Magazine Journal intime

Pas assez d’une vie (slam)

Publié le 27 mars 2013 par Sexinthecountry2

tempsPas assez d’une vie tsé…

Pour regarder tes cils blonds pendant que tu dors

Et répertorier toutes les figures de style qu’ils m’inspirent :

Blonds comme des pieds de vent, comme une peinture de Monet, comme les pattes d’une araignée d’eau, comme des vermicelles de riz avec juste ce qu’il faut de sauce soya, comme un beau set de patio en rotin,

Pas assez d’une vie non.

Des fois je me lève en me disant «aujourd’hui sera la journée idéale» : faire l’amour 4 fois, aller prendre une marche de deux heures, écrire au moins trois slams,  confire des cuisses de canard, faire une brassée de lavage, dormir une demi-heure en cuillère, désherber le jardin, repeindre les murs de la maison, prendre un verre de rosé sur la terrasse.

Pis je vais me garder au moins deux heures de contemplation :

15 minutes de fascination devant les oreilles du chat qui bougent,

30 minutes d’extase à ne pas en revenir du contraste entre la pelouse verte et la cabane d’oiseaux jaune «tellement vert, tellement jaune, tellement deux couleurs»

45 minutes de bouche ouverte assise sur la chaise de parterre en plastique bleu délavé

Une demi-heure à continuer à répertorier les figures de styles pour tes beaux cils blonds :

Comme un garde-robe de cèdre, comme un plancher de bois franc, comme des pétales de bouton d’or découpés à l’exacto, comme des rameaux de pâques, comme les cheveux de Rahan le fils des âges farouches

Ouin, des fois je me lève en me disant aujourd’hui la journée sera idéale

Finalement j’ouvre mon laptop, je remplis une demande de bourse, je me recouche pis je m’endors en me masturbant.

Pas assez d’une vie pour prendre des cours de chant, apprendre une autre langue, faire du striptease burlesque, devenir ébéniste, construire mon propre Gazebo, tricoter des gilets de laine, mettre des enfants au monde,

Les élever en plus.

Quand j’ai mal au coccyx, quand mon nerf sciatique me fait hurler de douleur si je me penche pour lasser mes bottes, je le sais, je le sens que je suis déjà en train de mourir un peu

Mon corps me nargue et me fait ressentir à toutes les saisons que le compte à rebours est commencé

Des fois j’aurais envie d’être un vampire pour aller sucer le temps que les autres passent à regarder les feux de l’amour, à faire des mots croisés chez Tim Horton, à jouer aux machines au casino de Charlevoix, à participer aux sondages maison de TVA,

J’entrerais par effraction dans salon et je planterais mes dents dans leurs cous pour aspirer tout leur temps gaspillé et les laisserais pantois devant la télé, les yeux vides, le corps affaissé, ce qui ne changerait pas grand-chose.

Pas assez d’une vie pour écrire 6 romans, monter 8 shows, aimer 10 hommes… Un deux, trois, quatre, … ok ça c’est réglé.

Pas assez d’une vie non.

Connaissez-vous la définition de la seconde. Quand on dit à quelqu’un «Donne-moi une seconde» Ce qu’on lui dit dans le fond c’est :

Donne-moi la durée de 9 milliards 192 millions  631 milles 770 périodes de la radiation correspondant à la transition entre les niveaux hyperfins de l’état fondamental de l’atome de césium.

Dit de même, ça l’air tellement précieux. Imaginez une minute, une semaine, une année…

Ça fait que quand Camus dit que la question philosophique fondamentale est : dois-je ou non me suicider? Ben j’ai envie de lui répondre : me suicider? J’ai pas l’temps criss!!!



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