Magazine Journal intime

Une journée aussi belle que le miracle contenu dans le dernier opus de Céline Dion

Publié le 15 décembre 2012 par Anaïs Valente

Il avait décidé que ce jour serait le premier jour du reste de sa vie.  Oh, l’expression n’était pas de lui, que nenni, mais il l’aimait d’amour, il la chérissait, il la vénérait, car il en rêvait chaque jour, que ce jour soit le premier du reste de sa vie.

Et chaque jour s’écoulait comme le précédent, morne et silencieux, terne et solitaire, triste et délétère.

Mais cette fois, il l’avait décidé, tout allait changer.

Il s’était levé de bonne heure afin de prendre un bain, chose inhabituelle pour ce handicapé de la maniaquerie, comme disait sa mère.  Il s’était coupé les ongles, rasé le duvet qui lui servait de barbe pour n’en garder qu’un millimètre lui donnant un air de brun ténébreux, du moins l’espérait-il.  Il avait tenté de discipliner sa tignasse en bataille à grands coups de peigne emprunté à son paternel, était presque parvenu à cerner cet épi rebelle.  Il avait enfilé ces fringues préparées la veille, repassées même, ô miracle.

Il était tout beau tout propre tout parfait.  Du moins il tentait de s’en convaincre et c’était là sa tâche la plus ardue, plus que le repassage, plus que le rasage, plus que le nettoyage de ses orifices auriculaires.

Pour s’en persuader donc, il avait adopté la méthode Coué et se répétait en boucle depuis plusieurs jours, à la manière d’un mantra, « Mon petit Raf, tu es quelqu’un d’exceptionnel, tu es grand, tu es sûr de toi, tu peux le faire, tu vas le faire ».

Mais la méthode Coué fonctionnait mal, car il ne croyait pas vraiment à son mantra.  Oh, il avait bien le ventre plat et un peu musclé et il réussissait pas trop mal à l’unif, mais sa grande taille le handicapait plus qu’elle ne le servait et il se tenait en permanence voûté, regard vers le sol, comme pour s’excuser d’exister. 

Soit, la méthode Coué allait l’aider à avancer dans cette journée pas comme les autres.

Il quitta donc le pavillon familial et partit pour l’école, comme chaque jour.  Il marcha deux kilomètres, comme chaque jour, entra par la gauche, parcourut le couloir peint de vert (vert j’espère ?), comme chaque jour.  Il déposa son sac au pied de sa chaise, puis s’assit, comme chaque jour.  Alors, il récita son mantra, enfin il tenta de le faire, car il en avait oublié quasi tout « euh, con, mignon, musclé, peux le faire, va le faire ». 

Oui, il allait le faire.

Et il le fit.

Il se leva, traversera les deux mètres qui le séparaient d’elle, se posta devant elle, se redressa, bomba le torse, fit bouger sa mèche rebelle, passa sa main sur son menton pas trop rasé de brun ténébreux, leva les yeux, la regardé et, enfin, enfin, il lui parla : « Céline, ça te dit d’aller au ciné avec moi ce soir ? »

Oh que oui, cette journée fut aussi belle que le miracle contenu dans le dernier opus de Céline Dion.

Car le miracle fut qu’elle dit oui !


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