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Contre la montre

Publié le 15 juillet 2012 par Guillaumemeurice

Contre la montreAlbert Einstein. Théorie de la relativité du temps. « Plus la vitesse d’un objet est importante, moins il vieillit ». Précepte essentiel de la physique moderne, il demeure également une donnée sociologique intéressante si l’on en juge par le comportement étonnant de la majorité de nos contemporains, si pressés qu’ils passent leur temps à essayer de ne pas le perdre.

Symbole cette compétition effrénée à travers la vie dite « active » : la montre. Rolex, Festina, ou Swatch, elle est également un des signes extérieurs de réussite sociale. Bracelet électronique de luxe, fermement soudée au poignet, allégorie de la femme ou de l’homme prisonnier du temps. Rythmant l’existence jusqu’à son terme par un facétieux tic-tac, compte à rebours macabre d’une bombe… à retardement.

Car même si l’issue de cette épreuve est connue de toutes et tous, d’aucuns s’obstinent à rester l’œil rivé sur le cadran, courant pour tenter de ralentir la cadence, reculer l’échéance, éviter l’inéluctable. Il faut les observer gravir les escalators, sauter dans des avions, appuyer sur la pédale d’accélérateur. Il faut les contempler essayer de masquer sur leur visage les marques du dieu Chronos. La peur du vieillissement leur fait précipiter les injections de Botox, les sessions au Club Med Gym et les séances d’UV qui achèvent de leur massacrer l’épiderme.  Au risque paradoxalement de précipiter leur trépas, réduire leur temps de vie, achever leur course vers le repos éternel par un irrévocable temps mort.

Il faut les voir s’imaginer comme le lapin blanc de la publicité pour les piles Duracell. Celles qui durent encore plus longtemps et permettent des performances qui défient le temps. En effet sont-ils semblables à cet animal automate qui répète indéfiniment les mêmes mouvements jusqu’à épuisement total. « Métro, boulot, dodo », tempo lancinant des quotidiens immuables – remplacer métro par bus, voiture, ou train-train de banlieue.

Ou plutôt sont-ils comme le lapin blanc de Lewis Caroll dans Les aventures d’Alice aux pays des merveilles, à détaler sans cesse en hurlant « Je suis en retard !! ». Se précipitant dans le terrier de leurs habitudes. Fuyant en permanence un présent qui leur échappe. Exhibant leur montre à gousset. Piqués au vif chaque seconde par les aiguilles de l’horloge portative.

Pourtant… Paresse, contemplation et ennui. Autant de vertus essentielles à la domestication du temps. Autant de pauses salvatrices infligées à son dictat. Car même si nombreux esprits retors s’obstinent à vouloir en gagner, la vraie richesse est encore de le prendre.

Guillaume Meurice

15/07/2012



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