Magazine Journal intime

La foi

Publié le 20 août 2012 par Mirabelle

Mon cher Victor,


Bientôt la reprise ! Eh oui... Pas trop angoissée à l'idée de laisser ta petite ? Ne m'en parle pas, Victor, s'il te plaît. Pour l'instant, j'adopte la politique de l'autruche, je freine des quatre fers, je repousse l'idée, je pense à autre chose, je retarde le coup de fil à la crèche pour préparer l'adaptation... Tu en as gros sur la patate ? C'est rien de le dire. Je me demande surtout comment je vais tenir une journée entière sans elle, et remettre ça le lendemain puis les jours suivants et ainsi de suite. J'ai déjà beaucoup de mal à garder l'esprit "tranquille" quand Chéri et moi allons au cinéma après avoir laissé A. chez une de ses grands-mères (et ce pendant trois heures seulement !), alors vraiment, toute une journée, ça me paraît impossible, infaisable, mais comment je vais faire mon dieu, je ne vais pas tenir, je ne vais penser qu'à elle, ah la la la... Allons allons, Mirabelle, parlons d'autre chose, je te sens soudain très émue ! Oui, oui, changeons de sujet.

Je disais donc : bientôt la reprise ! Et qui dit reprise dit préparations, classeurs à ranger, fiches inutiles à jeter, du tri, du tri, du tri, un cahier-journal à revoir... Ô joie, ô bonheur ! C'est ironique ? Bien sûr.  J'avoue : cela ne m'avait pas manqué !  D'autant que cette année, la revoilà, la vilaine visite d'inspection, tous les trois ans on y a droit, ça passe vite, trois ans, à peine le temps de souffler qu'il est déjà l'heure de stresser ! D'ailleurs, si mes souvenirs sont bons, ta première inspection ne s'était pas très bien passée, et tu avais eu bien du mal à t'en remettre ! Tu l'as dit bouffi. Cette année, ce sera différent. Je pense avoir fait "le deuil" d'une belle carrière dans l'enseignement, je me suis fait une raison, je sais que je serai une enseignante médiocre tout au plus et et... Mais c'est terrible, ce que tu dis Mirabelle ! Oui, Victor, j'en ai conscience. Tiens, à ce propos, je me suis aperçue récemment, en allant consulter les bonnes vieilles statistiques de ce blog, que nos conversations continuaient à intéresser pas mal de monde (qui l'eût cru ?), notamment de jeunes étudiants caressant le doux rêve de devenir un jour professeur des écoles. Cette constatation m'a d'abord fait plaisir, mais bien vite ce sentiment fort agréable fut balayé par la sensation amère de ne pas le mériter, car, le mot est lâché, "J'AI PERDU LA FOI". Ah... C'est horrible, hein ? C'est triste, surtout... Eh oui, il m'a fallu cinq ans pour baisser les armes, cinq ans pour me décourager, je n'en suis pas fière, loin de là, et il me fallait être honnête avec nos lecteurs. Alors amis blogueurs, excusez-moi. Vous lisez ici les lignes d'une instit' que sa première inspection a fait déchanter, il a suffi de cela, de cela et d'un profond sentiment de solitude, mêlé à celui d'un échec généralisé. Comme un malentendu entre mes idéaux et la réalité. Tu vas cependant devoir composer avec tout cela, tes désillusions et tes doutes, car la rentrée approche à grands pas !

La rentrée est là, effectivement, toute proche. Ma grossesse n'ayant pas idéale (loin de là mon dieu !), je n'ai pas travaillé depuis un sacré paquet de temps, entre les contractions, la tension et compagnie, je me suis arrêtée avant les vacances de février tout de même, et l'idée de devoir remonter en selle me fait un peu peur. Enfin, il paraît que c'est comme le vélo... Je vais redécouvrir le métier, sous un jour différent sans doute, puisque dorénavant je suis maman, et être maman c'est de l'organisation au quotidien, d'autant plus lorsque l'on ramène du travail à la maison ! Parviendrai-je à tout gérer ? Tout le monde y arrive, Mirabelle, et tu es une femme ! Ca veut dire quoi, ça, Victor ? Eh bien vous êtes faites pour cela, pour tout gérer ! Moui... Si tu veux que nous restions amis, je te prierais de changer de discours, ou du moins de garder tes propos sexistes pour toi ! Merci bien ! Rooooo la la, le caractèèèère ! Pffffioooou... Bref. Je reprends bientôt donc, et comme souvent chez moi en période de "préparation psychologique à la rentrée scolaire", je m'interroge sur moi, sur mon rapport au métier, surtout. J'aimerais être encore capable d'écrire sur ma profession, de retrouver "la flamme" et de la garder allumée, comme du temps béni où j'écrivais des articles longs comme le bras dans la catégorie "Mirabelle, PE1, future instit'", sans peiner pour trouver l'inspiration, mais ai-je encore quelque chose à dire ? Je ne suis pas certaine qu'il y ait encore beaucoup de sujets qui me tiennent à coeur, et si j'ai encore du plaisir dans l'exercice de mon métier, je ne le dois qu'aux enfants, simplement aux enfants, à leur contact. Je me répète mais... Que c'est triste ce que tu dis là ma petite Mirabelle... Oui, je sais. C'est triste. Et si tu nous racontais ça, justement ? Ca quoi ? Comment tu en es arrivée à perdre la foi ?


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