Magazine Nouvelles

Bal tragique à la Bastoche : épisode 11

Publié le 08 décembre 2012 par Mazet

Bal tragique à la Bastoche

Episode 11

Joseph fait ses premiers pas

Ce soir-là, il ne fut pas question d’aller déguster la cuisine auvergnate. C’est au commissariat que Laplume emmena son jeune apprenti. Deux minutes après qu’ils se soient présentés, Boissard les accueillit dans son bureau.

- Monsieur Laplume, après la publication de votre article, votre visite ne me surprend pas. Croyez-moi, je fais ce que je peux pour résoudre cette affaire.

- Je n’en doute pas, commissaire. Mon article n’était pas dirigé contre vous. Je voulais surtout inciter les autorités à vous fournir les moyens de conduire l’enquête.

- Vous n’y êtes pas tout à fait parvenu, monsieur Laplume. Mais, je peux vous assurer qu’on s’intéresse à cette affaire au plus haut niveau.

- Ainsi, la mort de notre accordéoniste affole le pouvoir ?

- Affoler est sans doute un bien grand mot. Disons qu’elle ne laisse pas les hautes autorités indifférentes et vous n’y êtes, sans doute, pas pour rien.

- Détrompez-vous commissaire. J’ai suivi des dizaines de faits divers et cela n’a pas souvent modifié l’attitude des autorités. Non, si on s’intéresse à la mort de Baptiste dans les ministères, c’est que ces messieurs redoutent quelque chose. Naturellement, vous ne pouvez pas me dire qui ?

- Vous savez bien que non, monsieur Laplume, je vous en ai déjà trop dit.

- Où en êtes-vous de votre enquête ?

- Pas très loin, je dois vous avouer que, pour l’instant, nous n’avons aucune piste qui permette de désigner un suspect crédible.

- Ou, peut-être en avez-vous trop ?

- C’est aussi une façon de voir. Entre la faune qui fréquente le quartier le soir, les petits voyous qui y ont implanté leur quartier général et les inconnus de passage, il nous faudra du temps pour débroussailler tout ça. Sans compter que pour faire parler les Auvergnats !

- Nous en avons fait l’expérience hier soir. On a diné avec Louis Bonnet, le fondateur de L’Auvergnat de Paris. Il veut bien collaborer à la condition qu’on fasse tout pour éloigner l’enquête des natifs du Cantal ou du Puy-de-Dôme.

- J’ai eu droit à une scène similaire de la part de Bouscatel. Mais, je vois que vous menez votre propre enquête.

- Rassurez-vous, je n’ai pas l’intention d’empiéter sur la vôtre et je vous tiendrai au courant de mes découvertes, s’il y en a !

- Je vous promets de vous tenir au courant. En revanche, vous ne publiez rien sans mon accord.

- C’est bien ainsi que je l’entendais.

- Bien, pour l’instant, je vais orienter l’enquête dans trois directions. La première, que je me dois de privilégier, est celle de la vengeance d’un mari ou d’un fiancé jaloux. La deuxième, est celle d’une complicité avec des apaches du quartier, qui aurait mal tourné. Enfin, je ne peux pas exclure que Baptiste ait été victime d’un fou qui tirerait au hasard, mais dans ce cas, nous ne devrions pas tarder à déplorer un nouveau crime.

Joseph, qui se tortillait d’impatience depuis un bon moment, ajouta.

- On ne peut pas non plus écarter l’hypothèse qu’un cabréttaire ait voulu se venger.

Boissard le regarda avec des yeux ronds.

- Oui, pourquoi pas ? J’ajoute que nous avons relevé deux faits troublants sans que nous ayons pu établir un lien quelconque avec le crime. D’une part, on nous a signalé le passage de deux Auvergnats inconnus chez Bousca. D’autre part, suite à la visite d’un inspecteur, un receleur, également faussaire notoire a disparu. Voilà, je crois que je vous ai tout dit, monsieur Laplume. Revenez après-demain, nous aurons sans doute avancé. 

Laplume et Joseph ne s’attardèrent pas plus longuement. Ils marchèrent quelques minutes en silence en direction du journal.

- Finalement, on a bien fait de se pencher sur cette affaire, monsieur Laplume.

- L’avenir nous le dira, Joseph. J’ai l’impression qu’on a mis les pieds dans un gros sac de nœuds.

- Vous avez un plan pour la suite ?

- Ne confondons pas les rôles. C’est le boulot du commissaire. Il m’a l’air honnête et sérieux. Mais, cela ne nous empêche pas de fouiller un peu. Je vais essayer de savoir qui, dans les hautes sphères, s’intéresse de près à cette histoire.

- Je peux vous aider ?

-Pourquoi pas ? Tu vas aller jouer au chien de chasse. Demain après-midi, va te balader dans le quartier. Va boire quelques limonades et ouvre tes oreilles. Note tout ce que tu peux, je suis sûr que ce meurtre fait causer.

Sous l’œil admiratif de Joseph, Laplume rédigea son article sur l’affaire Caillaux. Quand il eut mis le point final, il se tourna vers le gamin et lui glissa deux billets dans les poches.

- Tiens, c’est pour tes faux frais, mais attention, seulement de la limonade.


Retour à La Une de Logo Paperblog

Dossiers Paperblog

Magazines