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MARIPASOULA - En Amazonia

Publié le 10 décembre 2012 par Georgezeter

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60 jours dans un collège d’Amazonie – Comme professeur d’anglais et d’espagnol - Gran Man Difou - Mari-Pasoula – Guyane - 2012

1)   – Le recrutement

Il se trouve que j’ai comparé avec 3 autres de mes collègues contractuels les modalités et les moyens de recrutement par le rectorat. Ce sont à peu de choses près des copiés collés.

Nos dossiers sont parvenus au mois du juillet ou début aout 2012 au rectorat de Guyane, nous avons reçus un accusé de réception, puis… Plus rien jusqu’à la mi-septembre. Tous ! Avons envoyé des mails afin de savoir ce qu’il se passait, mais sans réponse. Enfin, un message nous a fait savoir que « nous n’étions pas enregistrés », ou que le rectorat ne « possédait pas de dossier à nos noms », ou, que « l’inspecteur académique de notre matière n’avait toujours pas statué ». Nous avons envoyé encore nos dossiers complets… Enfin, on nous a fait savoir que tous les postes étaient pris, mais qu’il restait des postes à pouvoir à Maripasoula, Papaï-Chton ou autres villages d’Amazonie sur le fleuve… Où personne ne veut aller !

Comme déjà nous avions attendu à Cayenne et dépensé beaucoup d’argent, chacun d’entre nous sans trop y réfléchir acceptait les postes.

Personnellement, je suis venu au rectorat pour collecter des informations sur cette affectation, mais personne ne voulu me recevoir, j’ai téléphoné ; Une personne me dit qu’il n’y avait aucun problème à Maripasoula concernant le logement, les vols aériens, et surtout les modes de communication, particulièrement l’Internet. J’ai bien demandé si le collège avait Internet, car c’était le seul moyen d’être en contact avec ma famille. Il est évident que si j’avais connu ce qu’il allait m’arriver, 2 mois sans Internet, sans fax, sans téléphone…Je ne serais jamais parti à Maripasoula.

MANIPULATION !!!

2)   – L’arrivée

Monsieur le Principal vint me chercher à l’aéroport, pendant le trajet il me parla surtout de l’Internat « d’excellence »… Qui en fait s‘avère décrépie, où les vélos et les ordinateurs ont disparus/volés et les élèves vivent comme ils peuvent… Puis, me laissa entre les mains de Madame Montooth et ses  « explications » bien à elle. (Apparemment le rite est bien rodé, car, c’est aussi l’accueil d’autres de mes collègues, presque mot à mot)

Je fus chanceux de trouver le jour de mon arrivé à louer une petite maison, vide de tout, sans rien ; Même pas une étagère, une assiette, mais je fus chanceux comparé à mes autres « Co-légionnaires » qui eux pendant 1 ou 2 semaines se retrouvèrent dans le « confort » crasseux et spartiate du bâtiment de l’internat d’excellence des garçons.

J’arrivais un mercredi 3 octobre, et dès le lendemain, avec ce jour là 5 heures de cours, j’étais jeté dans l’arène…

Mon 1er cours fut suivi par une classe de 6 ème FLS, personne ne pris la peine de ce que voulait dire ce « FLS » : (Français en langue seconde) ; Des élèves français, comprenant avec difficulté la langue française, ne l’écrivant pas et ne la lisant pas… Et moi donnant un cours d’anglais… Ce premier cours est symbolique de tout ce qui allait suivre. « Marcher sur la tête »

MENSONGES !

3)   – Vie au collège

a)   La course du canard à la tête coupée.

Comme nous n’avons pas de salle de classe définie, nous devons courir d’une heure à l’autre d’un bâtiment à l’autre sous de grandes distances et sous un soleil de plomb ou sous des trombes d’eau selon la saison. Personnellement et jusqu’à ma démission début décembre, soit 2 mois - j’ai toujours rencontré des problèmes d’assignation de mes salles de classe, en plein soleil, 40° sans ventilateur. J’arrivais à l’heure, mais la salle était prise, je devais retourner au bureau de la principale adjoint suivit de mes 25 ou 30 élèves pour demander une autre destination… (Ce qui est une de des responsabilités de cette dame) Cela pendant deux mois, et des dizaines de fois car, avec mes classes de + de 30 élèves, le collège ne peut les loger ; et la dame adjointe y perdait son latin… Souvent, j’avais des élèves assis par terre…Alors, organiser une discipline ? J’avais 1 classe de 3ème de 7 élèves en espagnol et une autre de 32 élèves de 3ème en espagnol en même niveau… Du n’importe quoi !

b)   – La vie dans les classes sur…

Il serait bien que les néo-arrivants, professeurs soient avertis de ceux qu’ils vont rencontrer… Deux publics. Des enfants Aluku et des enfants Amérindiens. SI différents 

Une seule heure d’information aiderait à ne pas dès le départ se « griller » par des erreurs grossières telles que j’ai pu en commettre. Là, je vais parler de mon expérience personnelle.

Les enfants Aluku très exubérants, très bruyants, très « vivants » et attachants… Mais si le professeur parle en haussant la voix, dès qu’ils se sentent accusés ou pointés du doigt baissent la tête et il devient impossible d’obtenir un seul mot. Devant vous un bloc silencieux qui ne parlera pas et ne réagira pas. Rien ! Venant d’un poste en métropole, d’une ZEP de Marseille, ce comportement me parut irrespectueux et provocateur, car, ne pas répondre à une question aussi simple que « as-tu entendu ce que je te dis ? » et ne rien obtenir eu pour conséquence le début de situations conflictuelles qui aboutirent par des incompréhensions mutuelles ; qui... L’élève se sentant agresser par son professeur et le professeur agressé par un élève irrespectueux… Quant aux élèves Amérindiens ; Eux furent source de surprises… Aucun soucis de disciple mais plutôt un comportement de grande soumission en apparence: parler d’une voix inaudible, ne pas regarder son professeur dans les yeux, mettre sa main devant sa bouche lorsque l’on parle… En classe de langue vivante… Ayant eu la chance d’enseigner en Thaïlande, assez rapidement je retrouvais ce que j’avais vécu 10 ans avant. Y aller doucement, ne pas brusquer et me faire accepter. Je crois que j’y suis arrivé avec ceux-ci. Mais ai échoué avec l’autre groupe par ignorance.

c)   Mes « chers » Collègues d’une autre planète

Ce collège est ce que j’ai vu de pire en ce qui concerne la non- interrelation entre personnes pratiquants le même métier. Chacun pour soi – chez soi ! Vraiment une ambiance délétère, VRAIMENT !

Ya en minorité et c’est unique les «titulaires », ces « Maréchaux » à sceptre suffisant.

Ya les « vieux de la vieille » là depuis des lustres qui savent « nager » à contre- tous courants.

Ya ces supers malins, qui sans avoir fait aucune étude, se retrouvent propulsés à des postes et des salaires jamais rêvés dans le « vrai monde ».

Ya les « djeunes » qui viennent ici et c’est bien, vivre une expérience de vie et « d’aventure ».

Ya, et ils sont très nombreux ceux qui ont un penchant pour le « destroy » La bouteille et la fumette et qui peuvent s’enivrer/s’éclater presque chaque jour sans aucune différence sur les résultats de leur vie professionnelle, et le top du top conduire leur véhicule bourré comme des coings sans aucune perte de point sur le permis. Cette catégorie inclus toutes celles susnommées…

Ya, encore les plus malins que les plus malins qui tout en étant professeur montent des business d’épicier, location de maison, élevage de poulets… GREAT !!! Orpailleurs

   .

d)   « L’Indirection » des 4 giratoires

Ce collège est dirigé par un « Shiva » à plusieurs têtes, à plusieurs queues : Le principal, Barbin qui serre les mains le matin en demandant et espérant entendre « Tout va bien ! » ; Son adjoint Bergson qui parle sec, mais qui a du mal à organiser ; les CPE, qui ménagent la chèvre, le choux et la prairie où tout cela se passe ; les « surveillants, surveillantes » une grande famille qui, si proches des élèves ne peut sévir, et le personnel du collège dépendant complètement des décisions de la direction qui elle-même dépend de la bonne entente de la base… Ce collège devrait s’appeler Gran Man Ubu Difou.

C’est surtout numéro 1 et numéro 2 qui sont intéressant. C’est comme au commissariat lorsqu’en garde à vue, « cuisinez », vous avez le « gentil » et le « méchant »… Douche Ecossaise, salée…

Le 2eme jour de ma modeste présence, au matin à 7heurs 45, des habitants, des élèves ? Avaient déversés devant les grilles coulissantes de l’entrée du collège des poubelles, des détritus éparses, des bouteilles cassées pleines de tessons, et avaient peinturluré d’excréments les poignées des portes et grilles de l’entrée… Monsieur Barbin avait beau demander à son personnel d’entretien de nettoyer et laver ; aucun ne bougeait. C’est seulement le jeune homme rasta des photocopies, qui d’ailleurs est le seul à bien faire son travail qui accepta de laver les souillures… Les autres regardaient sans bouger… Et ils ne bougent pas beaucoup ; Ces « autres » de manière générale…

Ce matin là, je comprenais combien mon « patron », grand buveur de vin rouge dominait la situation… J’étais là depuis 2 jours. Cette situation s’est répétée 4 fois en 2 mois ! Un succès !

Avoir un « patron » qui ne veut entendre que : « tout va bien » ; son adjoint qui veut s’imposer que par un langage sec, humiliant et contre-productif ; et cette petite garde prétorienne de profs fayots qui pour diverses raisons sont ses garants, ses « observateurs » un peu mouchards, ses « tampons » contre cette piétaille de contractuels indisciplinée, grande gueule qui ne veut accepter ce refrain  « à Maripasoula, tout va bien !!! », Sans aucun problème : « Des enfants si agréables ! » et puis…C’est ce que le rectorat veut entendre ? Et le ministère aussi ? Ah ! Ce monde éducatif si beau… De MENSONGES !!!

Je me souviens qu’un élève en me croisant hors du collège et accompagné de son frère ainé et de son père m’insultât de « sale enculé de zeter » La seule conséquence fut que l’adjointe, Madame Bergson m’envoya ce mot rédigé ainsi : « les problèmes extérieurs au collège ne relèvent pas de notre autorité »… Je m’inquiète lorsque Madame Bergson sera nommée principale ; De par son manque de discernement.

e)   Une CPE des 6èmes absolument « Incroyable »

Madame Montooth, avec qui j’ai dû composer pendant deux mois : signalée depuis des années comme étant déséquilibrée mentale. Mais toujours fidèle au poste ; invirable car personnel en titre de l’éducation nationale malgré les tentatives du Gran Man Barbin…

Je fus le témoin d’une scène dans le bureau de cette femme avec comme victime un de mes élèves de 6ème C : Lama Benisie qui se fit insulter « d’enfoiré » ; Madame Montooth était assise derrière sont bureau, elle avait mis très fort de la musique rock sur son ordinateur, les stores de son bureau étaient tirés, tout était sombre presque « gothique » sous sa frange de cheveux teint en noir corbeau elle éructait ! Le pauvre Lama, pleurait, et elle criait « t’es une merde ! T‘es une merde d’enfoiré ! Qu’ajouter suite à de telles méthodes éducatives?

4   – La vie hors du collège

Là, je dois dire que cela vient de ma considération personnelle de ce que dois être « ma vie ».

Par culture, j’ai toujours très bien divisé ce qu’est ma vie professionnelle et ma vie privée. Sauf, qu’à Maripasoula cela est impossible ! Sans arrêt croiser ces collègues du collège et parler des soucis de travail du collège ; des habitants qui eux aussi dépendent de l’économie du collège… LE COLLEGE !!!

Je n’étais pas préparé à ça. Vivre, manger, dormir avec mon travail. D’autant que la majorité de la population Aluku dépend de notre présence à nous ; les « Métros ». Ce sentiment réel de se faire sans arrêt racketter, plumer par des gens se balançant dans un hamac et pratiquant des prix hors norme, par des loyers « parisiens » non déclarés, par le fait de ne pouvoir acheter un deux roues sans se le faire voler et ne pouvoir rien dire. Je me souviens d’avoir demandé à un parent d’élève de me raccompagner (1 km) et d’avoir à payer 5 euros… Rien n’est gratuit, alors que nous prenons soin de leurs enfants…

C’est certainement le seul endroit au monde où les noirs roulent en 4x4 et les blancs cheminent à pied sous la cagna.

Le plus drôle c’est que nous les professeurs allons payer des impôts sur nos revenus, alors, que la population locale à qui nous payons des loyers, des achats d’aliments ne paiera rien, car tout est au « black »… Drôle ne trouvez vous pas?

Des maisons furent construites sur un contrat HLM et furent vendues aux habitants, qui, étaient supposés vivre sous ces toits… Aujourd’hui, elles sont louées à des 600 euros par mois aux « métros » par ces « propriétaires ». L’or, l’OR a amoindri ce qui faisait les Aluku ! Le RSA aussi. J’aurais voulu apprendre d’eux !

Et puis, cette solitude de vie culturelle, sentimentale, sexuelle et surtout cet alcoolisme rampant qui touche presque tout à chacun. Voir à chaque sortie des personnes que j’apprécie, saoul de bière, de whisky ; ces couples qui titubent et se séparent. Maripasoula à le syndrome de l’assommoir. L’abrutissement Zola.

1) – Tout n’est pas si mal…

Je cite G. « Je suis venu ici il y a longtemps, car j’ai le sentiment d’avoir pu réaliser tout ce que je voulais, tout ce qui est possible. Construire un monde avec en son sein mes aspirations pour la liberté de circuler en des terres vierges de loi, le fleuve, la forêt ; savoir chasser et pêcher pour me nourrir, ne pas être emmerder par des règlements impossibles, construire ma maison, très belle et me réaliser. Etre un homme entier, ma famille !

Merci G. Cher ami ; Je suis heureux de t’avoir croisé, tu m’as apporté.

2) – Concluzion

Bien !

Je n’ai pas l’impression d’avoir été le mec le plus intelligent, j’ai accepté un contrat qui ne convenait pas ; j’ai subit à cause de mon âge, de mon manque de souplesse et mes limites le rejet « Maripasoula ». Le syndrome de ceux qui ne peuvent s‘adapter. Pourtant à ma décharge j’ai vraiment essayé, très « hard » ; j’aurais vraiment aimé-aimer… Apprendre l’artisanat des Aluku sur le bois, la langue qui pour moi est de racine Engloise… J’aurais aimé aimer le fleuve jaune… J’aurais aimé pouvoir… Et je n’ais.

Alors, je vous présente toutes mes plus plates excuses mes amis pour vous avoir saoulé de mes « je ne sais pas comment vous pouvez vivre là ! » Sorry from the deepest of my heart!!!

Le rectorat devrait arrêter de « gérer » les contractuels comme une « masse » sans âme de « viande » de povres cons venant. Oui ! Sur 500 nouveaux contractuels. Ils savent bien que 10% vont péter un câble, vont partir, vont donner leur démission… Et un très petit nombre qui comme moi vont « foutre le Bazard-bordel », comme aller dans vos murs bunker, vous défier, gueuler…Alerter le plus haut ! Ecrire dans les médias.

Je voudrais dire au Rectorat de ne pas envoyer comme ça au « feu » des personnels absolument pas préparés à ce qui va arriver : Une chaleur d’enfer ; Des élèves très difficiles à gérer - du à leur histoire culturelle et familiale. Ya plein d’incestes et plein d’abus de petites enceintes dès 13 ans. Un contexte presque impossible de par les difficultés à se nourrir correctement, à se loger, à communiquer, à vivre, se déplacer, à accepter une société sans pitié, de survie ; une vie sans but ; Un fleuve trop bas… Trop haut. Accompagné de moustiques plein de Dengue, de Palu, de grattages, de trucs allergiques qui démangent, de chiasses et d’intestins en berne… De toux, et de raies qui piquent ??? Et la moustiquaire au dessus de l’âme.

Le rectorat sait cela depuis très longtemps…Tout cela comme moi, Pour ceux qui ne font que passer !

Adieu Maripasoula, j’ai appris une chose : J’ai pris un coup de vieux salutaire. A chaque moment de sa vie il faut réaliser les choses de « son » instantané ; Nous ne sommes là que pour un instant très bref, vif ! Alors vivons à fond sans bousculer le doigt qui montre la Lune…

… Merci à vous mes amis (es)

Yours sincerely,

George L. Zeter/décembre 2012

J’ai voulu être un Chêne, et je ne suis qu’un gland

(Pierre Dac)

  


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