, n'aies aucune crainte. C'est juste qu'il y a les gamins de CE1 qui viennent me demander : "Dis, est-ce que je serai dans ta classe l'année prochaine ?" et puis ces parents qui veulent savoir si j'aurai toujours le même niveau. Je fais partie de cette école, désormais. Et c'est douloureux. Parce que je sais bien qu'il y aura un pot pour moi en fin d'année et que je vais avoir du mal à sourire...

Parce qu'en septembre, on m'a fait un très beau cadeau. Et on aurait pu me dire : "Attention ! C'est beau, mais c'est fragile ! Ce n'est qu'un prêt ! Je compte sur vous cependant pour en prendre soin et pour vous montrer à la hauteur d'un tel cadeau ! Mais d'ici juillet, je viendrai le reprendre ! N'oubliez jamais qu'on viendra vous le reprendre, il n'est pas à vous !".

Je veux rester dans mon école. Je veux rester dans mon école. Je veux rester dans mon école. Je veux rester dans mon école. Je veux rester dans mon école... Pourquoi je ne peux pas y rester ? Pourquoi je ne peux pas y rester ? Je veux rester dans mon école.

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