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“Printemps arabe”, angoisse chrétienne

Publié le 15 mai 2012 par Hermas

Le chrétien chaldéen irakien Raad Salam raconte à la première personne les persécutions dont souffrent les chrétiens dans le monde arabe et ce qui se passe réellement derrière ce que l’on appelle “le Printemps arabe”. Son témoignage est intervenu au cours de la Semaine pour l’Eglise Persécutée que L’Aide à l’Eglise en Détresse a organisée dans l’église des Los Jerónimos de Madrid.

Le Docteur Raad Salam parle du monde arabe et de ses révoltes, non seulement comme le chercheur et le spécialiste de l’islam qu’il est, mais aussi avec l’expérience de celui qui a souffert dans sa chair la persécution religieuse et qui, malgré cela, affirme : « Je n’ai pas de haine pour les musulmans, ni de rancune à l’égard de l’islam pour tout ce qui nous a été infligé, à moi et à ma famille. Comme chrétien, je ne dois haïr personne. Je veux seulement faire connaître la réalité, ce qui se passe aujourd’hui dans le monde arabe ».

Cette réalité que Raad Salam a vécue, et que « de nombreux frères continuent de souffrir là-bas », le conduit à affirmer que le “Printemps arabe” « n’est rien d’autre qu’un automne, un hiver, obscur, mauvais, dangereux, pluvieux et une très longue » période de révoltes dont profite le radicalisme islamique pour conquérir le pouvoir. Cela « pose un grand problème pour nos frères chrétiens », car derrière la liberté dont on parle, se cachent la persécution, la diminution des droits, les attaques contre les chrétiens.

La nostalgie des temps de Saddam

« Au cours de la première époque de Saddam Hussein, j’ai vécu avec les musulmans. Il est certain qu’ils avaient plus de droits que nous, qu’il y avait des inégalités, mais nous vivions avec eux. J’accompagnais des musulmans à la mosquée, et ils venaient avec moi à l’église, et ceux-là avec lesquels je partageais tout m’ont fait prisonnier lors des révoltes de Basora ».

Raad Salaam se considérait comme un irakien à part entière, qui se vit même obligé à ce titre de participer à la guerre contre l’Iran et à lutter contre les Etats-Unis au Koweit. Lorsqu’ont commencé ses problèmes, à cause de son identité chrétienne, Salam a décidé d’étudier l’islam pour essayer de comprendre la mentalité de ses persécuteurs, ou les arguments religieux brandis pour obliger « ma famille à payer des taxes à une tribu chiite pour qu’elle la protège, elle et ses affaires ».

Cela ne lui fut pas facile, à l’Université de Basora, parce que « beaucoup voyaient d’un mauvais œil un chrétien étudier l’islam. Puis ils ont cru que j’approfondissais l’islam pour me convertir, et m’ont interrogé à ce sujet. Mais je leur ai répondu que plus je l’étudiais, et plus je m’en éloignais », affirmation qui valut à Raad une peine de six mois de prison et des violences physiques.

La féroce persécution contre les chrétiens irakiens remonte alors à sa mémoire. « Je revois ces images, lorsqu’ils s’emparèrent de l’église de Sayida An Nayá, à Bagdad, où ils tuèrent 60 chrétiens, dont la seule faute était de s’être réunis pour la messe du dimanche », dit-il.

Les chrétiens, victimes des changements politiques

A son avis, l’évolution a été identique dans les pays qui ont connu ce que l’on appelle le “Printemps arabe”. Derrière les images qui ont été diffusées dans le monde entier, où l’on voyait des chrétiens et des musulmans priant ensemble sur la place de Tahrir, au Caire, il y avait « une pure et dure politique. Il s’agissait seulement de présenter une image d’ouverture ».

Il n’est pas inhabituel, dit Raad, dans le monde musulman, que les chrétiens soient victimes des changements politiques. « C’est à peine si l’on parle ou si l’on montre des photos des 10.000 chrétiens qui se trouvent dans les prisons des Ayatollahs en Iran. L’iran a fait de la Constitution une constitution islamique. Le pays a été gouverné selon la sharia, c’est-à-dire les lois islamiques, et est devenu un Etat radical islamique chiite. Il est devenu un danger pour les iraniens et pour le monde. Il est vrai que le Shah d’Iran était un dictateur laïc, mais ce qu’il y a maintenant est une dictature politico-religieuse. Il y avait alors 3 millions de chrétiens ; il n’en reste plus que 150.000 ».

  

Dénoncer l’injustice

Raad a pu s’échapper d’Irak. Après avoir passé des années en prison, avoir souffert la persécution et vu comment étaient assassinés ses frères dans la foi, ce chrétien syro-chaldéen, Docteur en philologie arabe et expert en islam, est parti en Espagne. Il y travaille à faire connaître la situation de ses frères chrétiens irakiens et à mettre fin aux persécutions religieuses dans le monde. A la question de savoir ce qu’il est possible de faire, il répond : « Il faut dénoncer cette injustice, en faisant connaître que certains de nos frères chrétiens sont persécutés dans le monde (…). Nous avons besoin de l’aide de l’Occident ».

Javier Menéndez Ros, directeur de l’AED Espagne, ajoute que « nous pouvons commencer par vivre la foi comme d’authentiques chrétiens en Occident ». Telle est la préoccupation du Saint-Siège, lequel « a créé un dicastère pour la nouvelle évangélisation de la vieille Europe ».

SOURCE : ALFA Y OMEGA


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