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Le parc

Publié le 20 avril 2008 par Cameron

Parlons-nous. Ou plutôt non, ne parlons pas, asseyons-nous ensemble sur ce banc, et en silence, s’il te plaît, juste comme cela, juste comme des oiseaux se posent.

Ne parlons pas.

Il y a eu autrefois, à cet endroit du parc, un soleil qui ne portait pas son nom. Je me souviens, en levant la tête on voyait encore à l’horizon fumant les remparts de la très vieille ville qui a sombré. C’était un rêve, et il suffisait de regarder ensemble pour qu’il devienne réalité.

Ne parlons pas.

Les rosiers sont toujours là, eux, ils n’ont pas disparu. Ils sont simplement d’une autre couleur, et assombris de pluie, dressés envers et contre tout, petite garde végétale qui rend les honneurs à nos souvenirs. Mais le gravier n’est plus le même. Ni les rivets du banc, ni l’odeur montant de la ville autour de nous, la vraie ville, celle qu’alors nous fuyions et qu’aujourd’hui je retrouve jusque dans tes moindres habitudes. Autrefois, nous n’étions pas d’ici. Nous aimions être de passage.

Ne parlons pas.

Et de cette distance entre nous, tu te souviens ? Comme une route qui ne pouvait que nous mener au même endroit, comme la canne blanche que nous nous prêtions tour à tour pour guider nos pas d’aveugles. Cette distance dont j’ai perdu le goût plus encore que la nécessité. Cette distance qui faisait que nous étions deux à la ressentir.

Ne parle pas.

Je veux encore croire qu’au-delà de notre vue la très vieille ville étend toujours son paysage d’enfance rêveuse et maladroite. Je veux sentir le parfum de ces roses que nous n’avons pas plantées mais qui elles ont résisté. Je veux tendre la main, et frôler la tienne sans y penser. Ne parle pas. Laisse-moi aimer le silence. 

P.S. : ces mots sont pour M*... et pour moi.


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