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Remettre les péchés : chemin (juif et chrétien) vers la guérison.

Publié le 14 mai 2012 par Perceval

Premier point :

Jésus a été condamné pour blasphème. En particulier, il s’est arrogé une prérogative divine (Isaïe 1,8) : remettre les péchés :

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Luc 5, [20] ( Bible de Jérusalem ) « Voyant leur foi, il dit : «Homme, tes péchés te sont remis.» [21] Les scribes et les Pharisiens se mirent à penser : «Qui est-il celui-là, qui profère des blasphèmes ? Qui peut remettre les péchés, sinon Dieu seul

Dans la liturgie du Temple, en effet, il était prévu des «sacrifices pour le péché» qui, à certaines conditions, permettaient d’obtenir le pardon de ses fautes (Lévitique 4,1-5,17).

Jn 5,18 : « À cause de cela donc les Juifs cherchaient d'autant plus à le faire mourir, parce que non seulement il violait le Sabbat, mais aussi parce qu'il disait que Dieu était son propre Père, se faisant égal à Dieu ».

Deuxième point :

Ce « pouvoir divin » : Jésus le délègue à des hommes ( ! ), après leur avoir soufflé l’Esprit Saint :

Jn 20, 22-23 : « Recevez l’Esprit Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. »

Avant de réfléchir, sur ce qui m’apparaît, avec Jésus, une certaine révolution, dans la manière d’aborder cette notion de « péché ». Qu’en est-il, du «  péché » dans la religion du Christ, le judaïsme ?

-   Comment cela se fait-il que la compréhension de cette notion, soit à ce point différente, alors que nous avons la même origine de pensée ? mais peut-être est-ce une ' fausse idée ' ...

-    

Qu’en disent aujourd’hui les juifs ? ou : La notion de péché dans le judaïsme :

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La Torah (l'Ancien Testament) ne connaît que deux mots pour désigner quelque chose qui ressemble au péché, qui n'ont rien à voir avec les concepts développés par le christianisme.

  • La faute est désignée par 'het (plur. 'hattaïm). Ce mot apparaît pour la première fois dans le Livre de la Genèse IV:7. Il est linguistiquement dérivé du concept de manquer la cible. Rien ne laisse supposer dans la sémantique de celle-ci une quelconque séparation d'avec YHWH Elohim. ...
  • Théologiquement, le mal est désigné par . Le mot désigne une imperfection intrinsèque : "kisse rou'a", c'est une "chaise instable", branlante, ne convenant ni à sa condition, ni à sa fonction de chaise. Faire ce qui estne s'applique que dans un seul cas : blasphémer et/ou sacrifier aux idoles (Ishtar, Baal, Belzébuth,...) et à l'idolâtrie; en se détournant du monothéisme.

Ce mal est toujours collectif et concerne soit le chef du peuple (ex. Salomon qui avait suivi certains cultes de ses nombreuses concubines, soit tout le peuple, Israël, dans son ensemble (ex. « Adoration du Veau d'or »).

Exemples :

Livre des Rois (1, 21). Le roi David est sur son lit de mort et sa femme, Bath Chéva', vient lui déclarer : " Si Salomon ne devient pas roi après toi, alors Salomon et moi serons "'hataïm" ". Salomon et Bath Chéva' seraient-ils des pécheurs ? Cela signifie que Salomon et Bath Chéva' n'atteindront pas leur potentiel, ne réaliseront pas leurs aspirations, ne répondront pas aux attentes placées en eux.

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Le mot hébreu pour l'une des nombreuses offrandes sacrificielles est 'hatoth, de la même racine que le mot 'hett . Cette offrande - généralement appelée en français une " offrande expiatoire " - ne peut être présentée que pour un acte que l'on a fait sans intention. En fait, si l'on a délibérément transgressé une violation, il est interdit de présenter un 'hatoth. C'est donc vraiment une " offrande pour une erreur ", et non une " offrande expiatoire ".

" Mettre à côté de la cible ", " ne pas atteindre son potentiel ", " erreur " et " involontaire " sont tous des indications que le mot 'hett ne signifie pas " péché ".

Il est plus exact de traduire le mot hébreu 'hett par " erreur " ou " méprise ".

Les gens ne " pèchent pas. " Ils commettent des erreurs. Après tout, nous sommes des êtres humains. Et le judaïsme nous demande de tirer la leçon de nos erreurs. Nous présentons nos excuses, nous nettoyons le désordre occasionné, et nous continuons de vivre.

A noter qu'il existe d'autres mots en hébreu qui sont aussi traduits - à tort - par " péché, " mais qui impliquent une faute plus grave qu'une erreur. Pour citer deux exemples : 'avone ‘ désigne une transgression volontaire, consciente, de la loi de Dieu où l'on désire prendre le dessus ; pécha' s'applique à une transgression volontaire par laquelle on cherche à contrecarrer spécialement la volonté de Dieu.

Cependant, le mot 'hett est celui que l'on traduit le plus souvent par " péché ". Le " péché " commis par Adam et Eve était un 'hett, une erreur.

C'est ainsi qu'un grand nombre de concepts que nous avons à l'esprit ne sont pas du tout juifs. Jeter un regard nouveau peut nous ouvrir l'esprit et clarifier nos idées, en même temps que cela donnera plus de sens à nos existences.

Pour les chrétiens, qu’y a t-il de nouveau ? ou du moins de différent ?

Au delà de «  la cible ratée », il y a l’idée d’une alliance rompue : alliance entre Dieu et l’humain.

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Et précisément, Jésus propose une nouvelle alliance entre l’humain et le divin. Cette alliance est la conséquence de l’Amour inconditionnel du Divin pour l’humain. D’ailleurs, même si les apôtres ne sont pas « géniaux », le « Souffle » que reçoivent les disciples - s’il ne les rend pas parfaits - il les constitue membres de la Nouvelle Alliance. Ils deviennent si intimes du Christ que leurs paroles résonnent comme les siennes. Ils ne le remplacent pas - ils n’ont pas l’orgueil de le croire - dans l’imperfection ils poursuivent sa mission. Ils reçoivent une autorité qui vient de Dieu.

Ainsi, la rémission des péchés, passe par Jésus, qui a accompli une fois pour toutes, le salut de tous. Le mouvement de conversion de l’homme n’est pas supprimé pour autant, mais il prend un sens nouveau dans la confiance que le Christ a déjà acquis pour l’humanité la victoire sur le péché.

Pardonner :

Dans le judaïsme, Il y a un pardon qui ne peut être accordé que par Dieu : celui qui efface la faute commise contre lui et contre sa Tora. En effet, ce pardon met en œuvre la puissance créatrice de Dieu…

L’être humain, quant à lui, peut remettre les dettes.

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Pardonner, au sens commun du terme, c’est toujours, de quelque manière, renoncer à un dû. Il faut souligner à ce sujet que le « Notre Père » fait usage de ce vocabulaire : « Remets nous nos dettes comme nous remettons à nos débiteurs. » (Mt 6,12). Cette formule n’est pas passée dans la traduction française officielle, alors que les catholiques l’ont récitée pendant des siècles en latin (dimitte nobis debita nostra sicut et nos dimittimus debitoribus nostris) sans que cela pose problème (il est vrai que beaucoup ne comprenaient pas le latin…). On retrouve la même image dans la grande parabole sur le pardon, à propos du débiteur impitoyable (Mt 18,23-35).

L’exigence du pardon mutuel est fortement affirmée dans le judaïsme, où elle s’exprime de façon particulière à l’occasion de la fête de Kippour. La tradition affirme en effet que Dieu ne peut pas pardonner à celui qui ne pardonne pas à son prochain. Pardonner à ses semblables est le préalable indispensable à la réception du pardon divin.

Il arrive – méconnaissance classique du catho. qui ne connaît en général rien des autres religions  - de prétendre que les juifs, à la différence des chrétiens, seraient incapables de pardonner !!!

Source :: http://www.jerusalem-religions.net/...

- Le judaïsme:

La repentance tient une très grande place dans la vie religieuse des Juifs. Elle est enseignée et pratiquée dans une liturgie quotidienne, sobre et significative, dont nous allons admirer la pédagogie. La repentance, en effet, est si importante qu’on doit la faire tous les jours. Vous avez peut-être déjà entendu le conseil austère et humoristique, que Rabbi Eliezer-le-Grand, maître de Rabbi Aqiba donnait à chacun de ses disciples dans la deuxième moitié du premier siècle de notre ère: « Fais repentance un jour avant ta mort » et aux disciples qui s’étonnaient: « Mais l’homme sait-il quel jour il mourra ? », il répondait simplement: «Qu’il fasse repentance aujourd’hui de peur qu’il ne meure demain ! De la sorte, il fera repentance chaque jour »(Mishnah Abot 2,10. T.B. Shabbat 153 a)

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- Le christianisme:

Propos d’Olivier Boulnois : « La morale ne fait pas partie du CREDO. Le christianisme n’est pas en son essence une morale, pas même une source transcendante de la morale. Il est une foi, non une loi.

En son centre, il proclame un salut et prétend y adhérer ; il n’exige pas la justice mais promet le pardon, il ne condamne pas une faute, mais confesse le péché. Tout le discours de la morale chrétienne ne peut être qu’un discours du croyant sur le bien, sur sa dette envers Dieu, envers autrui, envers lui-même […] La morale est secondaire mais elle n’est pas accidentelle, et le christianisme s’en occupe dans sa secondarité même. Le christianisme encadre la morale mais il n’en dépend pas ; il l’intègre mais il la transforme » (« Christianisme ou morale », dans : Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, sous la direction de Monique Canto-Sperber, Paris, Puf, 2001, p. 258).

Il n’y a dans les Evangiles, aucune idée de culpabilité ! Pécher, signifie ‘rater sa cible’, et quand conscient d’avoir péché, nous découvrons le résultat ‘ raté ‘, nous ne pouvons en être que malheureux. Jésus vivant, nous rappelle ( comme il l’a fait en de multiples occasions) : que si notre âme nous condamne, le divin, lui nous pardonne. Jésus, nous « relève ». La culpabilité est un « mal », elle nous ronge, Jésus nous en libère. La culpabilité, est souvent l’arme perverse de ceux qui souhaitent imposer leur pouvoir temporel …


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