Magazine Journal intime

J’ai attrapé un coup de soleil, un coup de folie, un coup d’inconscience (librement inspiré de Richard Cocciante)

Publié le 10 avril 2008 par Anaïs Valente
Lundi de Pâques.
Ennui profond.
Pas d’énergie pour écrire des billets, juste suffisamment pour faire une monstrueuse vaisselle poilue, une lessive de 100 chaussettes orphelines et pour glander toute la journée.
Je surfe sur ma page orange, espérant une rencontre miraculeuse qui me ferait croire en l’amour.
Mais je ne reçois que des « t’as pas une photo ? » (nan, je montre pas ma tronche, c’est clair ?) « tu fais quoi dans la vie ? » (comme si les histoires d’amour étaient conditionnées à la profession des deux protagonistes) et « c’est quoi ton prénom », voire pire « tu cherches quoi ici ? » (ben voyons, un nouveau frigo ou une raquette de tennis).
Quand soudain, un popup « envie de parler, choisis le sujet ».  ça me plait.  Parler, et non questionner, ça change.  Ça fait des vacances, sur la page orange, de parler, sans subir un interrogatoire en règle.  
Alors je propose un sujet : « le drame des crevettes grises de la mer du Nord mangées par les humains sans cœur que nous sommes ».  Ben quoi, il est pas bien mon sujet ?  Faut savoir, vous devez savoir, que les crevettes grises sont un peu comme le fil conducteur de mon guide des paresseuses, enfin, non, pas le fil conducteur, mais plutôt un sujet qui revient régulièrement, comme un clin d’œil.  Alors voilà, nous avons parlé des crevettes.  Selon lui, elles étaient heureuses, d’être baignées dans la mayonnaise.  Moi je craignais pour leur taux de cholestérol.  Il me précisait qu’il la prenait light, sa mayonnaise.
Et puis j’ai lâché la phrase qui tue « le nirvana, c’est de les manger, assise sur le sable, en regardant la mer ».  
Et il m’a dit « ok, on y va ».
Un lundi de Pâques.  Enneigé.  A 17 heures.
Croyez-le ou pas, enfin si, croyez-le, j’ai dit oui.  Même que j’avais peur de partir à la mer avec un total inconnu avec qui j’avais échangé dix phrases.  Même que j’avais encore plus peur en apprenant qu’il avait une camionnette blanche, comme Dutroux et Fourniret.  Même que je me suis dit que j’étais folle, complètement folle.  Même que je me suis dit que oui, j’étais folle, mais que si je ne le faisais pas maintenant, je ne le ferais jamais.  J’ai toujours rêvé d’aller à la mer, sur un coup de tête.  Manger des crevettes.  Ou des moules.  Ou de partir à Paris, juste pour y rester une heure, voir la Tour Eiffel scintiller.
Alors je l’ai fait.
Trois minutes avant de partir, j’ai reçu ceci, d’un auteur de Chloé des Lys, maison d’édition dont je vous ai déjà parlé, Martine, extrait de son livre « Tâches d’encre ».
Nord
Mon Nord, c’est ce ciel profondément gris
Le vent qui fait murmurer les lèvres
Leur faisant dire la douceur de la brise
La chaleur des bûches allumées et celle du café versé.
Mon Nord, c’est cette mer couleur grise
L’eau qui fait murmurer les lèvres
Au rythme du ruissellement des pluies
Au son des bûches qui craquent et de la cafetière reposée.
Mon Nord, c’est ta chevelure devenue grise
Le sourire qui fait murmurer tes lèvres
Leur fait décliner la tendresse de l’âge
Comme tu déclinais, dans le passé, ton latin adoré.
Mon Nord, c’est ce ciel infini de gris
Nuances qui font murmurer les lèvres
Au son du vent de nos plaines
Au rythme d’un accordéon fatigué.
Mon Nord, c’est
Cette mer du Nord qui vient et qui repart ; c’est
Ce vent d’Ouest qui souffle et qui pique ; ce sont
Ces plaines fertiles qui offrent le blé ; ce sont, c’étaient aussi
Ces travailleurs frontaliers et
L’odeur du pain grillé caressant les maisons alignées.

Mon Nord, ce sont
Les bateaux, ce sont
Les froids, ce sont, ce seront
Les travailleurs émigrés et
L’odeur du pain fraîchement acheté.

Mon Nord,
Ce sont des rideaux d’arbres, des ruisseaux tout gais
Et des rideaux fermés sur des cœurs entrouverts
Et des courettes ouvertes au seuil d’usines fermées.

Mon Nord,
Ce sont les sirènes qu’on n’entend plus
Et les cris des ouvriers en colère
Et la chaleur de la tasse de café versée
Et la bonne odeur du pain qui taquine le nez.

Mon Nord, le Nord, mon Nord, c’est mon Nord
Et je l’aime.

Et puis je suis partie... (à suivre)

Dessin issu de http://www.promoviande.ch/ (toujours pas compris comment un site dénommé promoviande fait la promo des crevettes)

crevette



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