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20 août 1857 | Ouverture du procès des Fleurs du Mal de Baudelaire

Publié le 20 août 2012 par Angèle Paoli
Éphéméride culturelle à rebours

   Le 20 août 1857 s’ouvre à Paris, devant la 6e chambre correctionnelle, le procès des Fleurs du Mal. Charles Baudelaire, dont le recueil poétique vient d’être publié par l’éditeur Poulet-Malassis, est accusé d’immoralité. Selon Ernest Pinard, procureur impérial, cette œuvre est une « offense à la morale religieuse » ainsi qu’à « la morale publique et aux bonnes mœurs ». Baudelaire est condamné à 300 francs d’amende et se voit contraint de supprimer six poèmes : « Lesbos », « Femmes damnées », « Le Léthé », « À celle qui est trop gaie », « Les Bijoux », « Les métamorphoses du vampire ». Ces six pièces condamnées seront publiées en 1864 dans le Parnasse satyrique du dix-neuvième siècle avant de figurer dans Les Épaves, recueil publié en 1866 à Bruxelles par Poulet-Malassis.


LES BIJOUX, MÉTAPHORE DE LA POÉSIE BAUDELAIRIENNE

  Vingtième pièce de la première édition des Fleurs du Mal, le poème intitulé « Les Bijoux » appartient aujourd’hui à la section « Spleen et Idéal ».
  Inspiré du Cantique des Cantiques et destiné à Jeanne Duval, la « Vénus noire », ce poème est une célébration érotisée de la femme aimée. Mais il relève également d’un traité de l’art poétique dans lequel Baudelaire pose les prémisses des critères esthétiques de sa poésie. Le poème n’est-il pas, tout comme les bijoux, cette forme achevée, ciselée avec art, dont Théophile Gautier, l’auteur d’Émaux et Camées, avait révélé à Baudelaire la forme parfaite ?


La très-chère était nue, et, connaissant mon cœur,
Elle n’avait gardé que ses bijoux sonores,
Dont le riche attirail lui donnait l’air vainqueur
Qu’ont dans leurs jours heureux les esclaves des Mores.


Quand il jette en dansant son bruit vif et moqueur,
Ce monde rayonnant de métal et de pierre
Me ravit en extase, et j’aime à la fureur
Les choses où le son se mêle à la lumière.


Elle était donc couchée et se laissait aimer,
Et du haut du divan elle souriait d’aise
À mon amour profond et doux comme la mer,
Qui vers elle montait comme vers sa falaise.


Les yeux fixés sur moi, comme un tigre dompté,
D’un air vague et rêveur elle essayait des poses,
Et la candeur unie à la lubricité
Donnait un charme neuf à ses métamorphoses ;


Et son bras et sa jambe, et sa cuisse et ses reins,
Polis comme de l’huile, onduleux comme un cygne,
Passaient devant mes yeux clairvoyants et sereins ;
Et son ventre et ses seins, ces grappes de ma vigne,


S’avançaient, plus câlins que les Anges du mal,
Pour troubler le repos où mon âme était mise,
Et pour la déranger du rocher de cristal
Où, calme et solitaire, elle s’était assise.


Je croyais voir unis par un nouveau dessin
Les hanches de l’Antiope au buste d’un imberbe,
Tant sa taille faisait ressortir son bassin.
Sur ce teint fauve et brun le fard était superbe !


― Et la lampe s’étant résignée à mourir,
Comme le foyer seul illuminait la chambre,
Chaque fois qu’il poussait un flamboyant soupir,
Il inondait de sang cette peau couleur d’ambre !


Charles Baudelaire, Les Épaves in Pièces condamnées, Œuvres complètes, Bibliothèque de La Pléiade, Éditions Gallimard, 1961, pp. 139-141.



CHARLES BAUDELAIRE

Aaaaaaaaaa

Image, G.AdC

■ Charles Baudelaire
sur Terres de femmes

→ La mort des amants
→ Recueillement
→ 31 août 1867 | Mort de Charles Baudelaire
→ 19 février 1924 | Conférence de Paul Valéry sur Baudelaire

■ Voir aussi ▼

→ (sur litteratura.com, un superbe site de Azziz El Khiati) Charles Baudelaire



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Par CharlesBaudelaire CharlesBaudelaire
posté le 13 mai à 16:22

Merci pour le "Superbe Site" ... http://baudelaire.litteratura.com !